A Athènes : "Plus payé depuis trois mois"
La récession, à Athènes, ce
n’est pas un terme économique abstrait, c’est très concret. Dans les rues, on
voit de nombreux rideaux baissés : des magasins et des entreprises qui
ferment peu à peu. C’est le cas notamment dans le quartier populaire de
Petralona, où vit Elise, une Française, avec son mari grec Vassilis et leur
petit garçon de 2 ans Orphée. Elise travaille dans l’organisation de
séminaires. Mais son patron n’a pas pu la payer le mois dernier. Pour son mari,
employé dans un grand cinéma d’Athènes, la situation est encore plus
délicate :
« Il n’est pas payé depuis trois mois. Ce sujet
alimente les discussions entre amis, car c’est courant. Il n’y a plus
d’activité »
Et si certaines entreprises n’arrivent plus à rémunérer
leur personnel, c’est parce que les clients consomment beaucoup moins, avec la
baisse des salaires et la hausse du chômage. Elise vit donc sur ses économies,
comme Vassilis, qui peut aussi compter sur la générosité de ses parents. Ils
donnent régulièrement des produits frais pour préparer les repas : "Cette
solidarité familiale est essentielle, elle permet aux gens de rester debout.
Mais cela ne pourra pas toujours durer. Car nos parents aussi sont en
difficulté, leurs pensions de retraite ont baissé. C’est un cercle
vicieux."
En Grèce, plus de 20 % de la
population active grecque est au chômage, le taux est deux fois plus élevé
qu’en France. Mais les jeunes sont encore plus durement frappés. La moitié des
moins de trente ans est sans travail. Une situation que déplore Georgette Lalis,
elle est membre de la "Task force", le groupe d’expert économiques
européens basé à Athènes :
"Beaucoup de jeunes vont devoir
quitter le pays, c’est une génération sacrifiée"
Les efforts et les sacrifices
demandés aux Grecs sont énormes. Mais ils sont inégalement répartis.*** Car
on exige énormément des salariés, qui voient leur rémunération baisser, ou qui
perdent leur emploi. En revanche, d’autres catégories semblent plus épargnées,
regrette Panos Carvounis, le représentant de la Commission européenne à
Athènes. « Beaucoup de membres des professions libérales ne paient pas
autant d’impôts qu’ils le devraient, alors qu’ils gagnent bien leur vie. Les
médecins sont tenus d’émettre des factures, mais ils ne le font pas toujours et
ils déclarent souvent bien moins que leurs revenus réels. »*
L’économie parallèle, la
fraude fiscale, revoilà l’éternel problème que l’on a beaucoup de mal à
résoudre en Grèce. L’ancien premier ministre socialiste Georges Papandreou en a
parlé sans détour hier, lors d’une conférence de presse : "Si un
agent des impôts est corrompu, cela ne sert à rien d’augmenter les taxes, cela
ne fera pas plus d’argent dans les caisses de l’Etat. On a aussi l’exemple de
pensions de retraite qui étaient versées à des gens qui étaient morts. Les
familles empochaient l’argent. On a fini par arrêter de verser 40.000 de ces
pensions. Mais tout cela prend du temps."
"On ne peut pas réformer tout un système
et changer les mentalités en seulement deux ans."
Au-delà de la lutte contre la
fraude, l’enjeu pour la Grèce est le retour de la croissance (après une
récession de 7,5 % à la fin de l’année 2011). La Commission européenne se veut
optimiste, affirmant qu’elle dispose de 12 milliards d’euros de crédits pour
financer de grands projets (180 en tout), comme des constructions d’autoroutes.
Cela permettrait de récréer de l’emploi. Mais la population a le sentiment que
tout ceci est encore très lointain.
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