Urgent : cherche profs en Seine-Saint-Denis
Deux facteurs expliquent cette crise : les suppressions de postes de l'ancien gouvernement, et la fuite des jeunes enseignants qui ne sont pas originaires du département et demandent très souvent à en partir.
En
Seine-Saint-Denis, un enseignant sur trois demande chaque année sa mutation.
L'an dernier, ils étaient près de 3.000 à vouloir partir. Elodie Boussarie est
venue dans ce département par conviction il y a cinq ans. Elle a été nommée dans
une nouvelle école de Saint-Denis. Elle a affronté des difficultés face à des
élèves violents, elle s'est accrochée, mais aujourd'hui elle rêve d'autre
chose, pour ses élèves et pour sa carrière. Un tiers des élèves sont en très
grande difficulté dans sa classe. "Quand on arrive ici, on découvre un
cadre qui ne nous est pas familier , témoigne Elodie, c'est très
violent, et si on n'y arrive pas, on peut très vite être en arrêt maladie, ou
péter les plombs ". Ce qui est le plus dur pour elle, c'est ce
"sentiment d'impuissance " ou d'échec vis-à-vis de certains élèves qui
auraient besoin d'un meilleur accompagnement. "C'est très culpabilisant
parce qu'il y a une partie des élèves pour qui on fait du mauvais boulot, c'est
casse-gueule ", regrette-t-elle.
Elodie devra sans
doute attendre cinq ans avant d'être mutée. Seule une demande de mutation sur
dix aboutit chaque année, mais il y a toujours beaucoup de changements dans les
écoles. "Il y a une anecdote forte qui dit que, très souvent, c'est
l'élève de CM2 le plus ancien dans l'école ", raconte Rodolphe Ciulla, du
syndicat Sud Education.
Plusieurs raisons
expliquent cette crise du recrutement. Il y a d'abord les suppressions de
postes. Depuis quatre ans, les écoles de Seine-Saint-Denis ont accueilli près
de 11.200 élèves de plus avec une dizaine de postes en moins. C'est une
explication pour Jean-Louis
Brison, le directeur académique des services de l'éducation nationale. Mais ce
n'est pas la seule. "L'exercice du métier au quotidien est plus difficile
qu'ailleurs , explique-t-il, et comme la concurrence pour accéder au
concours est moins forte, nous avons des candidats de chaque coin de
France ", ajoute-il. Parmi les 430 enseignants stagiaires qui sont arrivés
dans les écoles en septembre, seuls 16% sont originaires du département. Et
globalement, plus de 40% des enseignants de Seine-Saint-Denis n'y habitent pas.
Des enseignants issus de Seine-Saint-Denis ?
Pour Martine Caron,
du Snuipp, le principal syndicat du primaire, la seule vraie solution est de
permettre à des jeunes de Seine-Saint-Denis de devenir eux-même enseignants
dans leur propre département. Mais pour cela, "il faut les aider à financer
leurs études ", explique-t-elle.
Le Snuipp réclame ainsi des
pré-recrutements dans l'Education nationale. Le rectorat de Créteil a bien
recruté dix enseignants titulaires supplémentaires et 90 étudiants vacataires
en master d'enseignement depuis la rentrée. C'est un "appel d'air
indispensable ", pour Catherine Chabeaudie, du syndicat des inspecteurs de
l'éducation nationale de la FSU, mais elle a une autre idée. Pour elle, il
faudrait que ces étudiants contractuels soient recrutés et "s'engagent à
rester dans le département dix ou quinze ans ".
Mais pour le rectorat il semble difficile
de demander un tel engagement à des vacataires. De leur côté les syndicats
dénoncent une certaine précarisation du métier. Ils demandent un vrai plan
d'urgence de recrutement.
En tous
cas, François Hollande a bien dit mardi dans son discours sur l'école qu'il
souhaitait "affecter des enseignants expérimentés dans les territoires en
difficulté, sur la base du volontariat, et garantir une plus grande stabilité
des équipes ". L'intention est là, les enseignants attendent de voir...
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