Couvrir les élections américaines

Sébastien Paour, correspondant de Radio France/Franceinfo à Washington est au micro d’Emmanuelle Daviet, la médiatrice des antennes de Radio France. Il répond aux questions des auditeurs sur la couverture de la campagne présidentielle américaine.
Article rédigé par Emmanuelle Daviet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4 min
La Maison-Blanche, Pennsylvania Avenue NW  à Washington D.C. "Quelles sont les spécificités de couvrir une campagne présidentielle américaine, comparée à celle que l’on connaît en France ou en Europe", demande un auditeur de franceinfo. (Illustration) (J. ALTDORFER PHOTOGRAPHY / MOMENT RF / GETTY IMAGES)

"En tant que correspondant à Washington, quelles sont les spécificités de couvrir une campagne présidentielle américaine, comparée à celle que l’on connaît en France ou en Europe ?", demande un auditeur. Sébastien Paour, correspondant de Radio France/ Franceinfo à Washington, et Emmanuelle Daviet, médiatrice des antennes de Radio France. 

Emmanuelle Daviet : Que peut-on répondre à cet auditeur, précisément ? 

Sébastien Paour : Il n’y a pas beaucoup de différences finalement, on suit des candidats, on s’informe sur leur programme, qu’on essaie de détailler, on suit leurs soutiens aussi, et on se tient au courant de chacun de leurs mouvements. La différence majeure pour un média étranger dans un pays comme les Etats-Unis, c’est qu’on ne pèse pas lourd pour ces candidats, donc, obtenir une interview, par exemple, de Kamala Harris ou de Donald Trump, c’est impossible, disons les choses clairement.

C’est donc de ce point de vue là, que ça rend les choses un peu plus compliquées, y compris d’ailleurs pour les meetings, parce que depuis les élections de mi-mandat en 2022, par exemple chez Trump, il n’est plus possible d’être accrédité comme journaliste étranger, pour entrer et suivre un meeting du candidat républicain, en tant que journaliste étranger. Nous sommes obligés de nous enregistrer comme participants au public, et d’interroger les sympathisants de Donald Trump, discrètement, avec un petit enregistreur, caché, dans la foule des militants. Plus possible d’être avec la presse comme on le faisait jusqu’ici, et encore pour l’élection de 2020.

Chez Kamala Harris c’est un peu plus simple, on arrive à entrer en tant que journaliste dans les meetings, mais même chose, on n’est pas toujours mis au courant en tant que journaliste étranger, des moments et des endroits où elle se déplace, ce qui nous permet assez difficilement d’anticiper et de prévoir nos déplacements. Donc ça complique un peu quand on est un média étranger ici, une radio par rapport à la puissance des médias américains. Évidemment, ces deux candidats n’ont aucun intérêt à parler à Radio France.

Sébastien Paour, la place des médias, et notamment des réseaux sociaux, est cruciale dans cette campagne, comment cela influence-t-il votre manière de travailler en tant que journaliste sur le terrain, s’interrogent des auditeurs…

C’est une source permanente d’information, les médias américains, les réseaux sociaux, mais même les médias américains principaux, les "médias mainstream", comme les appelle Donald Trump, ceux qu’ils critiquent comme étant des médias "fake news" : les grands journaux, New York Times, Washington Post, Wall Street Journal, tout cela, ce sont des médias qui sont très puissants, qui ont énormément de reporters sur le terrain, énormément de personnes qui couvrent la Maison Blanche, qui suivent chacun des candidats.

Et donc cette lecture quotidienne des réseaux sociaux et de ces journaux, ça nous permet de trouver des sources d’information, des sources d’inspiration, des idées, d’angles pour des sujets, des endroits où, évidemment, moi, étant seul ici aux Etats-Unis, j’ai du mal à pouvoir tout voir et à être partout.

Donc, quand je lis dans un journal ou sur un site, ou sur le post de quelqu’un, sur les réseaux sociaux qu’il ou elle est allée à tel ou tel endroit faire un reportage qui me semble intéressant, qui me semble illustrer une problématique à un endroit et à un moment donné, parfois je me dis : tiens, pourquoi pas aller faire le même reportage ou me rendre en tout cas au même endroit ?

D'autres radios francophones publiques sont installées à Washington, et vous racontez tous ensemble, avec vos consœurs et vos confrères, la campagne pour l’élection présidentielle américaine à travers le podcast Washington d’ici. Quelle liberté éditoriale ou narrative vous apporte ce podcast par rapport aux reportages à la radio ?

Sébastien Paour : On essaie d’en faire quelque chose qui soit dans l’esprit d'une "bande", un petit peu. On se connaît bien tous les cinq. On se voit souvent soit en reportage, soit en dehors, quand on est sur le terrain, ou quand on est ici, à Washington, et on met en commun dans un mode plus conversationnel ; on se tutoie, on met en commun toutes nos expériences.

Quand l’un est allé à un meeting de Kamala Harris, et qu’un autre est allé à celui de Trump, qu’un troisième est allé à un autre rendez-vous, une réunion d’une association de soutien, ou a participé à du porte à porte, dans un Etat clé qui va faire basculer ou pas l’élection le mois prochain, et bien, on met tout ça en commun, et on essaie d’enrichir ce qu’on fait sur nos antennes respectives en reportage, par ce podcast, qui est un rendez-vous autour de la table.

D’ailleurs, on l’a déjà fait autour d’une table, chez Frédéric Arnould (de Radio Canada). Il avait fait une paella, et on a enregistré un épisode du podcast chez lui, dans un mode encore une fois conversationnel, avec le tutoiement, où on apprend, j’espère plus de choses encore, sur les coulisses de nos reportages respectifs.

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