Jusqu’où peuvent aller les déboires de l’économie russe ?
La monnaie russe a perdu plus de 9% de sa valeur dans la seule journée d’hier. C’est une chute vertigineuse, du jamais vu depuis plus de 15 ans, quand la Russie avait été placée en défaut de paiement, en 1998. On sait depuis le philosophe grec Aristote qu’une monnaie a trois fonctions. C’est une unité de compte, qui permet d’exprimer le prix d’un bien ; c’est un moyen d’échange reconnu par tous, qui permet d’effectuer des transactions; et c’est enfin une réserve de valeur, une des formes de la richesse, qui permet de reporter dans le futur l’acquisition d’un bien par exemple. Pour résumer, une monnaie c’est ce qui dit votre richesse et votre puissance. Et en un an, la rouble a perdu plus de 50% de sa valeur face au dollar. C’est comme si la valeur ou la richesse de la Russie et ses 143 millions d’habitants avait diminué de moitié. C’est vertigineux.
Pour quelles raisons?
D'abord, l’effondrement des cours du pétrole. L’économie russe est totalement dépendante du pétrole et du gaz : ces deux énergies représentent plus de moitié des recettes du pays. Or, à chaque fois que le prix du baril baisse d’un dollar, la Russie perd un milliard et demi de revenus. Depuis six mois, le baril a perdu plus de 50%, notamment en raison du ralentissement de l’économie mondiale. C’est le cœur économique du pays qui est donc touché. C’est ce qu’a dit hier la Banque centrale russe, dans un rapport qui a mis le feu aux poudres : si le baril se maintient au prix de 60 dollars, alors l’économie russe se contractera de près de 5%. C’est une récession violente, un choc terrible.
Deuxième raison : la crise ukrainienne et les sanctions économiques prises par les Occidentaux contre la Russie et l’attitude provocante, intransigeante du président Poutine dans cette affaire. Nombre de secteurs sont touchés. Et les investisseurs sont partis en courant : la fuite des capitaux attendrait 128 milliards de dollars cette année. C’est là aussi énorme, à l’échelle du drame russe.
Et comment la population russe ressent ce choc économique ?
La flambée des prix est vertigineuse. L’inflation devrait dépasser les 10%. Et certains produits manquent déjà. Plus de la moitié des Russes disent désormais que la chute du rouble affecte vraiment leur vie quotidienne. Le choc est d’autant plus violent que depuis 10 ans, les Russes avaient profité d’une croissance très forte, de 5 à 7% par an.
Vladimir Poutine doit s’exprimer cette semaine à la télévision. A ceux qui se laissaient gagner par la panique, le président affirmait que la Russie pouvait vivre en autarcie – ce qui est bien sûr une fable – ou qu’il avait une alliance de rechange avec les Chinois, ce qui est une autre fable. La Russie vit désormais sur un volcan et c'est l’un des grands risques de l’année 2015.
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