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Le décryptage éco. Whirlpool, le contre-exemple de l’attractivité française

Whirlpool a l'intention de délocaliser la production de son usine d'Amiens vers la pologne. Une démarche qui relativise le discours sur l’attractivité de la France.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Manifestation de soutien aux salariés de Whirlpool devant l'hôtel de ville d'Amiens, le 16 mars 2017. (MAXPPP)

Les repreneurs potentiels du site d’électroménager Whirlpool d’Amiens ont jusqu’au  vendredi 2 juin pour remettre leur offre. Le propriétaire américain veut délocaliser son usine de la Somme en Pologne, le contre-exemple de ce que l’on dit sur l’attractivité de la France.

Difficile d’y voir clair dans toutes ces études régulièrement publiées sur l’attractivité de l’économie française dont l’objectif est de tordre le cou aux fossoyeurs d’une France en déclin industriel. Les 295 salariés et 60 postes sous-traitants de Whirlpool Amiens ne se font pas trop d’illusions après la réunion organisée jeudi 13 avril à Matignon, même si le Premier ministre, Bernard Cazeneuve, a promis aux syndicats la mise en place d’une commission pour assurer le suivi du dossier bien au-delà de l’élection présidentielle.

Un dossier pour le prochain président

De vraies questions se posent. Que va-t-il se passer, dans un mois, pour les employés de l’usine de sèche-linge ? Quid des ambitions des éventuels repreneurs ? Y aura-t-il un vrai projet industriel ou aura-t-on à faire, une nouvelle fois, à un chasseur de subventions ?

Vu le contexte, on imagine l’Etat très vigilant sur ce point, quel que soit le futur président de la République. Cela sera un vrai dossier emblématique pour les prochaines équipes de l’Elysée et Matignon sur le volet de l’emploi et de la capacité de la France à attirer, ou retenir, les groupes étrangers.

Que dit la dernière enquête sur l’attractivité de la France ? Elle date de fin mars et elle est signée de Business France, l’agence publique chargée de promouvoir les atouts français. Cette étude montre que le nombre de projets d’investissements étrangers en France a augmenté en 2016 pour atteindre son meilleur niveau depuis dix ans (1 117 décisions d’investissements contre 960 en 2015).

Whirlpool, emblématique du "désinvestissement"

Le cas de Whirlpool Amiens est typiquement l’exemple que Business France passe sous silence dans son rapport, qui ne prend pas en compte les départs d’entreprises étrangères et qui détruisent des emplois. Cette enquête, qui affirme que 2016 a été pour la France la meilleure année depuis dix ans en matière d’attractivité, est incomplète puisqu’elle ne s’intéresse pas à ce que l’on appelle les "désinvestissements", toutes ces entreprises étrangères qui quittent le sol français après avoir généralement bénéficié d’aides publiques.

Whirlpool Amiens fait partie de ces chasseurs de prime. D’autres exemples pourraient être cités, comme l’usine chimique Tioxide de Calais, propriété d’un autre groupe américain, implantée en France depuis quarante ans, qui s’apprête à fermer d’ici l’automne après avoir reçu douze millions d’euros d’aides de l’Etat et de la région des Hauts-de-France au nom du maintien de l’emploi.

Rendre l’argent

"I want my money back"  (Je veux qu’on me rende mon argent), disait l’ancienne Première ministre britannique, Margaret Thatcher, à la fin des années 70, à propos de l’intérêt de la Grande-Bretagne de participer à la construction européenne. Cela pourrait être le slogan du prochain président de la République à l’égard des entreprises internationales qui décident de quitter le territoire français après en avoir bien profité. Cela passerait tout simplement par une redéfinition de la conditionnalité des aides publiques aux entreprises étrangères. Le cas de Whirlpool, et tant d’autres, en font un sujet prioritaire pour le prochain quinquennat.

La conditionnalité des aides publiques dont, jusqu’à présent, les responsables politiques ont dit beaucoup de choses sans jamais prendre de décision sur le fond, ni légiféré une bonne fois pour toute.

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