Pour séduire, les facs recrutent à l'étranger
Derrière
les murs de briques rouges de l'ancienne manufacture de tabac, c'est une petite
multinationale : des cours en français et en anglais, 700 étudiants venus du
monde entier et 145 professeurs de 18 pays différents. L'école recrute ses
enseignants dans le monde entier. Régulièrement, des émissaires sont envoyés en
mission pour prospecter, aux États-Unis, au Canada...
En
permanence, l'établissement est à l'affût de la perle rare, du chercheur
confirmé ou du talent de demain. Indispensable pour rester compétitif assure
Bruno Sire, le président de Toulouse 1-Capitole. "On cherche le
meilleur, on ne cherche pas la seconde division. On veut être dans les deux ou trois
universités d'Europe qui rivalisent avec le reste du monde. Pour ça, il faut
attirer les meilleurs chercheurs en leur faisant des propositions. Donc il faut
être présent sur le terrain, aux grands congrès... Il y a quelques dizaines
d'individus susceptibles de nous intéresser et ce sont eux qu'on essaie de
repérer pour les attirer ici" .
Et
cette stratégie fonctionne, 49 des 145 enseignants-chercheurs de l'école
d'économie de Toulouse sont étrangers. Un sur trois. Ils viennent des
Etats-Unis, de Nouvelle-Zélande, du Japon, de la Russie ou encore d'Egypte.
Séduire
les professeurs
Impossible
de rivaliser financièrement car les universités américaines proposent des
salaires deux à trois fois supérieurs. Exemple: jusqu'à 10.000 euros mensuels
aux Etats-Unis pour un professeur de finances... 3.500 euros à Toulouse. Alors,
l'établissement tente de faire la différence à un autre niveau: elle propose à
ses nouvelles recrues un accompagnement, presque du sur-mesure explique Joël
Echeverria, le directeur délégué de l'école. "Quand on arrive de
l'étranger, c'est parfois compliqué de se dire j'ai un permis de conduire
américain, il n'est pas valable en France, j'ai une voiture aux Etats-Unis,
comment la rapatrier ? J'ai des enfants, comment je les scolarise alors qu'ils
ne parlent pas français ? On propose ce genre de services pour essayer
d'emporter la décision, et faire que le chercheur ait plus envie de venir à
Toulouse, plutôt qu'à Londres ou à Barcelone".
Chaque
année, l'établissement dispose d'une enveloppe de 600.000 euros. Pour cette
rentrée 2013, l'école
de Toulouse a encore recruté 14 enseignants-chercheurs, dont 13 venus de
l'étranger. "Plein de chercheurs renommés viennent ici à Toulouse, le
niveau académique ici est le même que celui d'une super fac aux Etats-Unis,"
assure Renato, un enseignant-chercheur brésilien de 32 ans arrivé à Toulouse il
y a 3 ans.
"Ce
n'est pas le salaire qui est intéressant mais la flexibilité",
explique Ingela, d'origine suédoise. "Je peux choisir de ne pas
enseigner et me consacrer à la recherche pendant un an si je le souhaite, c'est
un grand luxe qui n'existe pas aux Etats-Unis ou au Canada ".
Aujourd'hui, l'école d'économie de Toulouse figure dans le top 10 mondial, aux
côtés de Berkeley, Harvard, Princeton, New-York, Chicago ou Londres.
Nouvelle
tendance
Quand
elles ont besoin de recruter, c'est désormais dans un vivier mondial que
puisent les écoles et les universités françaises. La fac de Paris 7 Diderot est
parvenue à faire venir le prix Nobel de physique 2006, l'Américain
George Smoot.
Recruter
des professeurs étrangers permet d'attirer les étudiants du monde entier
indique Denis Monneuse, sociologue à l'Institut d'administration des
entreprises (IAE) de Paris. "Pour qu'une école soit bien vue, il faut
avoir un certain nombre d'étudiants et de professeurs étrangers. Cela permet
d'être bien placé dans le classement de Shangaï ou du New-York Times. C'est un
label de qualité très important pour que les étudiants étrangers viennent en
France. En terme de crédibilité, c'est un avantage extrêmement important" A
Toulouse, on rêve de recruter un jour un prix Nobel d'économie. Une denrée très
rare sur le marché des professeurs d'université.
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