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En Floride, le puritanisme des conservateurs a eu raison d'une directrice d'école qui avait montré une photo de la statue de "David" à ses élèves

En Floride, une directrice de collège avait montré une photo du "David" de Michel-Ange nu sans prévenir les parents. L'un d'eux a parlé de "pornographie".

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
 Reproduction du David de Michel Ange sur la place de la Seigneurie à Florence (Italie). (FIORA GARENZI / HANS LUCAS via AFP)

Hope Carrasquilla est partie lundi 20 mars après un ultimatum du conseil scolaire de la Classical School de Tallahassee. Trois familles s'étaient plaints de sa leçon sur le David de Michel-Ange, chef d'œuvre de la Renaissance, sculpture de marbre de cinq mètres de haut qui représente David, nu, se préparant à combattre Goliath.

Pourquoi ? Parce que la directrice ne les avait pas prévenus, comme le prévoit la procédure. Deux parents ont jugé l'image "controversée", pas adaptée à l'âge des élèves de sixième. Un autre parle même d'œuvre pornographique.

"Il faut vraiment avoir l'esprit tordu"

Cette démission fait réagir jusqu'en Italie, où l'on regarde cette croisade morale avec effarement. La directrice du musée de Florence – qui abrite la sculpture, pièce maîtresse de l'Accademia qui attirer 1,7 million de visiteurs chaque année – dénonce "un puritanisme déplacé". "Ceux qui sont dérangés [par la nudité de David] ont un sérieux problème avec les racines de la culture occidentale" dit Cecilie Hollberg.
"Il y a une grande différence entre la nudité et la pornographie". "Et il faut vraiment avoir l'esprit tordu pour confondre" les deux. Pour l'historienne allemande, cette affaire au fond est "assez grave" car elle révèle que "nous perdons le lien avec notre culture et avec l'Histoire". Le maire de Florence, Dario Nardella, a lui invité la directrice, les parents et les élèves à venir visiter sa ville.

Aux Ètats-Unis, le président du conseil des parents d'élèves assure qu'il ne s'agit pas du tout d'interdire l'image, qu'il y avait d'autres problèmes avec la directrice, et que de toute façon ce qui compte avant tout, ce sont les parents qui doivent pouvoir décider ce que leurs enfants apprennent. "Les parents ont le droit de savoir à chaque fois que l'on enseigne à leur enfant un sujet et une image controversés", a déclaré Barney Bishop dans une interview au magazine Slate.

La Floride, laboratoire des idées conservatrices

En Floride, cette question des droits parentaux est essentielle, elle est même au cœur de la politique éducative du gouverneur, Ron DeSantis, qui l'a même inscrite dans un projet de loi, pour lutter contre ce qu'il appelle l'endoctrinement politique des écoles.

La Tallahassee Classical School, qui compte environ 400 élèves de la maternelle à la terminale, a été créé il y a trois ans. Il suit un programme conçu par le Hillsdale College, une école chrétienne conservatrice du Michigan fréquemment consultée par Ron DeSantis.

Étoile montante de la droite dure, décidé à contrer ce qu'il appelle l'idéologie progressiste des élites, il s'évertue à faire de son État un laboratoire des idées conservatrices, en espérant qu'elles lui ouvriront le chemin vers la Maison Blanche pour la présidentielle de 2024. Il compte bien battre Donald Trump pour l'investiture du Parti Républicain.

L'an dernier, il a déjà réussi à faire interdire à l'école primaire tous les sujets en lien avec l'orientation sexuelle (la loi "don't say gay"). La gauche dénonce une attaque orchestrée contre la liberté d'expression et d'enseignement. Ä Florence, Michel-Ange doit se retourner dans sa tombe.

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