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Rachat de Bouygues par SFR : les arguments du patron et du ministre

Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

 Il faut d’abord rappeler que le ministère de l’Economie a changé d’avis sur ce dossier. Il y a quelques mois, Arnaud Montebourg affirmait que quatre opérateurs de téléphonie sur le marché, c’était déjà trop, un de trop parmi SFR, Orange, Bouygues et Free. Le ministre dénonçait alors une spirale destructrice provoquée par une guerre des prix déraisonnables, un excès de concurrence qui a détruit des emplois, c’est vrai, chez le plus fragilisé : Bouygues.

Arnaud Montebourg poussait donc en faveur de ce qu’on appelle une « consolidation du marché », c’est-à-dire au rachat de tel opérateur par un autre afin d’équilibrer ce marché déjà hyper-concurrentiel. Ce n’est pas du tout l’avis d’Emmanuel Macron, et Bercy a donc changé de doctrine en la matière. Le ministre actuel pense qu’un tel deal entre le patron de Numericable-SFR et Bouygues ferait beaucoup de dégâts et plusieurs perdants. 

Qui seraient les perdants dans cette affaire ?

Le premier perdant pourrait être l’Etat lui-même. Cette opération tombe au plus mauvais moment pour lui : l’Etat doit mettre aux enchères très prochainement la vente de fréquences de 4ème génération (4G), il espère en retirer au moins 2,5 milliards d’euros, une somme que l’Etat a d’ailleurs déjà promis, avant même de l’avoir, au ministère de la Défense pour financer son budget et ses équipements en matériel militaire. Tout avait été fait pour que ces enchères s’envolent, mais s’il n’y a plus que trois acteurs au lieu de quatre, si la concurrence est moins vive, les prix seront sans doute beaucoup plus raisonnables, au grand dam du vendeur, l’Etat, qui redoute une moins-value.

Le consommateur serait l’autre perdant ?

C’est possible, c’est en tout cas ce qu’affirme le ministre. Un acteur de moins, c’est forcément un peu moins de concurrence et donc le risque de voir les prix remonter. Ces prix s’étaient effondrés, notamment depuis l’arrivée du trublion Free de Xavier Niel. C’est un argument qu’utilise aussi la commissaire européenne qui devra donner son feu vert à l’opération. Dans les pays où la consolidation est excessive, dit-elle, le consommateur en a souvent fait les frais avec un renchérissement des factures.

Reste qu’au final, dans ce secteur comme dans d’autres, l’Etat n’a plus beaucoup d’armes. Il ne peut pas empêcher une opération de rachat entre deux acteurs privés dès lors qu’ils se seraient mis d’accord, qui plus est avec la complicité des deux autres (Orange et Free). En revanche, l’Etat peut sans doute y mettre des conditions sur les modalités, sur l’emploi, sur les investissements futurs, y compris pour la 4ème génération et une couverture plus complète de la France en matière de haut-débit, une sorte de cahier des charges bien ficelé. L’Etat serait alors vraiment dans son rôle. Au-delà du théâtre, c’est l’essentiel de la marge de manœuvre du ministre de l’Economie. La partie s’annonce très serrée.

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