Crise des céréales : entre espoir et crainte, l’Afrique s’adapte
L’Afrique l’insécurité alimentaire s’est accrue depuis le début de la guerre en Ukraine. Dépendante du blé russe et ukrainien, elle doit s’adapter pour vivre sans, et s’appuyer sur les ressources locales.
L’espoir de l’Afrique était à la hauteur de la terrible crise alimentaire que subit le continent. La semaine dernière, à l’annonce de l’accord entre la Russie, l’Ukraine, la Turquie et l’ONU pour débloquer le port d’Odessa, l’Union africaine a salué un accord de "bienvenu" – le mot était faible tant le soulagement était grand – Le bombardement du port d’Odessa par la Russie, quelques heures plus tard, a douché les espoirs de tout un continent.
Sergueï Lavrov le ministre russe des Affaires étrangères s'est occupé du délicat service après-vente. En tournée en Afrique cette semaine il "rassure" jour après jour ses partenaires. En Egypte, au Congo, en Ouganda, il répète depuis dimanche que les "couloirs sécurisés" pour exporter le blé par la Mer noire seront bien mis en place. Cela permettrait l’export de 20 à 25 millions de tonnes de blé. Des dizaines de millions d’Africains en manque "accrue" de nourriture.
D’ici la fin de l’été, "40 millions d’Africains seront en insécurité alimentaire accrue", estime sur RFI le chef du bureau sous-régional Afrique de l'Ouest et Sahel pour l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)
Le continent dépend du blé russe et ukrainien. Certains pays comme l’Egypte importent jusqu’à 85% des céréales. Conséquence, dans beaucoup d’États africains, le prix du riz et de la farine a considérablement augmenté, parfois jusqu’à 70%.
Pain au manioc
Pour faire face à cette pénurie et lutter contre l’insécurité alimentaire, les pays africains mettent en place des mesures. En Egypte, la Banque mondiale qui est venue en aide avec un chèque de 500 millions de dollars. En Côte d'Ivoire, le gouvernement a décidé de plafonner le prix d'un aliment central de grande consommation : la baguette de pain. Elle est désormais subventionnée et se paie au poids.
Du pain qui n’est pas toujours fait à base de blé. Aujourd’hui en Egypte, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, on peut acheter du pain au manioc ou du pain à la patate douce. Des aliments locaux, qu’on trouve facilement et qui permettent de limiter les coûts et de réduire les prix pour les consommateurs. Sur Facebook et relayer par les réseaux sociaux, l’écrivain et politologue camerounais Jean-Emmanuel Pondi, explique : "La production locale de ces denrées que favorise d'ailleurs nos écosystèmes agricoles, aboutirait à une énorme épargne en dépenses de nos devises. De surcroît, une pareille option produirait de nombreux emplois en Afrique."
Une autre solution serait de compter sur les Européens, et non sur les Russes. Interrogé par RFI, Philippe Chalmin, spécialiste des matières premières, explique que si l’Europe met de l’argent, on peut contourner le port d’Odessa. Il faudrait investir dans des trains pour transporter le blé ukrainien vers le Danube à la frontière avec la Roumanie et organiser ensuite les exports depuis les ports européens roumain et bulgare. Cela impliquerait de tourner un peu le dos à la Russie de Poutine – qui s’est déployée depuis plusieurs années sur le continent en termes économiques et sécuritaires – et en Afrique, certains pays ne sont pas prêts à le faire, même pour du blé.
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