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La Grèce peut-elle éviter une nouvelle crise avec ses créanciers ?

Le Parlement grec a voté dans la nuit de dimanche à lundi une réforme drastique des retraites et une hausse de l’impôt sur le revenu. Cela va-t-il permettre d’éviter une nouvelle crise entre la Grèce et ses créanciers ?
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
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Temps de lecture : 4min
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Est-ce que la Grèce peut éviter une nouvelle crise avec ses créanciers? C’est possible mais ce n’est même pas sûr. Cela fait déjà six ans que la Grèce se débat avec ses créanciers que sont l’Union européenne, la Banque centrale européenne et le fonds monétaire international, et c’est un invraisemblable scénario qui se joue encore aujourd’hui à Bruxelles. L’été dernier, à l’issue d’un insoutenable suspens, un accord avait finalement été conclu dans la douleur pour un nouveau plan d’aide de 86 milliards d’euros à la Grèce. Vous aviez peut-être cru l’affaire réglée une fois pour toute, mais c’était sans compter sur la complexité du dossier et surtout sur le jeu, parfois un peu trouble des créanciers qui ne s’entendent pas entre eux. Ce qui fait que le spectre du défaut de paiement plane de nouveau sur la Grèce, à un moment où l’Union européenne n’a franchement pas besoin d’une crise supplémentaire.

Le premier ministre Alexis Tsipras a-t-il mis en œuvre les réformes sur lesquels il s’était engagé ?

Globalement oui, le premier ministre a fait voté cette nuit les deux réformes les plus sensibles, pour qu’une nouvelle tranche de ce fameux plan d’aide de 86 milliards soit enfin débloquée. La première concerne le système des retraites, qui pèse beaucoup trop lourd à l’échelle de l’économie du pays, plus de 17% du PIB alors que la moyenne européenne est à 11%. Ce qui signifie qu’en gros, les retraites vont diminuer de 15% avec notamment des cotisations supplémentaires. On comprend que cela soit très douloureux à accepter pour des ménages grecs qui ont subi et la crise et l’austérité. Mais il fallait sans doute, au point où on en est, en passer par là. La seconde réforme sensible concerne l’impôt sur le revenu, avec une augmentation non seulement pour les plus riches, mais aussi pour les classes moyennes supérieures.

Mais si les Grecs ont tenu globalement leurs promesses, pourquoi ça coince encore ?

C’est là où l’affaire devient invraisemblable. Ce plan de sauvetage de la Grèce est bâti sur une perspective assez optimiste d’amélioration rapide de ce qu’on appelle l’excédent primaire, c’est à dire le niveau des comptes publics une fois déduit la charge de la dette. Mais le FMI conteste cette prévision, pourtant exigée par Bruxelles, elle la juge ni réaliste, ni même souhaitable à ce rythme, et demande du coup, un train de nouvelles mesures potentielles, c’est à dire des mesures drastiques qu’on n’appliqueraient pas aujourd’hui, mais seulement au cas où les résultats ne seraient pas aussi bons qu’espérés. Et là le pauvre Tsipras, dont la majorité ne tient plus qu’à un fil et dont la cote s’est effondrée dans l’opinion, crie à juste titre casse cou et dénonce cette folle surenchère. L’ultime paradoxe, c’est que le FMI reprend aussi à son compte l’une des exigences majeures de la Grèce : le FMI conditionne sa signature à l’ouverture de négociations sérieuses sur la dette grecque, des négociations indispensables mais auxquelles l’Allemagne s’est pourtant, jusqu’à présent, toujours refusée. Voilà, on en est là, et on frôle vraiment l’absurde.

Vincent Giret, du journal Le Monde.

sur Twitter @VincentGiret

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