À la rencontre des morses et des ours d'Alaska avec Antonin Charbouillot

Antonin Charbouillot est photographe et auteur. Cet observateur engagé explore la relation entre l'Homme et la nature. Il capture des histoires inspirantes sur les territoires du grand Nord, avec une fascination particulière pour l’Alaska.
Article rédigé par Ingrid Pohu
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6 min
Antonin Charbouillot aime photographier les ours, il s'en est fait une spécialité comme ici en Alaska. (ANTONIN CHARBOUILLOT)

Antonin Charbouillot est l’auteur d’un premier ouvrage Et le loup continue de courir dans les forêts d’Alaska, autopublié en février 2020. 

Son récit de voyage se déroule dans le borough des Aléutiennes orientales en Alaska, en territoire ancestral Unangax. C'est le dernier morceau de terre avant que les îles aléoutiennes commencent jusqu'à la Russie. Territoire de volcans, bloqué entre l'océan Pacifique et la mer de Béring.

Paysage d'Alaska. (ANTONIN CHARBOUILLOT)

"Je suis venu là pour tenter d'observer et de photographier des ours bruns, raconte Antonin  Charbouillot. Je voulais terminer un livre sur lequel je travaille depuis trois ans. Ce sont un peu les ours du 'bout du monde’, le point le plus à l'ouest du continent. J'étais accompagné d'un ami : Steve Odoï, 60 ans, ancien marin et capitaine de bateau. Après 3 jours de navigation, nous avons été déposés à Cold Bay, petite communauté d'une soixantaine d'habitants. De là, nous sommes partis pour 16 jours en autonomie, dont les 10 premiers jours ont été compliqués avec du vent et des tempêtes constantes. Les rencontres animales sont rares.

Un jour, nous décidons de traverser un immense lagon pour aller voir un morceau de terre bloqué entre la mer de Béring et ce fameux lagon. Une sorte d'isthme. Nous avons avec nous un canoë gonflable, la traversée est d'une dizaine de kilomètres. Il faut étudier courant, marée, et surtout ne pas avoir de vent du tout, chose qui est extrêmement rare dans cette zone : ce jour-là, nous savons que nous avons 6 heures de calme plat.

Nous voilà partis. Après 1h30, nous ne sommes plus très loin. Soudain une forme émerge a 1 km de l'embarcation : un morse ! Puis 10... puis 100 ! Et finalement, ils sont des centaines, peut-être un millier.

Nous décidons d'accoster sur une bande de terre de sable noir pour ne pas les effrayer et les photographier. Les images sont fabuleuses, nous perdons la notion du temps.

Autre surprise, des traces de loups constellent la terre ! J'imagine déjà les photos d'un loup dans les dunes de sable volcanique. Nous remontons les traces et tombons soudain sur un magnifique renard.

Il n'a probablement jamais vu un homme et se montre particulièrement curieux. Il vient nous tirer le pantalon, monte dans le canoë, renifle nos affaires. Je capture les photos du renard dans le sable noir. Un rêve éveillé. Il reste une trentaine de minutes avec nous, puis disparaît.

Pendant son périple en Alaska, Antonin Charbouillot a fait une rencontre extraordinaire avec un renard. (ANTONIN CHARBOUILLOT)

À ce moment-là, nous nous apercevons que les 6 heures sont écoulées. Nous avons perdu la notion du temps. On remonte rapidement dans le canoë pour rentrer, 10 minutes, 20 minutes, toujours le calme. Puis le vent se lève, de plus en plus fort. Les vagues se forment. Nous n'avons pas d'autre choix que continuer.

Steve me donne des indications de cap, nous rentrons dans le creux des vagues avec notre canoë gonflable. Mon cerveau passe en mode automatique, pour ne pas perdre mon sang-froid. Nous sommes une coque de noix au milieu d'une étendue d'eau en mouvement.

Après 3 heures de bataille, nous arrivons à notre point de départ. Il fait nuit noire, nous sommes trempés, mais en vie. Les derniers jours vont être tout aussi exceptionnels grâce à d'incroyables rencontres avec des ours. »

Le site d'Antonin Charbouillot

 

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