Le débrief politique. Emmanuel Macron, le maître des horloges
L'annonce de la composition du gouvernement reportée de 24 heures, pas de sanctions pour les marcheurs républicains, Catherine Deneuve candidate aux législatives... Tout ce qu'il ne fallait pas rater dans l'actualité politique de mardi 16 mai avec Yaël Goosz.
Gouvernement : le président prend son temps
Il y a le temps des médias et le temps du politique. Jamais le message élyséen n'a été aussi clair depuis la victoire d'Emmanuel Macron. De sa marche lente sur le tapis rouge de l'Élysée, le jour de son investiture, à cette annonce du gouvernement reportée de 24 heures. Il prend son temps pour deux raisons.
La composition du gouvernement repoussée, le temps de "vérifier la situation fiscale" des futurs ministres https://t.co/WvIXfoyMaO
— franceinfo (@franceinfo) 16 mai 2017
C'est d'abord un vrai coup de com' de l'Élysée. Objectif : zéro couac pour démarrer le quinquennat. Emmanuel Macron ne veut pas d'erreur. Il faut que tout soit pro. Il en va de la relation de confiance entre le peuple et son élu et des législatives qui approchent. En 2007, Nicolas Sarkozy avait défrayé la chronique avec le Fouquet's et le yacht de Bolloré, des tâches indélébiles sur son mandat. En 2012, François Hollande avait commencé sous la pluie, raté la main tendue de François Bayrou et subi le tweet de Valérie Trierweiler.
En 2017, l'Élysée se lance dans une opération anti-couacs ! Ça passe par la transmission à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique de tous les dossiers fiscaux des potentiels futurs ministres. Comme sous François Hollande mais, là, c'est en amont que se fait le contrôle. Le but est d'éviter un nouveau Thevenoud, débranché au bout de neuf jours pour "phobie administrative". Ça prend d'autant plus de temps qu'Emmanuel Macron veut au moins un tiers de société civile dans son gouvernement. Donc des profils tout neufs qui ne sont jamais passés au laser de la Haute autorité.
Philippe, Ribadeau-Dumas, Kohler : les cabinets à la loupe
En attendant le nouveau XV de France (30, avec les secrétaires d'État), on peut s'intéresser aux cabinets, les équipes rapprochées d'Emmanuel Macron et d'Édouard Philippe et qui sont déjà nommées. Certains parcours suscitent pas mal d'interrogations : des profils de haut potentiel à la française c'est-à-dire dont les carrières se sont construites dans de fréquents allers-retours entre public et privé et états-majors de grands groupes industriels.
Le directeur de cabinet du Premier ministre, Benoît Ribadeau-Dumas, a été l'un des dirigeants de Zodiac Aerospace jusqu'à être pressenti pour remplacer le PDG. Il est aujourd'hui à un poste clé de la machine gouvernemental, dans un exécutif qui suivra nécessairement de près les prochaines étapes du rachat de Zodiac par Safran, groupe aéronautique dont l'État est actionnaire. Autre exemple de cette porosité des deux mondes avec STX, les chantiers navals de Saint-Nazaire qui doivent être repris par l'Italien Fincantieri. Rien n'est encore signé : une entrée au capital d'autres acteurs n'est pas exclue, notamment le croisiériste MSC. Il y a encore quelques mois, le directeur financier de ce groupe était Alexis Kohler, désormais secrétaire général de l'Élysée.
Enfin, le Premier ministre, lui-même, est passé par Areva entre 2007 et 2010. Depuis, Areva a été démantelé. Édouard Philippe arrive à Matignon avec une étiquette pro-nucléaire alors qu'il devra arbitrer des dossiers relevant de la transition énergétique et alors que son gouvernement devra finaliser la recapitalisation d'Areva.
Ce Premier ministre de droite est dans le collimateur de la gauche, notamment du député européen écologiste Yannick Jadot : "Il a été lobbyiste pour Areva. Emmanuel Macron, ministre, a défendu à coups de milliards d'argent public la faillite du nucléaire donc cela n'augure pas très bien de la transition énergétique qu'ils vont porter." Ce qu'ignore Yannick Jadot, c'est que son ami Nicolas Hulot est en pourparlers avec En Marche. Il pourrait prendre la tête d'un grand ministère de la Transition énergétique. Pas de confirmation pour l'instant -le téléphone de Nicolas Hulot est coupé depuis 24 heures- mais cela explique aussi le retard pris dans l'annonce du gouvernement.
Convaincre plutôt qu'exclure
Le gouvernement sera donc dirigé par Édouard Philippe, issu des rangs du parti Les Républicains. Donc, pour l'instant le plan imaginé il y a plus d'un an par Emmanuel Macron fonctionne à merveille : il fracture et dynamite les vieux partis. Une trentaine de poids lourds LR sont prêts à travailler avec les marcheurs et l'un des leurs nommés à Matignon. Pourtant, il n'y aura aucune sanction. Pourquoi ? Pour ne pas en faire des martyrs car il est difficile d'être un parti qui exclut au moment où les Français veulent cette recomposition politique. L'argument est rodé et répété : pas besoin de virer les membres de Les Républicains qui sont en marche puisqu'ils ont eux-mêmes démissionné...
Cet élément de langage est repris notamment par le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer : "Les membres du gouvernement, celui qui a été nommé et ceux qui seront nommés dans les jours qui viennent et qui font partie de notre famille politique, quittent de facto notre famille politique. Nous prenons acte qu'ils ont choisi de quitter notre famille politique."
Gouvernement bientôt dévoilé : Les Républicains au bord de l'implosion https://t.co/6mkNGEsdQX
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Si le parti LR est opposé à toute procédure d'exclusion, par question pour autant d'être conciliant avec Emmanuel Macron. Le ton est désormais alarmiste : "La manœuvre est en marche : après avoir détruit la famille du Parti socialiste, c'est détruire la famille de droite et du centre pour qu'il n'y ait plus entre Emmanuel Macron et le Front national qu'une espèce d'entre-soi", affirme Éric Ciotti. Face au danger, le parti prépare un contre-appel, après celui signé par une centaine d'élus pour saisir la main tendue d'Emmanuel Macron. Ce contre-appel sera soumis aux 577 candidats aux législatives. Jouer la conviction plus que l'exclusion.
Les Patriotes, futur nom du FN ?
Il n'y a pas qu'à droite que ça secoue en ce moment mais aussi au Front national, encore moribond après l'échec de Marine Le Pen et le retrait de sa nièce. On y réfléchit beaucoup à la suite. Florian Philippot, le numéro 2, ne perd pas de temps, il vient de créer Les Patriotes. Le but est de défendre le message que Marine Le Pen a porté au soir du second tour : une refondation profonde du parti.
Les patriotes n'est ni un courant ni un parti, c'est ce que s'empresse d'indiquer Florian Philippot. En revanche, c'est peut-être une piste pour le futur nom du Front national. D'ailleurs, ce nom rappelle celui de l'Alliance patriote et républicaine, le label du mariage entre le FN et Debout la France dans l'entre-deux-tours. Mariage avorté depuis. Parmi les trois vice-présidents des Patriotes figurent Maxime Thiébaut, un ancien de DLF. Florian Philippot, candidat aux législatives en Moselle, dément toute velléité d'indépendance. Mais on se souvient qu'au début des années 2000, une certaine Marine Le Pen avait pris la tête de l'association Génération Le Pen pour, elle aussi, mener une grande rénovation. On connaît la suite.
Et puis, au FN, les législatives se font aussi en famille. Damien Philippot, le frère de Florian, sera candidat à Laon dans l'Aisne. Philippe Olivier, le beau-frère de Marine Le Pen, débarque à Calais. Dans ces deux circonscriptions, Marine Le Pen a dépassé les 50 % le 7 mai, au second tour de la présidentielle.
Mélenchon auprès des GM&S
L'image du jour c'est celle de Jean-Luc Mélenchon dans la manif de soutien aux salariés de GM&S dans la Creuse. Le leader de la France insoumise et candidat aux législatives, a lancé un message au nouveau président de la République : "Faut arrêter de dire : 'J'y peux rien, la mondialisation blablablabla'. Si tu n'es pas foutu de régler un problème entre deux boîtes françaises pour qu'elles sachent comment se comporter à l'égard d'une troisième, ne viens pas me raconter que tu vas aller négocier quoi que ce soit avec Madame Merkel. Tu vas faire comme les autres, tu vas arriver et elle va te dire : 'C'est là qu'on signe'. Eh bien là, c'est pareil !"
Jean-Luc Mėlenchon au milieu des salariés GM&S en lutte pour leur survie à La Souterraine pic.twitter.com/0xLAOerkKo
— France Bleu Creuse (@FBCreuse) 16 mai 2017
La note du débrief : 20/20 pour Catherine Deneuve, candidate aux législatives
La note du débrief est un 20/20... en homonymie. Catherine Deneuve est candidate à Rochefort, comme dans le film de Jacques Demy. Catherine Deneuve défend les couleurs du Parti animaliste qui veut mettre la question animale au cœur du débat. Mais, c'est un pur homonyme. Rien à voir avec Catherine Deneuve. L'actrice, elle, est plutôt candidate à Cannes.
En revanche, un chanteur est vraiment candidat. Francis Lalanne se présente comme suppléant à Evry contre Manuel Valls. Pense à moi comme je t'aime est un refrain que Manuel Valls aurait pu chanter à Emmanuel Macron.
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