Pourquoi les marchés paniquent
Pourquoi tant d'inquiétude ?
La planète boursière vit à nouveau sur un volcan. Tous les grands indices ont sévèrement reculé dans un affolement général. Mercredi fut une journée noire et jeudi une journée de fièvre. A Paris, depuis le mois de juin, le Cac 40 a perdu 17% de sa valeur, c’est colossal. Plus préoccupant encore, l’Espagne et la Grèce ont eu hier du mal à se financer sur les marchés, pour la première fois depuis longtemps. Les taux repartent dangereusement à la hausse, en Italie comme au Portugal, et chacun garde à l’esprit, comme pour se faire peur, la crise financière de 2008. Les analystes y ont tous vus des causes multiples : des chiffres américains décevants, sur fond de ralentissement de l’économie mondiale ; et en Europe, de mauvais indicateurs allemands, sur fond d’enlisement général de la zone euro. Mais les marchés semblent aussi redouter le changement annoncé de la politique monétaire américaine ? Oui. C’est une explication plus structurelle : la banque fédérale américaine l’a dit depuis des mois, et plus nettement encore ces derniers temps, elle va cesser de faire tourner à plein régime la planche à billets, il va y avoir désormais beaucoup moins de liquidités : le temps de l’argent facile est bientôt révolu. Les marchés en ont largement profité, le retour sur Terre s’annonce donc douloureux. Douloureux, oui, mais ça dure déjà depuis un certain temps. ça va durer encore ? Il est vrai qu’il y a ces derniers mois, des interrogations assez fondamentales sur le long terme, sur la mutation du capitalisme et de l’économie mondiale. Deux grandes figures animent actuellement un vif débat économique aux Etats-Unis. Et c’est franchement passionnant. Pour le dire très vite : d’un côté il y a Larry Summers, l’ancien secrétaire d’Etat au Trésor sous Clinton, il voit plutôt l’avenir en noir : les économies développées, dit-il, risquent de tomber dans une phase de "stagnation séculaire" , entendez une grande et longue panne de croissance. L’argent est abondant, les taux d’intérêts au plus bas, mais l’activité ne repart pas, comme paralysée, notamment par l’explosion des inégalités qui deviennent un obstacle à la croissance.
Un autre économiste américain, Jeremy Rifkin, pense aussi que la croissance s’amenuise, mais pour une toute autre raison et sur un mode plus optimiste : une mutation profonde est en marche, l’économie chance de cycle, sous l’effet d’internet, du big data, et des imprimantes 3D. Rifkin annonce une société nouvelle fondée sur l’extension de la gratuité et l’abondance. Au delà de leurs différences, nombreuses, Summers et Rifkin se rejoignent pour dessiner un monde pris dans la tourmente d’une révolution industrielle dans lequel la croissance n’est plus une évidence. C’est peut-être aussi cette angoisse là que les marchés expriment confusément en ces temps agités. Vincent Giret, du journal Le Monde
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