Habitant ou touriste ? En Espagne, la règle n'est pas la même
En Espagne, la grogne monte contre les touristes étrangers, notamment français et allemands, qui ne sont pas soumis aux mêmes restrictions en matière de lutte contre le coronavirus.
Pour aller en Espagne depuis un autre pays européen, c’est assez simple : il suffit de produire un test PCR négatif de moins de 72 heures. Ca vous permet de profiter sans quarantaine du soleil et des plages de Majorque, ça c’est plutôt ce qu'aiment les Allemands, ou de faire la fête dans les bars de Madrid, ça c’est plutôt pour les Français. Tout est ouvert jusqu’à 23 heures, le couvre-feu lui aussi est à l’heure espagnole. Le problème, c’est que le pays est loin d’être débarrassé du coronavirus et que les Espagnols n’ont pas le droit de se déplacer d’une région à l’autre, sauf motif impérieux.
L'Espagne, le bistrot de l'Europe ?
Un "deux poids deux mesures" qui a vraiment du mal à passer. D’autant que les télés ne se privent pas depuis quelques semaines de diffuser des reportages sur ces groupes de jeunes touristes européens imbibés à la cerveza (la bière). L’opposition crie au scandale, à la discrimination. Elle accuse Isabel Díaz Ayuso, la présidente de la communauté de Madrid, de "dérouler le tapis rouge à des hordes de Français qui viennent s'enivrer". Pour Íñigo Errejón, député Mas Pais (opposition) de la communauté de Madrid, "c’est une situation absolument incompréhensible ! Personne ne comprend qu’un Espagnol qui a son grand-père à Santander ne puisse pas aller le voir, alors qu’un Allemand de Dusseldorf, lui, peut se rendre à Majorque. Si un test PCR négatif donne le droit de voyager aux étrangers, il doit aussi le donner aux Espagnols. Ou alors à personne ! Ca na pas de sens de nous demander de faire des efforts et en même temps de transformer le pays en bistrot de l’europe ou en colonie touristique."
Si lo que vale para los españoles no vale para los turistas no somos un país, somos un resort de vacaciones. pic.twitter.com/cvQAQYb0a8
— Íñigo Errejón (@ierrejon) March 23, 2021
Traduction du tweet : "Si ce qui vaut pour les Espagnols ne vaut pas pour les touristes, alors nous ne sommes plus un pays mais un resort touristique"
Une situation d’autant plus difficile à vivre que ce vendredi débute la Semaine sainte et que les Espagnols en profitent d’habitude pour se déplacer à travers le pays et se retrouver en famille.
Même Bruxelles s'en mêle
La situation devient tellement gênante que même la Commission européenne s’en mêle ! En début de semaine à Bruxelles, son porte-parole en matière de justice, Christian Wigand, a réclamé à Madrid plus de "cohérence" dans ses mesures de restriction, dans la mesure où il n'y a pas moins de risques de contaminations dans les déplacements internationaux que dans les déplacements nationaux. Le gouvernement espagnol est clairement gêné aux entournures. La ministre du tourisme reconnu une situation "incongrue"... mais pour l’instant ça n’a pas été plus loin.
117 000 Français en Espagne en janvier
Mais attention, cette polémique a eu un effet "miroir déformant" : selon l'Institut National des Statistiques, 117 000 Français se sont rendus en Espagne en janvier 2021. Un an plus tôt à la même période, avant le coronavirus, ils étaient 200 000 : quasiment deux fois plus ! Mais parce que ce sont eux qui incarnent cette inégalité de traitement, ils ont aujourd'hui l’impression de jouer les boucs émissaires.
No hacen falta ni alcohol ni alfombra roja... Como a todos los europeos, a las "hordas" de franceses siempre nos gustarán Madrid y España
— La France en Espagne (@france_espagne) March 24, 2021
Desde la Embajada, seguiremos trabajando con el gobierno y todas las comunidades autónomas para luchar contra la pandemia. https://t.co/qx9Ujj5I43
L'ambassade de France à Madrid s'est tout de même sentie obligée de répliquer : "pas besoin d'alcool ni de tapis rouge... Comme tous les Européens, les "hordes" de Français aimeront toujours Madrid et l'Espagne". Lundi prochain, 29 mars, l’Espagne doit lever les restrictions imposées jusqu’ici aux arrivées en provenance du Royaume-Uni : une décision qui ne va sûrement pas contribuer à apaiser le débat. Et risque surtout de diriger la colère des Espagnols... contre les Britanniques.
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