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"On a envie d'être compris avant même d'être aimé" : les confidences de Philippe Katerine à l'affiche de "La plus belle pour aller danser"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, l’auteur, compositeur, interprète et comédien, Philippe Katerine. Ce mercredi 19 avril 2023, il est à l'affiche du film de Victoria Bedos, "La plus belle pour aller danser" aux côtés de Pierre Richard.
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
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Publié Mis à jour
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Philippe Katerine, au festival du film francophone d'Angoulême, en août 2021. (YOHAN BONNET / AFP)

Philippe Katerine est comédien, auteur compositeur et chanteur. Sa personnalité continue d'habiter des rôles forts comme dans ses chansons. Il a toujours su rythmer sa vie, ses interprétations, ses rôles. Son titre Louxor j'adore (2006), dans lequel il mettait, arrêtait et remettait le son semble être un beau résumé de comment il pense la vie, en plus de la croquer à pleines dents. Du côté du septième art, il y a eu comme point de départ et d'attache avec le public : Gainsbourg (vie héroïque) de Joann Sfar en 2010 ou encore Le Grand Bain de Gilles Lellouche en 2018, film pour lequel il a reçu le César du meilleur acteur dans un second rôle. Ce mercredi 19 avril 2023, il est à l'affiche du film de Victoria Bedos, La plus belle pour aller danser aux côtés de Pierre Richard.

franceinfo : C'est l'histoire d'une ado de 14 ans, Marie-Luce, dont la mère est décédée d'un cancer et son père, qu'il incarne, l'élève seul, comme il peut, dans une pension de famille de seniors dans laquelle il officie et qui l'éloigne finalement d'elle. Alors, ça l'éloigne, mais ça l'arrange aussi un peu de ne pas répondre à certaines questions qui l'embarrasse. C’est un peu ça le principe du film, c’est vraiment la relation d'un père et d’une fille.

Philippe Katerine : Entre autres. Il y a plein de strates, de par la diversité des âges qui sont représentés puisque vous avez toute une bande d'adolescents, dont ma fille, jouée par Brune Moulin, et des seniors effectivement. Donc c'est très, très large. Il y a plein de problèmes qui sont exposés mais en même temps sur un ton très marrant.

Je me demandais quel regard vous portiez sur le cinéma parce que finalement, ce n'est pas la voie que vous avez choisi au départ.

Quand j'avais 17, 18 ans, j'ai commencé à regarder des films que je choisissais, qu'on me conseillait et je me suis ouvert complètement au monde grâce au cinéma, même si je faisais de la musique.

Philippe Katerine

à franceinfo

Le cinéma m'a stimulé pour enregistrer des disques, à ma façon, c'est-à-dire qu'au fond, je regardais des films de la Nouvelle Vague ou des choses comme ça, qui étaient faits avec trois francs six sous et puis je me disais : tiens, moi aussi, je peux le faire.

L'écriture est rentrée très vite dans votre vie.

Je dessinais surtout. Je faisais des bandes dessinées.

Mais c'est, en quelque sorte, une façon d'écrire !

Oui et puis aussi de créer des liens. Je distribuais des dessins autour de moi et j'ai vu que ça faisait des scandales parfois parce que je dessinais des femmes nues que je voyais dans les saloons de Lucky Luke où il y avait toujours des petits cadres. Alors je les dessinais en grand ! J'ai vu la puissance de ce que c'est qu'un dessin, ce qui explique quand même les problèmes qu'encourent les dessinateurs hélas. Après, j'ai commencé à écrire des poèmes, puis j'ai fait mes premières chansons vers 13 ans.

Dès le départ, l'envie que vous aviez, semble-t-il, c'était d'abord de raconter des histoires.

Oui. De décrire, de formuler quelque part c'est ça, de cristalliser... 'Souffrance' serait un bien grand mot, mais une situation malaisante. D'ailleurs, j'utilise toujours comme ça le fait d'écrire des chansons, de dessiner, c'est toujours très en rapport avec un petit malaise que je peux avoir et ça fait beaucoup de bien.

Le film La plus belle pour aller danser est un film qui fait un gros focus sur l’identité. Marie-Luce a besoin d'exister, d'être aimée, d'être regardée. Cette partie du film où il y a ce besoin du regard de l'autre, l'importance du regard de l'autre, vous touche ?

On a envie d'être compris avant même d'être aimé. J'écoutais une interview d'Étienne Daho, l'autre jour, qui disait : "J'ai compris qu'il valait mieux être compris plutôt que d'être aimé". C'est vrai. Alors peut-être que ça fait moins de personnes, mais il y a une valeur quand même aux choses. Vous êtes vraiment regardés, écoutés. Alors il y a comme une famille qui se constitue, c'est sûr, mais vous vous sentez moins seul.

Au fond, quand vous faites des chansons, des films, c'est pour vous sentir moins seul. C'est quand même l'idée.

Philippe Katerine

à franceinfo

Est-ce que par moments vous avez souffert du fait de ne pas être compris ?

J'en ai joui aussi, justement dans l'adolescence, mais j'ai quand même compris, à un moment donné, que cela conduisait à une impasse et qu'il valait mieux faire demi-tour.

Votre carrière musicale a démarré en 1991 et j'ai l'impression que tout ce qui ressort de tout ça finalement, même avec cette carrière au cinéma, c'est que ce qui vous fait dire oui, c'est d'abord votre instinct.

C'est l'instinct c'est sûr ! Pas tellement la réflexion. C'est vraiment la bête qui se dirige là où elle peut boire ou manger. Mon père quand je l'ai connu, il était un peu fermé et il avait des principes, voilà. Il s'est mis aux arts martiaux, à 45 ans. Après, il a commencé à lire des bouquins ésotériques. Je l'ai vu s'ouvrir complètement comme une fleur. Alors, c'est aussi l'idée que, j'espère ne pas reproduire parce qu'on ne reproduit jamais, je pense marcher un petit peu dans ses traces quelque part.

On parle aussi des seniors qui font partie de ce film, qui apportent justement leurs expériences, leurs regards, le recul. Quel est votre regard sur le temps qui passe ?

Moi, je ne fais pas forcément la fête à chaque anniversaire. Mais je me réjouis quand même d'en être arrivé là à chaque fois. C'est quand même un miracle.

En attendant, le cinéma semble faire partie de vous aujourd'hui et pour un long moment.

J'aime ça, oui. C'est vrai. C'est une expérience que je ne pensais pas vivre, mais je tire le fil. Il y a toujours des choses nouvelles qui s'y accrochent.

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