En Turquie, le poids grandissant de l'islam à l'école
La Turquie est un pays laïc. La précision n’est pas inutile, tant on pourrait l’oublier à regarder les transformations du paysage éducatif turc. De la maternelle, voire du jardin d’enfants, à l’université, aucun niveau n’est épargné par cette ferveur religieuse. Ce n’est pas nouveau, mais le pouvoir turc grignote sans répit les espaces de liberté.
Sous le règne du président Erdogan, le nombre de "imam hatip", les écoles religieuses, a été multiplié par 11. Le pays en compte désormais plus de 5 000. À l’origine, ces imam hatip étaient destinées à former les imams, aujourd’hui elles sont intégrées dans le système scolaire, où elles dispensent un enseignement religieux aux enfants des familles conservatrices. Mais l’enseignement laïc est à son tour touché. Des conseillers spirituels ont été nommés dans les établissements scolaires, chargés d’inculquer les bonnes valeurs aux élèves, notamment celle de la famille, composée d’un papa et d’une maman. Nombre de ces conseillers sont en fait des imams. La résistance des parents et des enseignants n’y a rien fait.
Depuis cette année, collégiens et lycéens doivent être formés aux "valeurs nationales, spirituelles, morales et humaines". Les cours doivent aussi être organisés en tenant compte des horaires de la prière du vendredi, au détriment des matières classiques. Et les seules options disponibles sont le plus souvent les cours de religion.
Un enseignement religieux dans toutes les disciplines
Les références à l’islam doivent irriguer tous les cours, de la géographie à la chimie, de l’histoire à la biologie. La dernière trouvaille du ministère : imposer le créationnisme dans les cours de biologie au lycée, au même niveau que la théorie de l’évolution, ravalée au rang de "théorie non prouvée".
Rien n’est laissé au hasard. Après le tremblement de terre, on a vu se multiplier les cours de "préparation spirituelle". L’une des théories des partisans du pouvoir est que ces catastrophes naturelles relèvent du destin ou de châtiments de Dieu. On a aussi vu dernièrement, parmi les activités pour les plus petits, des enseignants présenter une tombe et demander aux enfants de s’entraîner à prier sur la tombe de leur mère, selon les préceptes de l’islam, ou des couteaux distribués dans les classes pour apprendre sur des figurines à égorger les moutons dans les règles. Le ministre a toutefois pour l’heure échoué à mettre en œuvre son grand dada : la séparation filles-garçons dans les classes.
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