Gilbert Thiel : "La justice est dans un état de pénurie permanent"
Gilbert Thiel, 38 ans de carrière dans la magistrature, dont quasiment 20 ans à l'antiterrorisme. Avant de prendre sa retraite, il était juge d’instruction. Il est actuellement adjoint au maire de Nancy.
"Je n’envisage pas de faire une carrière politique. Je ne suis étiqueté nulle part, j’essaie simplement d’apporter ma quote-part à la gestion des affaires municipales dans le domaine de la sécurité et des libertés publiques, " explique Gilbert Thiel.
Actuellement, nous sommes à nouveau dans une période où les juges sont accusés de partialité. Un avis que ne partage pas Gilbert Thiel. "Je fais simplement remarquer à ceux qui mettent en cause l’impartialité des juges qu’il existe des procédures pour contester la manière dont laquelle le juge mène son instruction. "
Faut-il interdire aux juges le droit de se syndiquer comme le suggère Henri Guaino ? "C’est de la responsabilité des hommes politiques, mais on n’empêchera jamais les juges, qui sont des citoyens, d’avoir des idées politiques. Le tout est qu’il ne manifeste pas leur préférence politique à travers l’exercice de leur art. Le fait qu’ils soient syndiqués ou non ne retirera pas de la tête des juges leurs opinions. "
L’état de la justice
Beaucoup se plaignent de la justice, mais Gilbert Thiel estime qu’elle fonctionne plutôt bien. "La justice est toujours sujette à discussions et à critiques et cela est normal parce que quelque part c’est un peu mission impossible. Le juge doit reconstituer des affaires du passé à travers un système de preuves à collecter. Le juge est le garant d’une forme de tranquillité publique pour que les gens ne règlent pas leurs comptes entre eux. "
"La justice est dans un état de pénurie permanent sous tous les régimes et sous toutes les couleurs de la République. Toutes les institutions à la suite de la crise sont descendues d’un étage et comme nous étions au niveau de la mer, on a de plus en plus de mal à respirer. Donc c’est une institution en grande difficulté, comme d’autres de la République. "
La mafia
Dans Mafias , publié chez Fayard, Gilbert Thiel nous convie, à quelques semaines de sa retraite, à un inquiétant Tour de France du crime organisé et de ses connexions internationales qui, de la Corse à Paris en passant par Marseille et la Côte-d’Azur, fait parfois étape en Suisse, aux Etats-Unis, en Amérique latine et en Afrique de l’Ouest.
"La mafia menace le monde tout autant que le terrorisme. Le crime s'est mondialisé et la suppression des frontières fait qu'il est encore plus difficile maintenant de le combattre. On recense 3.600 organisations criminelles en Europe. Tout cet argent sale qui se déverse dans l'économie finit par la corrompre et quand l'économie est corrompue, la société qui va avec le devient également. "
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