Avec la Moskvitch 3, Moscou invente la voiture naturalisée russe
On connaissait l'histoire des "villages Potemkine", ces villages modèles qui auraient été montés de toutes pièces sous Catherine II par son ministre Potemkine, pour que la tsarine n'ait que la vision d'un pays prospère et ne voit pas la pauvreté. Voici venu le temps des "voitures Potemkine" : c'est ainsi qu'on pourrait qualifier la dernière née de l'industrie automobile russe, la Moskvitch 3, un crossover urbain qui vient de sortir des chaînes de l'ancienne usine Renault de Moscou.
Depuis le début de la guerre, la plupart des usines automobiles en Russie sont à l'arrêt. Les constructeurs étrangers se retirent les uns après les autres, et certains composants n'arrivent plus. Mais le gouvernement russe essaie tant bien que mal de soutenir le secteur. L'usine Avtovaz de Togliatti, qui appartenait à Renault, a été rachetée par l'Etat et produit tant bien que mal des Lada, sans ABS, sans airbag et sans pré-tensionneurs de ceintures. On a dû modifier la réglementation pour homologuer ce genre de véhicules.
L'usine que Renault possédait à Moscou a été rachetée par la ville, qui vient en quelques mois de relancer la production d'un véhicule, en faisant renaître une ancienne marque soviétique, Moskvitch ("Moscovite" en russe). Les premiers modèles viennent de sortir triomphalement des chaînes de montage.
Une voiture en réalité 100% chinoise
Cela ressemble à un exploit industriel, mais ce véhicule n'a en fait rien de russe. La Moskvitch 3 est en réalité une Sehol X4, une voiture 100% chinoise, produite par le constructeur chinois JAC. Elle est, en outre, intégralement fabriquée en Chine : elle sort des lignes de production, on démonte quelques pièces, on charge tout cela dans un container, que l'on expédie à Moscou, où des ouvriers russes remontent les pièces. Et cette voiture peut donc être estampillée "Сделано в России" ("Fabriquée en Russie"). Mais de tout cela, la ville de Moscou ne parle jamais même si c'est un secret de polichinelle.
Sous l'URSS, les Soviétiques ont régulièrement copié des modèles occidentaux, avec ou sans l'autorisation des concepteurs. Aujourd'hui, le pouvoir russe ne se donne même plus cette peine.
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