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Cuba : la manifestation de la dissidence réduite au silence

À Cuba, les autorités ont réussi à empêcher une grande manifestation organisée par l'opposition, lundi 15 novembre. 

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des véhicules de police à La Havane (Cuba), le 15 novembre 2021. (YAMIL LAGE / AFP)

Ce lundi 15 novembre ils voulaient défiler de manière massive mais pacifique, habillés tout en blanc dans les rues de la Havane et de plusieurs grandes villes de province. Ceux qui n'osaient pas sortir devaient accrocher un drap blanc à leur fenêtre.

Le régime de Cuba ne les a pas laissés faire : la grande manifestation pour le changement (Baptisée "15N" pour "15 novembre") s'est transformée en petits groupes isolés dans les quartiers, en chansons et vidéos symboliques de soutien diffusées sur les réseaux sociaux.

Après les manifestations historiques du 11 juillet à Cuba, qui ont fait un mort et des dizaines de blessés, le gouvernement castriste est aux aguets. Plus de 650 personnes sur les 1.270 arrêtées cet été sont toujours sous les verrous selon l'ONG Cubalex, et les médias indépendants évoquent des réquisitions de peines allant jusqu'à 30 ans de prison. Pas question de laisser le moindre espace à la contestation.

Des actes de "répudiation"

Le régime s'y est pris comme d'habitude. En interdisant la manifestation et en menaçant ses organisateurs de poursuites pénales. En arrêtant ces derniers jours plusieurs dizaines de militants, de membres de l'opposition, de journalistes indépendants: Manuel Cuesta Morua, vice-président du Conseil pour la transition démocratique; Berta Soler, la dirigeante du mouvement des Dames en blanc, son époux, l'ex-prisonnier politique Angel Moya; Guillermo Fariñas, autre figure de l'opposition.

En imposant des assignations à résidence très strictes avec policiers en civil stationnés devant les logements, pour quelques heures, quelques jours ou plusieurs mois. Une activiste, Carolina Barrero, est restée 200 jours confinée chez elle avant d'être arrêtée.

Sans oublier les coupures d'internet ciblées, et ce qu'on appelle les actes de "répudiation", pratique ancienne à Cuba : quelques dizaines de contre-manifestants se massent juste sous les fenêtres des dissidents pour danser, crier des slogans pro-gouvernement... et mettre de la musique très très fort.

De nombreux fonctionnaires du gouvernement ont quant à eux partagé des photos sur les réseaux sociaux de rues de l'île : aucun manifestant à l'horizon. Le régime peut se rassurer.

"Je suis passé devant la Place de la Revolution", dit Gérardo Hernandez Nordelo, député et coordinateur des "Comités de la révolution". "J'ai pris ces images qui commencent à être vues dans le pays. "Ils arrivent, oui"... les touristes !"

"Une destination de tourisme paisible"

L'opposition cubaine réclame la fin du régime castriste, perpétué par le président Miguel Diaz Canel. La liberté d'expression. Mais aussi à manger. Le mécontentement social est de plus en plus fort : Cuba vit sa pire crise économique depuis près de trente ans, avec des pénuries d'aliments et de médicaments agravés par la pandémie.

Lundi, le gouvernement voulait justement célébrer un certain retour à la normale : la réouverture des écoles et la reprise du tourisme après des mois de mise sous cloche. Il a accusé l'opposition de saboter ses efforts. "Cuba continuera d'être une destination de tourisme paisible", a affirmé le Premier ministre Manuel Marrero lors d'une cérémonie marquant la réouverture au tourisme international.

Soutien des Etats-Unis au changement de régime

Cette manifestation tuée dans l'œuf a d'ailleurs donné lieu à nouvelle passe d'armes avec Washington, régulièrement accusé de financer et de former l'opposition. "Les Etats-Unis s'engagent à soutenir les actions des Cubains qui cherchent à promouvoir un changement démocratique", a dit le conseiller de la Maison Blanche pour la sécurité nationale Jake Sullivan. L'occasion pour Washington de réaffirmer son soutien plein et entier à un changement de régime dans l'île.

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