Constance Vilanova répond aux questions des élèves du vrai ou faux junior sur la téléréalité
Depuis le Loft Story, il y a un peu plus de 20 ans, la téléréalité "d'enfermement" et de "vie collective" a beaucoup évolué et s'est développée avec des émissions comme Les Anges, Les Ch'tis ou encore Les Marseillais.
Les élèves des collèges André Derain, dans les Yvelines et Emiles Combes, en Gironde, ont posé des questions sur cet univers à Constance Vilanova, journaliste et auteure de Vivre pour les caméras, une enquête sur les dessous de la téléréalité.
"Tout est fait pour qu'on devienne accro"
Anouk se demande "pourquoi les téléréalités sont aussi appréciées en France" et Clément "pourquoi la téléréalité est si populaire".
Constance leur explique que "la téléréalité est vraiment très appréciée en France parce qu'elle permet de regarder ce qu'on ne peut pas faire dans la vraie vie." Elle précise qu'il y a "tellement d'insultes, de clashs, de vulgarité que parfois ça soulage le téléspectateur de voir tous ces interdits prendre vie."
Et il y a la manière dont ces programmes sont rythmés de façon à ce qu’on "s'accroche et qu'on ait du mal à décrocher avec des enchaînements de disputes ou d'histoires d'amour." Constance Vilanova a constaté que "tout est fait pour que l'on devienne accro et qu'on reste pendant tout le programme, pour ainsi consommer les publicités qui vont s'intercaler entre les séquences."
Des castings sauvages et des profils stéréotypés
Joseph se demande "comment se déroulent les castings de téléréalité" et Jeanne "s'il y a des critères pour être sélectionné".
Constance explique qu'il y a "20 ans, pour postuler à une téléréalité, il fallait envoyer un courrier, ensuite les casteurs ont commencé à pratiquer ce qu'on appelle des castings sauvages." Le principe est d'aller dans la rue et essayer de repérer des profils, ou encore en boîte de nuit. Aujourd'hui, les castings se passent via les réseaux sociaux, les casteurs vont aller fouiller les comptes TikTok et Instagram à la recherche d'un profil original qui passe bien à la caméra.
Anna se demande s'il est vrai que dans les téléréalités "on attribue un rôle aux candidats".
Constance Vilanova explique que quand "on regarde la téléréalité, on se rend très bien compte et très vite que les casteurs vont chercher des profils bien particuliers : la grande gueule, celui qui sait jouer des coudes, qui parle plus fort que les autres pour créer ces fameuses séquences de clashs et de disputes, il va y avoir la jeune femme très vulnérable qui va être souvent victime de harcèlement de la meute et du groupe".
Pas d'acteurs, mais des scènes qui sont retournées
Ilyès se demande s'il est vrai "que les scènes de téléréalité sont souvent mises en scène".
D'abord Constance Vilanova rappelle qu'il n'y a pas "de comédien dans ces émissions, donc difficile de leur faire lire un texte ou des répliques." En revanche, précise-t-elle, "pour que ça ne tourne pas en rond et que le téléspectateur ne s'ennuie pas, les boîtes de production vont stimuler les candidats avec des activités lors desquelles, on peut assister à des disputes et éventuellement des mises en scène".
Elle précise que "le problème, c'est qu'avant, au début des années 2000, la téléréalité avait beaucoup plus d'argent pour faire des jolies émissions, alors que maintenant, il y a moins de caméras et donc parfois, il faut refaire des scènes puisque les caméras ont manqué une dispute par exemple." La production va alors demander aux deux candidats, qui viennent de se disputer, de rejouer la séquence.
Les partenariats sur les réseaux sociaux rapportent plus qu'une émission aux candidats
Lison se demande s'il est vrai "que les gens de la téléréalité sont bien payés" et Louise a entendu dire que "les personnes de la téléréalité ne sont pas payées de la même manière" et elle se demande si c'est vrai.
C'est vrai, tous les candidats sont payés différemment. Constance Vilanova explique qu'une journée de tournage est payée en moyenne entre 200 et 900 euros, mais que c'est par un autre moyen que les candidats gagnent de l'argent maintenant. Elle a constaté que "depuis l'avènement d'Instagram en 2013, les candidats et candidates de téléréalité gagnent beaucoup plus d'argent en faisant des placements de produits, en faisant de la pub sur leurs réseaux sociaux, que pendant les tournages." Elle a analysé qu'une publicité sur les réseaux sociaux, "ça peut varier entre 1000 et 4 000 euros."
Il n'y a pas de suivi psychologique des candidats après les émissions
Camille se demande s'il est vrai "qu’une ancienne candidate de téléréalité a tenté de se suicider".
Oui, c'est vrai, lui répond Constance Vilanova, dans la téléréalité, "il y a énormément de harcèlement et en 2016, par exemple, il y a une candidate qui s'appelle Aurélie Preston, qui a été victime de harcèlement de la part d'autres candidats, c'était des scènes très dures à regarder". À l’époque, explique-t-elle, "la boîte de production n'a rien fait et n'a pas empêché le harcèlement et Aurélie Preston a fait une tentative de suicide récemment parce que ça l'a énormément marqué et qu'elle n'a pas été accompagnée psychologiquement après ce tournage douloureux." Pour conclure, Constance Vilanova explique qu'on "ne sort pas indemne de ces tournages qui nous affectent profondément et les boîtes de production n'accompagnent pas, ne proposent pas de suivi psychologique après ces tournages".
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