Plongée au cœur du parti eurosceptique britannique UKIP
Le moteur du parti UKIP, c'est l'euroscepticisme. Le parti fait aussi campagne contre l'immigration et contre l'establishment. Il ressemble ainsi à beaucoup de mouvements populistes ailleurs en Europe.
"Le UKIP s'appuie sur une chose , d'après Benedict Brogan du Daily Telegraph : la rage contre la modernité, un certain sentiment que la Grande-Bretagne d'aujourd'hui n'est pas comme elle était avant. Il répond aux peurs d'une grande partie de l'électorat. Il inquiète les conservateurs mais aussi les travaillistes, et tous les partis traditionnels."
"Marre de ces absurdités"
Le leader du UKIP s'appelle Nigel Farage, que France Info a pu rencontrer à Nottingham, l'une de ses étapes de campagne.
Farage, 50 ans, c'est le visage du UKIP, le seul membre du parti que les Britanniques connaissent. C'est un homme souriant, volubile, adepte des bonnes formules, très présent dans les médias. Quel est son objectif aux européennes ? "Gagner , dit-il comme si c'était une évidence. Etre en tête, et causer un tremblement de terre dans la politique britannique. Contrarier, assommer l'establishment, et montrer que les Britanniques en ont marre de ces absurdités. Nous ne détestons pas l'Europe, nous adorons l'Europe. Nous voulons simplement faire du commerce avec l'Europe, coopérer avec elle, être de bons voisins avec nos amis de France, mais on ne veut pas être gouvernés par des institutions bizarres à Bruxelles, avec un drapeau dont nous ne voulons pas, un hymne que nous ne défendons pas, et un président dont nous ne connaissons pas le nom."
Un leader apprécié
Nigel Farage présente le UKIP comme "le parti du peuple" , le "parti des working class" qui "ressentent bien plus que les riches le besoin de mieux contrôler nos frontières pour préserver l'emploi et éviter la saturation du système éducatif et des services d'urgence."
Nigel Farage a été éduqué dans le privé, il a longtemps été broker à la City. Mais malgré son parcours, il passe pour le candidat anti-système, proche des gens. L'homme avec qui on partage une pinte au pub. Les militants UKIP l'adorent. "C'est un leader fantastique , selon Chris Adams, candidat UKIP aux législatives l'an prochain à Aylesbury, dans le Buckinghamshire. Il dit les choses telles qu'elles sont. Il est plein de bon sens. C'est comme un souffle d'air frais. Il va au pub, il fume une cigarette, et il vous parle. Quel autre responsable politique vous donne ainsi de son temps ? Nigel est un grand leader. Il va aller loin, non ? Il ferait un excellent Premier ministre."
Déçus des partis traditionnels
Parmi les militants qui acclament Farage en meeting, on trouve d'abord beaucoup de déçus du parti conservateur, à la recherche d'une droite décomplexée. C'est le cas de David Young qui trouve au UKIP un discours plus ferme que les Tories sur l'Europe ou l'immigration : "J'étais membre du parti conservateur mais l'Europe nous coûte trop d'argent. Il faut changer cela."
Et le UKIP séduit aussi des électeurs travaillistes. Un phénomène que l'on retrouve ailleurs en Europe : les classes ouvrières se tournent vers les partis populistes. Le UKIP attire ainsi les victimes de la crise, des gens peu éduqués, peu qualifiés, qui se sentent abandonnés par les partis traditionnels.
Jo Napil, 29 ans, peintre en bâtiment à Nottingham, a longtemps voté Labour : "C'était un vote traditionnel. Toute ma famille votait Labour. Mais le parti travailliste n'est plus le parti des working class. Je me sens beaucoup plus proche du UKIP aujourd'hui. Sur l'immigration par exemple, on ne peut pas accueillir autant d'étrangers. Et seul le UKIP tient un discours de fermeté sur cette question."
Une légitimité nationale à construire
D'après les sondages, le UKIP pourrait convaincre 30 à 40 % des électeurs aux européennes. Il avait déjà obtenu plus de 16 % en 2004 et en 2009, mais s'était effondré ensuite aux élections générales. Cette fois, beaucoup se disent prêts à voter à nouveau pour le parti l'an prochain quand le pays élira un nouveau Parlement.
Le UKIP, qui n'a pour le moment aucun député national, pourrait alors totalement perturber le jeu politique et faire son entrée à la Chambre des Communes.
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