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Le débrief politique. Emmanuel Macron face au Congrès à Versailles

Le premier Congrès du quinquennat d'Emmanuel Macron, lundi, à Versailles, qui remplacera désormais la traditionnelle interview du 14 juillet, est au coeur de l'actualité politique.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Emmanuel Macron a tenu son premier discours devant les parlementaires réunis en Congrès à Versailles, lundi 3 juillet. (ERIC FEFERBERG / POOL)

Un discours jupitérien

Le discours d'Emmanuel Macron, lundi 3 juillet, a duré une heure et demie et il était très dense. Le ton était très politique. Après une semaine de reproches contre sa verticalité, son "jupitarisme", sa marche impériale jusque dans le décorum du château de Versailles, Emmanuel Macron a tenu à rappeler que réunir le Congrès est un droit. Il figure à l'article 18 de la Constitution. Le président de la République a donc mis les choses au clair : il reviendra tous les ans rendre compte de sa politique. C'est sa conception des choses et du respect du Parlement.

Un tacle et un avertissement

Emmanuel Macron a profité de ce Congrès pour commencer à écrire son quinquennat. Après l'image et la communication maîtrisée depuis deux mois, voici le son de la "touche Macron". Il a taclé ses prédecesseurs : "Nous avons, vous et moi, reçu le mandat du peuple. Cette obligation est celle d'une transformation résolue et profonde tranchant avec les années immobiles ou avec les années agitées, toutes au résultat également décevant. Chirac, Sarkozy ou Hollande, vous avez le choix pour la cible. Emmanuel Macron est venu annoncer une "alternance profonde", une "République contractuelle".

Emmanuel Macron a également dispensé des conseils à son propre camp. Édouard Philippe, au premier rang, a reçu en direct un avis sur la méthode à adopter. "La France n'est pas un pays qui se réforme, c'est faux. Pardon monsieur le Premier ministre de vous annoncer aujourd'hui devant le Congrès cette mauvaise nouvelle. La France est un pays qui se cabre quand on lui parle mal !" Économies, ordonnances, "attention à ne pas braquer les Français", semble lui dire Emmanuel Macron.

Un chantier institutionnel sur la table

La principale annonce de ce Congrès est une réforme institutionnelle, qui confirme et précise ses engagements de campagne. Réduction d'un tiers du nombre de parlementaires, introduction d'une dose de proportionnelle, accélération du travail parlementaire avec moins de lois votée plus vite et avec plus d'évaluation... Le président se laisse un an pour concrétiser tous ces chantiers. "Que l'on se garde des demi-mesures et des aménagements cosmétiques", prévient-il. La garde des Sceaux et les deux présidents du Sénat et de l'Assemblée doivent rendre leurs copies au plus tard à l'automne.

Sur la méthode, Emmanuel Macron utilisé la méthode de la carotte et du bâton. "Ces réformes seront soumises à votre vote. Mais si cela est nécessaire je recourrerai au vote de nos concitoyens par voie de référendum", détaille le président de la République. Comprenez : si vous acceptez ma réforme, c'est vous qui l'adopterez, sinon c'est au peuple et par-dessus vous que je demanderai de trancher !

Plus de contrôle de l'exécutif

Parallèlement à ce chantier législatif, Emmanuel Macron a offert des contre-parties aux parlementaires. Il propose notamment un plus grand contrôle de l'exécutif et une plus grande représentativité. Le droit de pétition sera revu, mais on n'a pas les détails. Les ministres rendront compte de leur travail tous les ans. La Cour de justice sera supprimée. La justice sera plus indépendante et, la 3e chambre, le Conseil social économique et environnemental (Cese), relativement méconnu, devra jouer un rôle plus grand.

En complément de ces points très institutionnels, Emmanuel Macron a donné quelques mesures très concrètes qu'il veut appliquer prochainement comme la levée de l'état d'urgence à l'automne ou la relance de l'Europe à travers des conventions démocratiques. Cependant, Edouard Philippe a de quoi largement compléter avec son discours de politique générale, mardi 4 juillet, notamment sur l'économique et le social. Le Président a largement survolé ces points, en disant qu'il fallait que "chacun trouve sa place" et protéger sans créer des "assistés".

Des réactions variées après le Congrès

Après le Congrès, dans le salon des Bustes du château, Marine Le Pen ressort avec le même état d'esprit qu'à son arrivée. "J'ai eu le sentiment d'assister à un sermon de télévangéliste. Je trouve que ça fait cher la conférence de presse. Il commence les choses mais il ne les termine pas. Nous n'en savons donc pas plus en sortant qu'en entrant."

Les différents présidents de groupe ont aussi pu profiter d'un droit de réponse mais en l'absence du Président, comme le veut le principe de séparation des pouvoirs. Il y a eu onze interventions au total. Bruno Retailleau, pour Les Républicains, parle d'une opposition vigilante. "Ne nous demandez pas d'abdiquer notre liberté, d'abdiquer nos convictions. Refusez cette tentation hégémonique qui ne serait bonne ni pour votre gouvernement, ni d'ailleurs pour votre majorité. Ensemble nous pouvons travailler en vous rappelant que la seule loi qui compte (...) c'est celle à laquelle on parvient grâce au débat. Pas à la pensée unique."

Emmanuel Macron s'est défendu de toute pensée unique par un peu d'autodérision. "Je refuse pour ma part de choisir entre l'ambition et l'esprit de justice. Je refuse ce dogme que pour bâtir l'égalité, il faudrait renoncer à l'excellence, pas plus que pour réussir il ne faut renoncer à donner une place à chacun. Le sel même de notre République est de savoir conjuguer ces exigences, de faire tout cela en quelque sorte en même temps."

Pour le socialiste Olivier Faure, au contraire, gouverner c'est choisir. "Mais monsieur le Président, choisir ce n'est pas écrire que l'état d'urgence n'a pas vocation à durer et en même temps vouloir graver des mesures d'exception dans le droit commun. Choisir, ce n'est pas affirmer protéger le monde du travail et en même temps revenir sur le compte pénibilité ou plafonner les indemnités pour licenciement abusif." Le socialiste qui conclut ainsi : "Méfiez-vous de la victoire monsieur le Président. Elle est parfois mauvaise conseillère." De leur côté, les parlementaires de La France Insoumise ont mis en place un boycott place de la République.

L'avertissement à la presse

Faire une loi de moralisation de la vie politique, ce n'est pas pour "en même temps" demander à la presse de limiter ses investigations sur le personnel politique. C'est pourtant ce qu'a fait Emmanuel Macron. "J'appelle à la retenue, j'appelle à en finir avec cette recherche incessante du scandale, avec le viol permanent de la présomption d'innocence, avec cette chasse à l'homme où parfois les réputations sont détruites."  Cette étrange incursion du 1er pouvoir dans le 4e résonne avec une actualité brûlante : l'affaire des assistants du MoDem, Richard Ferrand et Les mutuelles de Bretagne, Muriel Pénicaud, ministre du Travail et le voyage d'Emmanuel Macron à Los Angeles en 2016.

La note du débrief

Une bonne note pour la Président, grâce à qui la mythologie revient très à la mode ! Alexis Corbière, le député de La France Insoumise, complète le panthéon des dieux grecs et romains. La prestation de Jupiter l'a laissé de marbre et l'a même endormi : il ironise donc sur Twitter autour du dieu Hypnos, du nom du Dieu du sommeil. C'était le père de Morphée, le dieu des rêves !

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