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Agnès b. est devenue styliste "plutôt par nécessité"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, la styliste Agnès b. Dans un entretien exceptionnel à franceinfo, elle confie des moments de sa vie personnelle et professionnelle sans langue de bois.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5 min
La styliste Agnès b., le 30 septembre 2019. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

Agnès Troublé, appelée Agnès b., n’est pas créatrice de mode, le mot "créateur" a été créé dans les années 80. Elle a une idée bien précise de ce qu’elle fait : "Pour moi, je suis styliste parce qu’on peut tout styliser en fait." Agnès b. est l’inventeuse d’un petit cardigan en 1979 qui ne prend pas une ride et a participé à l’essor de sa marque.

Elle est ravie de la longévité de ce vêtement, entre autres : "Ça me fait plaisir, moi, de voir des nouvelles filles porter le truc, qu’elles avaient de leur mère ou quelques fois de leur grand-mère." Elle sera notamment la première à habiller les bébés en noir avec ce petit cardigan pression, un petit pantalon à molleton et une collerette blanche : "C’était tellement beau les bébés comme ça. Personne n’habillait les bébés en noir, c’étaient des bébés rock aussi en même temps."

La griffe Agnès b.

Agnès b. raconte au micro d’Élodie Suigo qu’avant de connaître le succès, elle traverse à 21 ans, après s’être séparée de Christian Bourgois, une période difficile. Elle se retrouve seule avec ses jumeaux et sans le sou : "Ça, ça a été dur". Elle travaille comme styliste indépendante pour des marques comme Dorothée Bis, Pierre d’Alby ou encore Cacharel. À l’ouverture de sa première boutique (1975), elle est repérée par des journalistes du magazine Elle qui aiment cette personnalité hors norme qui s’habille aux Puces, et sont friandes de ses créations simples et basiques comme ceux qu’elle qualifie de "vêtements de travail" à l’image de la combinaison zippée toujours d’actualité 40 ans après, ou encore la salopette.

J’avais envie de faire des vêtements que l’on garde toujours.

Agnès b.

à franceinfo

La styliste explique que finalement, elle se retrouve dans un métier qu’elle n’a pas réellement choisi : "Le fait que je suis devenue styliste, c’est plutôt la nécessité." Elle raconte son rêve d'enfant : "Je voulais être conservateur de musée (…) Je voulais faire l’école du Louvres, je me suis mariée à 17 ans, je n’ai pas tout à fait ça mais finalement j’ai une galerie depuis 1983."

Une enfance abîmée

Si elle se marie si jeune c’est qu’à l’adolescence, elle est victime d’abus sexuels par un tiers. Issue d’une famille bourgeoise et croyante versaillaise peu à l’écoute, elle trouve ce moyen de fuir : "Je voulais rester pure. J’avais le sentiment de ne pas être protégée et je pense que c’est le cas de plein d’enfants. L’entourage ne comprend pas, ne comprend rien. Parce que c’est plus compliqué que des attouchement. C’est une dépendance, les êtres qui sont comme ça avec des adolescents, ce sont des prédateurs mais avec tellement de bonnes manières, de manières de s’intéresser. La personne s’intéresse à vous, cette personne-là a 45 ans alors que vous en avez 11, 13, 14." 

Elle évoque sa solitude face à cette situation : "Puis les parents qui ne veulent pas voir et tout ça. Mon père n’avait pas le temps de s’en rendre compte et ma mère, je ne sais pas. Je pense que quelque part, ça devait l’arranger, je ne sais pas. J’adorais ma mère mais j’avais l’impression qu’elle voulait se débarrasser de nous par moments."

C’est la beauté qui m’a consolée en fait. C’est la beauté qui m’a remise d’aplomb.

Agnès b.

à franceinfo

Sa carrière est jalonnée de merveilleuses rencontres : "David Lynch ou Gaspar Noé, des tas de cinéastes, des tas d’acteurs." Comme elle le dit si poétiquement : "Le vêtement ça touche au corps donc ce sont des histoires intimes comme Travolta avec sa veste de Pulp Fiction qu’on est en train de refaire." 

Instinctive, maîtresse femme, Agnès b. est aussi une maman. Ses enfants, un sujet qui l’émeut d'autant plus qu'elle vient de vivre le décès de l'un d'entre eux : "J'en ai un que je viens de perdre malheureusement. Un de mes jumeaux qui a été très très malade, longtemps, il nous a quittés. Il était tellement malade Nicolas. Il ne faut pas être égoïste, il est mieux là où il est, c’est sûr".

Pour surmonter ce deuil impossible, Agnès b. trouve la paix dans sa foi en Dieu. Croyante, bienveillante, cette amoureuse de la vie dont la réussite est brillante n’oublie pas pour autant ceux qui ont moins de chance. Elle s’engage depuis des années pour aider les enfants, les précaires, les personnes handicapées ou malades : "De faire des choses pour les autres, c’est la moindre des choses (…) Il faut s’entraider" conclut-elle.

>> Une interview à écouter en intégralité ici :

Le monde d'Elodie avec Agnès b.

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