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Comment savoir si une information est fausse ? Pourquoi les théories du complot séduisent-elles ? Le Vrai du Faux Junior

Dans le Vrai du Faux Junior, les élèves rencontrent cette semaine l'un des commissaires d'une exposition consacrée aux fake news.

Article rédigé par franceinfo - Emilie Gautreau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 7min
Des élèves de troisième du collège Pablo Picasso à Montesson, dans les Yvelines, en atelier classe médias pour "Le Vrai du Faux Junior" sur franceinfo. (Collège Pablo Picasso - Montesson)

Le Vrai du Faux Junior, rendez-vous de vérification et décryptage de l’information réalisé avec des adolescents et leurs enseignants est consacré cette semaine à une rencontre entre les élèves du collège Pablo Picasso à Montesson, dans les Yvelines et Laurent Bigot, l'un des commissaires de l'exposition "Fake news. Art, fiction, mensonge".

La visite par les élèves de l'exposition s'est poursuivie, à leur retour au collège, par un échange sur la façon dont naissent et se propagent les fausses informations. 

Un portrait façon vrai du faux

L'échange commence par un portrait de Laurent Bigot, réalisé par les élèves, façon vrai du faux. Les collégiens ont en effet cherché sur internet des informations sur leur invité, les ont recoupées et les lui ont ensuite soumises pour vérification.

"Est-ce que c’est vrai ou faux que vous êtes directeur d’une école de journalisme ?" demande une élève. "C’est vrai, répond Laurent Bigot. Je suis directeur de l’école publique de journalisme de Tours, qui est une des 14 écoles reconnues par la profession de journaliste en France". " Est-ce que c’est vrai que vous êtes membre de l’équipe de recherche de PRIM, à l’université de Tours ? " vérifie un autre élève.

La réponse de Laurent Bigot est là aussi positive. "Je suis membre de cette équipe de recherche. Je suis moi-même enseignant-chercheur à l’université de Tours. Moi je travaille en journalisme mais l’ensemble des enseignants-chercheurs sont rassemblés dans cette équipe qui travaille notamment sur un projet de recherche qui s’appelle VIJIE pour vérification de l’information dans le journalisme sur internet et dans l’espace public. » 

Comment savoir si une information est fausse ?

L'échange se poursuit par des questions des élèves sur l’exposition elle-même, entre autres autour de la mise en scène d’un "deepfake" : une vidéo générée par intelligence artificielle qui permet de changer le visage ou la voix d'une personne, pour lui faire dire quelque chose qu'elle n'a pas dit. Un duo d’artistes en a créé plusieurs pour l’exposition et les élèves s’interrogent sur leur objectif. Ont-ils eux même voulu tromper les gens sur les réseaux sociaux ? "La vidéo que l’on peut voir dans l’exposition, répond Laurent Bigot, constitue en elle-même une œuvre et pas simplement des vidéos qui auraient circulé sur les réseaux sociaux et qu'on aurait replacées au sein de cette exposition. Il ne faut pas se méprendre sur la nature de cette vidéo et leurs fonctions".

Les artistes, dans cette exposition, cherchent donc avant tout à faire réfléchir, à décrypter les mécanismes de création des fausses informations.

Mais comment savoir si une information est fausse ? s'interroge Angela. Laurent Bigot lui explique qu'il y a deux possibilités : vérifier par elle-même, en allant par exemple faire une recherche d'images inversée pour voir si une photo envoyée par un copain qui semble avoir été prise le jour même n'est pas en fait une photo qu'il aurait trouvée sur internet et qu'il aurait sortie de son contexte par exemple. " Dans le deuxième cas, complète l'enseignant-chercheur, si vous n'êtes pas en mesure de vérifier une information, là cela va être votre capacité à rechercher des personnes qui vérifient pour vous cette information. Ces personnes peuvent être très diverses mais en particulier cela va être des journalistes dans des rédactions sérieuses qui font bien leur travail ".

Les ressorts derrière les théories du complot

"Pourquoi les théories du complot nous intéressent et pourquoi on y croit ? " demande ensuite Thomas. "Les théories du complot en général nous intéressent, répond Laurent Bigot, parce qu'elles proposent une vision à la fois simple et facile à comprendre par rapport à des questions en général assez compliquées. Et donc les raccourcis que proposent ces théories du complot permettent à chacun de trouver une explication qui va lui convenir sans faire forcément beaucoup d'efforts de lecture ou de compréhension. À un problème complexe elles vont par exemple trouver un bouc émissaire qui va être une communauté, une personne, un groupe d'individus qu'on va rendre coupables des problèmes des autres ".

Est-il légitime de censurer des contenus ?

Les élèves s'interrogent enfin sur la façon de lutter contre les fausses informations. "On a vu une œuvre avec les oiseaux bleus de Twitter qui étaient en cage, ce qu’on a interprété comme la censure, mais est-ce que Twitter est légitime à censurer les propos qui sont sur son réseau social ? " interroge Corentin. 

"La question du rôle que peuvent jouer les réseaux sociaux sur la censure de certains propos est une question qui reste très compliquée" admet Laurent Bigot. "Il est très difficile de trouver une instance quelconque qui soit autorisée à censurer des propos ". Néanmoins, poursuit-ilon sait que des réseaux censurent déjà des contenus. Facebook par exemple emploie des sous-traitants pour nettoyer ce qui se diffuse sur son fil et qui pourrait être particulièrement violent. Par contre, Facebook, quand il se trouve face à des fausses informations qui ont été démontrées, même par des partenaires de Facebook ,comme étant des fausses informations - des médias par exemple qui vont montrer que c'est une fausse information - ne va pas supprimer cette fausse information. Il va la laisser et faire cohabiter juste à côté le démenti de cette fausse information, mais là il va s’interdire de censurer".  

Laurent Bigot est directeur de l'école publique de journalisme de Tours, maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication, à l'université de Tours et l'un des commissaires de l'exposition Fake Newsà voir à la Fondation EDF, à Paris, jusqu’au 30 janvier.

 

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