Une "tragédie" arlésienne : divorce autour du festival de photo
Depuis 2001
c'était une belle histoire, une idylle, même. L'alliance fructueuse entre une
mécène et un festival qui renaissait de ses cendres. François Hébel, fraichement
nommé à la tête des rencontres internationales de la photographie, commence un
long travail pour sauver cet événement créé en 1970 par l'artiste arlésien
Lucien Clergue, mais au bord de la faillite en ce début de millénaire.
François
Hébel convainc Maja Hoffmann de soutenir les rencontres. La Suisse, héritière
des laboratoires Hoffmann-Laroche, très attachée à Arles et la Camargue où
son père a beaucoup œuvré pour que cette terre sauvage ne soit pas livrée aux
bétonneurs, devient mécène, à hauteur de 180.000 euros, sur un budget annuel de 6
millions en 2013.
En 2011 les rapports se tendent
En 2008,
cette passionnée d'art contemporain annonce qu'elle va offrir à la ville
d'Arles un bâtiment, une tour de 56
mètres signée de l'architecte américain Frank Gehry, celui-là même dont le
musée Guggenheim à Bilbao a bouleversé la destinée de la ville industrielle
basque.
Champagne !
On imagine alors Arles devenir un lieu incontournable sur les routes
artistiques européennes, pour une cité pauvre de 50.000 habitants, c'est
une vraie aubaine. Mais depuis trois ans, les rapports se sont tendus entre François
Hébel et Maja Hoffmann et le directeur des rencontres a fini en novembre dernier
par annoncer qu'il démissionnera après l'édition de l'été 2014. Car selon lui,
la fondation Luma de Maja Hoffmann veut clairement mettre la main sur son festival.
Il reproche
en particulier aux collectivités et à l'Etat d'avoir accepté le cadeau de Maja
Hoffmann sans la moindre condition. La région a notamment vendu les
terrains des ateliers SNCF, la friche où se déroulent les rencontres depuis
2001, sans exiger quoi que ce soit de la mécène, afin d'assurer durablement la
cohabitation entre la fondation Luma et le festival.
Evidemment, du côté de la fondation Luma, on jure que les rencontres ne sont pas menacées. Même si Maja Hoffmannn ne s'exprime jamais dans la presse, elle adresse au conseil
d'administration une lettre assurant qu'au moins jusqu'en 2015, les rencontres pourront
rester sur le site des ateliers Sncf, qu'elle fera tout pour les années
suivantes, pour autant, rien n'est acté officiellement. Mais Françoise Nyssen, directrice
des éditions Actes Sud, installées à Arles et qui déménager tout près
de la tour Gehry, assure que François Hébel a eu tort de se radicaliser ainsi.
Le syndrome Pinault flotte sur l'affaire
Quand à la ville d'Arles, elle assure qu'elle proposera toujours d'autres lieux pour le
festival pendant et après les travaux (qui débutent en avril) et qu'il n'y
avait pas lieu d'aller au clash. Mais le maire Hervé Schiavetti, peut-il se fâcher
avec une mécène si généreuse ?
Enfin tous
les acteurs de cette tragédie arlésienne sont au moins d'accord sur un point, le syndrome
Pinault flotte sur cette affaire. Rappelez vous, 2005, le milliardaire français
François Pinault, las des tergiversations des collectivités et de l'Etat,
renonce à installer sa collection d'art contemporain sur l'île Seguin à
Boulogne Billancourt et vogue vers Venise, une perte terrible pour la France. Pays
où les rapports entre les institutions culturelles et les mécènes sont rarement
simples.
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