Transidentité : les lois et leurs opposants au Royaume-Uni et en Espagne
En Angleterre, la décision vient d'être prise afin de limiter la prescription des bloqueurs de puberté. Face à une trop forte demande, les services de santé publique préfèrent fermer le centre spécialisé dans ce domaine. Tandis qu'en Espagne, le changement de sexe auprès de l'état civil est devenu légal à partir de 16 ans, il y a un peu plus d'un an, la loi Trans suscite toujours autant de polémiques.
Royaume-Uni : plus de 5 000 demandes par an pour des bloqueurs de puberté
Le service de développement de l'identité de genre fermera à la fin du mois de mars 2024. Après une enquête indépendante, les autorités constatent que les demandes ont explosé, on est passé de 250 par an il y a 10 ans à plus de 5 000 désormais. Utiliser les bloqueurs de puberté permet à un adolescent d'empêcher l'arrivée de la pilosité faciale ou à une adolescente de stopper la croissance de sa poitrine. Ce qui détermine en fait son apparence féminine ou masculine. Ces médicaments permettent de limiter les traitements futurs ou même les opérations à l'âge adulte pour vivre pleinement sa transidentité.
Le nombre de requêtes, venant de mineurs, a fini par inquiéter et la santé publique au Royaume-Uni (le NHS), a décidé de changer de méthode, pour une approche moins générale, plus ciblée. "Nous avons conclu qu'il n'y a pas suffisamment de preuves pour étayer la sécurité ou l'efficacité clinique des hormones anti-puberté pour rendre le traitement systématiquement disponible à l'heure actuelle", déclare le NHS. Le service dédié va disparaître, mais les adolescents actuellement sous traitement continueront d'être accompagnés. Ils sont une petite centaine au total. Leur protocole va se poursuivre dans des hôpitaux de Leeds et de Londres.
Une conservatrice veut interdire la prescription d'hormones à des mineurs
L'Angleterre ne renonce pas aux bloqueurs de puberté, mais les autorités médicales disent vouloir mieux encadrer leur prescription. Elles estiment que le suivi n'était pas assez poussé jusqu'ici et que les adolescents n'étaient pas suffisamment accompagnés, notamment sur le plan pédiatrique, neurologique et psychologique. Un accompagnement qui sera développé dans deux nouveaux services qui vont ouvrir en avril 2024 à Londres et à Liverpool. Une approche plus ciblée, moins massive, c'est ce que mettent les services de santé en avant.
L'association Mermaids qui accompagne la jeunesse transgenre parle d'une décision "décevante". "Cette nouvelle est un coup dur et affectera profondément nos communautés", assure l'association. Au contraire dans les rangs de la majorité politique actuelle, on salue cette décision. C'est le cas de Liz Truss, l'ancienne Première ministre conservatrice. Elle a rédigé un projet de loi discuté en ce moment au Parlement qui interdirait la prescription d’hormone à des mineurs, dès lors que ce traitement altère leur corps et remet en question leur sexe.
Espagne : une procédure de changement de sexe à l'état civil élargie aux 12-16 ans
Le 16 février 2023, la "Loi Trans" est adoptée par les députés espagnols, un jour historique pour les militants LGBT. Ce texte permet surtout de simplifier la procédure de changement de sexe à l'état civil. L'autodétermination du genre est désormais possible en Espagne, via une simple déclaration administrative. Dès l’âge de 16 ans, les personnes peuvent changer leur nom et leur genre à l’état civil, sans accord parental et sans avoir à fournir un justificatif médical ou psychologique attestant d’une dysphorie de genre, ou la preuve d’un traitement hormonal.
Par ailleurs, cette loi permet d’élargir l’autodétermination du genre aux 12-16 ans, mais sous certaines conditions. Les 12-14 ans doivent obtenir le feu vert de la justice, tandis que les 14-16 ans n’ont besoin que de l’accord de leurs tuteurs légaux. Un point très polémique qui a provoqué l’année dernière de fortes tensions au sein de l’ancien gouvernement de coalition, entre Podemos et les socialistes qui avaient voulu modifier le texte.
L'opposition veut abroger cette loi, Madrid l'a déjà modifiée
Un an après son entrée en vigueur, cette loi soulève toujours autant de polémique. Alors que les associations LGBT et les médias progressistes saluent son entrée en vigueur, à droite, la Loi Trans est toujours autant décriée. Le journal conservateur El Mundo évoquait mardi 19 mars 2024 "l’explosion" du nombre de cas de changements de sexe en Espagne : "400% de cas en plus, alors que l’Europe fait marche arrière", peut-on lire dans le journal.
Mais ce n’est pas tout, le leader de l’opposition et du Parti populaire, Alberto Núñez Feijóo, a déjà affirmé à plusieurs reprises qu’il aimerait abroger cette loi qui n’a pas de sens, selon lui. "Il est beaucoup plus facile de changer légalement de sexe que de passer son BAC. Il est beaucoup plus facile de changer de sexe que d’obtenir son permis de conduire, d’un point de vue légal. Il suffit d’aller à l’état civil et de soumettre l’idée. Il suffit de dire : 'moi, à partir de demain, je suis une dame, ou à partir de demain, je suis un monsieur'. Nous ferons une loi trans. Il y a un collectif trans qui a ses droits et nous allons les réglementer, bien sûr. Mais cette loi trans, non", déclare Alberto Núñez Feijóo. La région de Madrid, emmenée par l'ultralibérale Isabel Díaz Ayuso, a déjà pris les devants en modifiant en décembre 2023 les lois trans et LGBT madrilènes, en provoquant la colère du gouvernement central de Pedro Sánchez.
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