Le décryptage éco. Philippe Martinez, l'homme qui défie Emmanuel Macron
Le conflit contre les retraites : Philippe Martinez, le leader de la CGT, s’impose comme le premier opposant d’Emmanuel Macron. Il veut prouver également qu'il est l'homme fort de la situation auprès des siens. Le décryptage éco de Fanny Guinochet ("L'Express").
Dans le Journal du Dimanche, Philippe Martinez, le leader de la CGT, accuse le gouvernement "d’organiser le bordel". En ce 26e jour de conflit, il s’impose aujourd’hui comme le premier opposant à Emmanuel Macron dans ce conflit contre les retraites. Une façon d'assoir aussi sa légitimité en interne. Il est l’homme qui défie le gouvernement, le chef de file du mouvement contre cette réforme.
Entre une CFDT qui n’est plus l’interlocuteur privilégié du gouvernement comme sous François Hollande, et Force ouvrière, très affaiblie après sa crise interne, il y a un espace pour Philippe Martinez que l’ancien employé de Renault à la moustache est heureux d'occuper. Souvenez-vous, il a été réelu à la tête de la CGT en mai dernier à Dijon pour un deuxième mandat mais de façon mitigée : il a obtenu 90% des suffrages, mais ce score est en réalité assez faible pour ce type d’élections. Surtout qu’il était le seul candidat. La fois précédente, il avait réuni 94 % des voix, il succédait à Thierry Lepaon, parti précipitamment suite à des affaires. Bref, on se souvient que ce congrès de mai dernier avait été difficile pour Philippe Martinez. Là, ce conflit des retraites, c’est l’occasion rêvée pour le syndicaliste de regagner de la légitimité auprès de ses adhérents, et de faire cohésion.
La crise des "gilets jaunes" est passée par là
Les "gilets jaunes" ont beaucoup percuté les syndicats et notamment la CGT. À Dijon, les plus radicaux, les plus révolutionnaires avaient d’ailleurs reproché à Philippe Martinez d’être trop mou. Ils militaient pour des modes d’actions plus musclés. Ces dernières années, la CGT a enchaîné les revers malgré les multiples mobilisations contre la loi Travail, la loi El Khomri ou même à l’issue de la grève contre la réforme de la SNCF, elle n’a rien obtenu. En 2018, surtout, elle a perdu sa place de premier syndicat de France, qu’elle a cédée à la CFDT. Autant dire un affront.
La CGT affiche encore plus de 600 000 adhérents mais elle en perd beaucoup. Est-ce que ce conflit va lui permettre d’en regagner ? C’est trop tôt pour le dire mais depuis près d’un mois, elle montre, en tout cas, qu’elle n’a rien perdu de sa capacité à se faire entendre.
Des actions impopulaires
La CGT est "un syndicat de blocages et d’intimidation" comme le dit Jean-Baptiste Djebbari, le ministre des Transports. Par exemple, Philippe Martinez assume les coupures d’électricité illégales provoquées par la CGT alors que ces actions avaient plutôt disparues ces dernières années de la panoplie syndicale. Mais, si Philippe Martinez se durcit, c’est aussi parce qu’en interne une concurrence se joue avec Laurent Brun, le chef de file de la CGT Cheminots. Laurent Brun qui pourrait connaître un destin à la Bernard Thibault et qui fait partie de ceux qui ne veulent rien lâcher. Reste que la CGT n’est pas toujours dans les grèves et les blocages, loin de là. Dans les entreprises, la CGT signe plus de 80 % des accords avec les directions.
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