Ophélie Winter : "La musique, c'est mon sang, c'est mon ADN"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, la chanteuse et comédienne Ophélie Winter. Elle publie son autobiographie sous le titre "Résilience".
Icône des années 90, Ophélie Winter est mannequin, actrice et chanteuse. Elle n'a que 21 ans quand le titre : Dieu m'a donné la foi fait un carton (1996). Très discrète depuis dix ans, elle publie, aujourd'hui, en collaboration avec Pauline Bonnefoy, un livre autobiographique : Résilience, aux éditions HarperCollins.
franceinfo : Vous parlez d'une mise au point "pour rétablir ma vérité sans le miroir déformant de la presse"...
Ophélie Winter : J'avais besoin de faire un peu le point parce qu'à un moment donné, on ne sait plus ce qui est vrai, ce qui est faux. Je le sais, mais j'avais besoin de faire un point avec le public, avec mes fans et même avec ceux qui m'ont un peu lâchée depuis un moment parce que je suis partie depuis presque dix ans. J'avais besoin aussi de pouvoir m'envoler, d'être là.
Avec 'Résilience', je me sens libérée, délivrée, je suis 'La Reine des neiges' et ça fait vraiment du bien. J'avais besoin de ça
Ophélie Winterà franceinfo
On découvre à travers ce livre que votre mère rêvait pour vous. Elle était dure avec vous, petite fille.
Elle était dure avec moi, avec mon frère aussi. Très exigeante, mais c'est grâce à elle que je suis qui je suis aujourd'hui, que j'ai un caractère aussi trempé et que je ne me laisse pas faire, je me sors toujours de mes péripéties.
On se rend compte que vous avez grandi beaucoup trop vite.
Pendant que mes copines faisaient de la corde à sauter et que mes copains jouaient au football au Bois de Boulogne, moi, j'allais faire des 'Pouët Pouët', des chansons, dans les émissions de l'époque. Tous mes mercredis après-midi étaient flingués pour travailler.
Même dans la cour de l'école, vos camarades de jeu n'avaient aucune pitié. Vous l'avez mal vécu.
Oui. Mes copains se moquaient de moi, j'en ai énormément souffert. Un 45 tours à six ans, un autre à 12 et j'ai dit un jour que je ferai un titre qui cartonnerait. J'en avais besoin et Dieu m'a donné la foi est arrivé à point nommé alors que je ne pensais pas du tout que ça allait marcher. Et ça a un peu lavé ma réputation à l'école.
Dieu m'a donné la foi a vraiment changé votre vie. Vous êtes fière de cette chanson.
En fait, je devais être virée après. J'avais fait deux singles qui n'avaient pas marché et donc pour le troisième, mon patron m'a clairement dit : "C'est ton dernier single. Ça marche ou ça ne marche pas. Mais si ça ne marche pas, tu pars". Donc, c'est sûr que j'ai voulu parler de ce qui m'habitait et je me suis dit qu'il fallait que j'honore Dieu, qu'au moins je parte par la grande porte, dans ma tête.
Il y a une personne que vous avez redécouverte après, c'est votre père. David-Alexander Winter, chanteur hollandais qui a cartonné avec Oh Lady Mary (1969) avec six millions de disques vendus. Votre maman, pendant très longtemps, vous a fait comprendre qu'il vous avait abandonnée. On sent toute la lourdeur de cette enfance. Elle vous a mise dehors à 16 ans et pourtant, vous avez réussi à lui pardonner plus tard.
Pour ça, je la remercie parce que je pense que ça m'a tellement mis la rage. Elle me jetait du nid pour que j'aille bosser. Je la remercie aujourd'hui parce que franchement, sans ça, je pense que je n'aurais peut-être pas éclos de la même manière.
Résilience est un livre dans lequel vous parlez aussi de vos fêlures comme ces attouchements sexuels de la part de votre oncle. Ce qui est incompréhensible, c'est que vous en parlez à votre mère et qu'elle ne vous protège pas.
Peut-être qu'elle ne m'a pas crue...
Elle a fini par voir un geste déplacé de la part de son frère, par ailleurs déficient mental, qu'elle a condamné.
Elle adorait son frère. Je ressens la même chose pour le mien, je peux comprendre qu'on ne puisse pas vouloir voir la vérité. Et puis, en plus, c'est vrai qu'à six ans, j'étais un peu mythomane donc, peut-être que la première fois, elle ne l'a pas cru mais que quand elle l'a chopé la main dans ma culotte, elle a compris.
Ça a été un tabou familial. Je n'en veux pas à ma mère pour ça. Je m'en suis voulu à moi, mais à six ans, on ne peut pas s'en vouloir d'être tétanisée par quelqu'un qui vous fait peur.
Ophélie Winterà franceinfo
Ça a donné naissance à une chanson : Elle pleure.
Personne ne l'a jamais comprise. On était à des kilomètres de comprendre de quoi je parlais.
C'est dur de baisser les armes dans un livre.
C'est super dur de me voir, par exemple, à la télé en train de raconter ma vie privée. Moi qui suis à la base, hyper-timide et hyper-pudique, je sais que ça paraît complètement irréel aujourd'hui, parce que la télévision m'a soignée de ma timidité, mais j'étais très introvertie et garçon manqué.
Avez-vous été heureuse dans cette enfance, dans votre adolescence ? On a l'impression que non, en fait.
Non, non. Je connais le bonheur aujourd'hui parce que je suis fière d'avoir balancé de manière élégante mon sac de parpaings. Je trouve que je l'ai fait très élégamment.
C'est marrant parce que ce parcours est vraiment hors norme, comme les rencontres que vous avez faites. Prince, une rencontre incroyable, une histoire d'amour qui va durer quatre ans. Vous allez le voir à Minneapolis régulièrement.
Tous les week-ends ! La semaine, j'étais à l'école, je dormais un peu sur la table et j'allais faire mannequin avec mon book. Le week-end, je partais à Minneapolis ou à Los Angeles. C'était complètement fou.
Que gardez-vous de lui ? Vous dites qu'il a vraiment été un mentor.
Prince... C'est incroyable... Dès que j'entends une chanson de lui ou que je vois une image de lui, je pleure, c'est systématique.
Ophélie Winterà franceinfo
J'ai vraiment du mal parce qu'il me manque. Je crois que c'est la personne qui me manque le plus aujourd'hui, sa mort a été la pire des choses de mon existence.
Que représente la musique pour vous ?
La musique, c'est mon sang, c'est mon ADN. Je ne peux pas passer une journée sans chanter. Je peux ne pas écouter de musique parce que j'en ai tellement plein la tête que ça, c'est possible. Mais sans chanter... Là, ça me manque vraiment et je pense qu'il va falloir que je fasse un album très vite.
Vous dites : "Toute ma vie, j'ai eu l'impression d'être une arnaque vivante", encore aujourd'hui ?
Non, aujourd'hui, je pense que j'ai gagné mes galons d'artiste.
Ce livre marque une nouvelle aventure ?
J'ai l'impression d'être Ophélie Winter 2.0, mais vraiment, et d'enfin éclore comme j'aurais dû éclore. Malheureusement, j'ai presque 50 piges, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. Grâce à Dieu, j'ai retrouvé mon frère. C'est très précieux.
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