Suède : Jimmie Åkesson, l'homme de la "dédiabolisation" qui a mené l'extrême droite aux portes du pouvoir
Les Suédois qui ont voté dimanche 11 septembre devront attendre trois jours avant de savoir qui va remporter les élections législatives : le camp conservateur est donné vainqueur d'un cheveu devant l'alliance de la gauche et des écologistes. Un parti toutefois sort grand gagnant, c'est l'extrême droite.
Avec quasiment 21% des voix, les Démocrates de Suède deviennent le premier parti de droite et surtout la clé de l'accession au pouvoir pour les conservateurs, qui arrivent deuxième juste derrière – et piaffent d'impatience depuis 8 ans sur les bancs de l'opposition : "Nous sommes le deuxième plus grand parti de Suède (...) Notre ambition est de faire partie d'un nouveau gouvernement majoritaire".
Victorious @jimmieakesson leads the Letkajenkka. #SD22 #sd2022 #valet2022 #ruotsinvaalit pic.twitter.com/mNRD37u2mJ
— Matias Turkkila (@MatiasTurkkila) September 11, 2022
La Suède, terre de modération historique dominée par la social-démocratie, avait toujours établi un "cordon sanitaire" républicain autour de l'extrême-droite ; mais pour gagner ces élections, la droite a fait tomber un tabou en la choisissant comme partenaire. Et elle est en passe de gagner son pari.
Un parti paria devenu fréquentable
Les Démocrates de Suède se sont transformés jusqu'à se présenter comme un parti nationaliste bon teint. L'homme de la dédiabolisation, c'est Jimmie Åkesson. Quand il arrive à la tête de la formation en 2005, il a à peine 26 ans, les Démocrates suédois végètent à 1% dans les sondages. Il fait la chasse aux brebis galeuses, néo-nazis et autres nostalgiques de la Waffen SS qui font partie de leurs membres. Il change aussi de logo : à la poubelle la torche un brin agressive, place à une petite anémone inoffensive bleue au coeur jaune.
Suède. Le dirigeant des Démocrates suédois @jimmieakesson a voté lors des élections législatives qui se tiennent aujourd'hui. pic.twitter.com/swwDAgp9ZW
— Lionel Baland (@LionelBaland) September 11, 2022
Lui-même devient le symbole de cette normalisation : avec ses lunettes, sa barbe bien taillée et sa raie sur le côté, il incarne un Suédois ordinaire et courtois. Le genre "qui fait griller des saucisses, part en vacances en charter aux Canaries et vit dans un joli petit lotissement...", comme le dit à l'AFP Jonas Hinnfors, professeur de sciences politiques à l'université de Göteborg.
Au fil des scrutins, les Démocrates suédois ont empoché de plus en plus de voix. Ces dernières années, pour faciliter leur rapprochement avec la droite, les démocrates suédois ont même abandonné l’idée d’un "Swexit", une sortie de l’Union européenne. Ils sont aussi favorables à l'entrée de leur pays dans l'OTAN.
Les musulmans, une menace
Mais leur fond de commerce, c'est toujours la lutte contre l'immigration : Jimmie Åkesson, qui rêve de restaurer la Suède du passé, voit les musulmans comme "la plus grande menace depuis la seconde guerre mondiale". Discours qui trouve un écho favorable dans un pays qui a accueilli plus de 300.000 réfugiés depuis la crise migratoire 2015. Un record dans l'Union européenne par rapport au nombre d'habitants (10 millions).
L'autre thème de la campagne qui a joué en sa faveur, c'est la montée de l'insécurité : depuis le début de l'année, on recense une quarantaine d'homicides par arme à feu et 250 fusillades liées aux violences entre gangs. Tous les partis se sont saisis du sujet. La Suède a d'ailleurs connu ces dernières années une véritable inflation de propositions de loi qui criminalisent les activités. Mais l'extrême droite en a particulièrement fait son miel.
Si la victoire de la coalition de droite est confirmée mercredi, les Démocrates suédois pourront prétendre à occuper quelques portefeuilles dans le nouveau gouvernement suédois, celui-là même qui prendra la présidence tournante de l’Union européenne le 1er janvier 2023.
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