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Les organisations syndicales sont-elles efficaces ?

Journée de grèves aujourd’hui dans de nombreuses villes, à l’appel de la CGT. Objectif : protester contre les lourdes sanctions que la justice a infligées à huit ex-salariés de Goodyear et dans plusieurs cas de violence lors de conflits sociaux. Cette journée de protestation intervient dans un climat de doute général au sein des organisations syndicales.
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

Oui, le doute s’est immiscé, et il s’étend parmi les militants syndicaux de tout bord. Même à la CGT, où on n’a pas l’habitude de s’épancher. A l’approche de son congrès, qui aura lieu à la mi avril, la première organisation syndicale française fait état de ses interrogations fondamentales et les met en débat dans son document d’orientation : "Une question essentielle et centrale nous est posée, est-il écrit : celle de l’efficacité du syndicalisme et celle de la CGT. Il nous faut rechercher pourquoi, malgré toute notre activité, nous ne parvenons pas à bouger le rapport de force ", ajoute la centrale, qui a multiplié ces derniers mois les journées nationales d’action qui ont été autant de coups d’épée dans l’eau.

Et ce doute s’est propagé plus que jamais au sein des salariés. Un sondage, publié il y a quelques jours, montre que seuls 50% des salariés font confiance aux syndicats pour défendre leurs intérêts, c’est 8 points de moins qu’en 2008. Ils sont même 54% à considérer que les syndicats comprennent mal leurs besoins, soit 14 points de plus qu’en 2008. 

Pour quelles raisons ?

Les facteurs sont multiples, à l’évidence. Dans ce même sondage, sont évoqués à la fois une approche jugée trop idéologiques, et il y a bien évidemment la crise qui mine le rapport de force, et il faut ajouter que ce discrédit touche également, les entreprises et leur direction. Mais il y a sans doute une explication plus fondamentale et assez paradoxale. François Hollande a voulu instaurer une « démocratie sociale » en renforçant les pouvoirs des acteurs sociaux. Mais ce faisant, il a mis sous pression les organisations représentatives, pour tenter de leur faire prendre des décisions difficiles voire intenables, et toutes ces organisations vont terminer ce quinquennat complètement essoufflées, affaiblies pour ne pas dire déboussolées. 

Cela veut dire qu’on en demande trop aux syndicats aujourd’hui ?

Pas forcément, mais cela veut dire qu’en tout cas, on ne passe pas en un jour d’une culture politique et sociale très verticale, très monarchique, très descendante, à une culture de la négociation permanente, on ne passe pas en un jour d’une culture sociale française, volontiers conflictuelle à une culture allemande, plus agile et où la négociation est au cœur de la transformation permanente des entreprises.

Il faudrait à la fois du temps et de stabilité. Or le temps est ce qui manque le plus, face à la crise et l’urgence de réformes qui ont trop tardé ; et quand à la stabilité, elle semble impossible : le gouvernement voudrait confier encore plus de responsabilités aux organisations représentatives, et parle même désormais d’inversion des normes sociales. Et l’engouement soudain, notamment à droite, pour les référendum d’entreprise, montre que tout le système de validation des accords pourrait encore changer. Bref, et pour le dire de manière un peu triviale, plus personne ne sait plus très bien aujourd’hui où il habite. La France ne parvient pas à trouver le bon mode de régulation sociale, un mode adapté au capitalisme mouvant du XXIème siècle.

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