Jeux paralympiques : l'athlétisme comme une thérapie
Jean-Baptiste vit à l'INSEP, le centre pour sportifs
de haut niveau installé dans l'est de Paris.C'est là qu'il vit, étudie, et
s'entraîne. Ce garçon fan de hip-hop, que l'on croise souvent un casque audio sur
la tête, s'est spécialisé dans le sprint et le saut en longueur. Jean-Baptiste
est amputé de la jambe droite. Une lame rouge lui sert de prothèse pour
l'entraînement.
Un garçon tout en muscle et tout sourire. Il est volontaire et
concentré sur son grand objectif : ces jeux paralympiques de Londres 2012.
"Le jour de ma qualification, c'était une joie énorme, une grande fierté
parce que ca n'a pas été simple. Pouvoir être de la partie à Londres, c'est déjà une victoire pour moi, déjà un rêve qui se réalise ! On va tous être là, tous les athlètes de la compétition. Ca va être énorme ! "
Il a 3 ans au Burundi lors du conflit entre Tutsis et Hutus
Son mental impressionnant, Jean-Baptiste Alaize le tire de
son histoire personnelle bouleversante. Il a vécu l'horreur de la guerre et du
génocide. Né au Burundi, il avait 3 ans au moment du conflit entre Tutsis et
Hutus. Pas un jour sans qu'il ne se souvienne des violences et de la mort
omniprésente. "J'ai pris des coups de machette sur le dos, le bras, derrière
la tête et surtout un gros coup sur ma jambe droite. C'est pour ca que j'ai dû
être amputé" , raconte-t-il.
"J'ai vu une partie de ma famille mourir sous mes yeux : ma
mère, mon frère, ma soeur. Ca m'a marqué énormément. Ma mère, elle me voit de
là-haut. Je suis sûre qu'elle est fière. Maintenant, il ne peut plus rien
m'arriver de pire. Tout est beau désormais. Et ça ne fait que commencer. Je ne
veux pas m'arrêter là " explique-t-il, le regard plein d'espoir.
Adopté par une famille de Montélimar
A 7 ans, après cinq années dans un orphelinat du Burundi,
Jean-Baptiste a été adopté par une famille française à Montélimar. Une famille
qui l'a accueilli et chouchouté des années durant.
Anecdote en forme de clin d'oeil au sportif qu'il est devenu
: Jean-Baptiste est arrivé en France le 12 juillet 98, jour de la victoire de la
France en Coupe du monde de football. Les rues étaient envahies. Le petit garçon
effrayé a cru un instant atterrir dans un autre pays en guerre, jusqu'à ce qu'il
comprenne que tout cela n'est qu'une démonstration de joie.
"11 km/h pendant 25 minutes sans problème en classe de 6ème"
C'est alors que le
garçon - qui n'avait jamais cessé de jouer au ballon et qui aimait tous les
sports - quitte ses béquilles et se fait poser une prothèse. Une jambe
artificielle qu'il a toujours tenu à cacher. "Je suis resté des mois sans me
rendre compte qu'il avait une prothèse. Je voyais qu'il boîtait un peu mais
jamais je n'aurais imaginé qu'il lui manquait un membre ", raconte Joël
Belline, son ancien professeur de sport de collège à Saint-Gervais près de
Montélimar.
"Jusqu'à ce qu'un jour en cours de gymnastique, alors qu'il
faisait le poirier, je lui ai demandé de tendre la pointe des pieds. Il m'a
répondu qu'il ne pouvait pas. Discrètement il m'a montré sa jambe de bois. Comme
il était toujours en survêtement, aucun de ses camarades ou professeurs ne le
savait. J'étais très étonné car c'est un garçon qui courrait très très bien. 11
km/h pendant 25 minutes sans problème en classe de 6ème ".
Une lame pour la course coûte 20.000 euros
L'élève et l'enseignant ont gardé contact et le prof de
sport n'est pas peu fier de voir son poulain arrivé si haut. Aujourd'hui, fini
la jambe de bois, Jean-Baptiste est équipé avec les meilleurs prothèses
sportives. Il est devenu un athète de haut niveau. Il possède plusieurs lames ou
spatules pour les différentes épreuves. Celle pour la course coûte 20.000 euros.
Ce jeune champion a des partenaires, des sponsors et un matériel professionnel
auquel il se familiarise. "Nous on arrive à sentir le bout de nos orteils. Lui, après le moignon, c'est du matériel donc il ne le sent pas. Donc pour qu'il
s'équilibre avec sa prothèse, ça prend du temps, il faut lui donner des
consignes particulières. Il commence à s'approprier sa lame ces derniers temps.
Il court de mieux en mieux " confie son préparateur physique à l'INSEP, Salah Ghaizi.
"Ma thérapie, je la fais tous les jours sur la piste d'athlétisme"
"Jean-Baptiste a vécu des choses si difficiles dans sa courte vie que ca fait
de lui quelqu'un de sensible mais surtout quelqu'un de fort et de mâture pour
son âge. C'est un atoût sur la piste ", ajoute ce coach.
Malgré sa petite enfance assez tragique, Jean-Baptiste ne
ressent pas aujourd'hui le besoin de voir un psychologue ou un psychiatre. Il se
dit heureux. "Ma thérapie, je la fais tous les jours sur la piste
d'athlétisme. Le sport c'est mon remède à moi " dit-il en souriant et en
remettant sur ses oreilles son casque audio.
Après Londres, le jeune homme a un autre grand projet : en
février il retournera pour la première fois au Burundi. Il veut retrouver ceux
de sa famille qui ne sont pas morts dans le génocide.
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