Une série estivale du Micro européen des Jeux olympiques : aujourd'hui le Portugal
Pour cette série estivale C'était les Jeux olympiques, du Micro européen consacré aux Jeux olympiques, direction le Portugal avec Ana Navarro Pedro, journaliste portugaise, correspondante à Paris. Le Portugal a été le treizième pays à intégrer le Comité olympique en 1909.
Il faut dire que jusqu'à la chute de la dictature en 1974, le Portugal aux Jeux olympiques – qui a fait tous les Jeux olympiques – c'était plutôt l’hippisme, l'escrime et la voile. Il ne faut pas oublier que le pays avait obtenu une première médaille de bronze, c'était en 1924, en hippisme, à Paris, il y a un siècle.
franceinfo : Après la chute de la dictature, le Portugal découvre l'athlétisme ?
Ana Navarro Pedro : On va dire ça. Il y avait déjà des athlètes qui concouraient aux championnats du monde, le comité olympique s'y met, et les résultats seront là dix ans plus tard. En 1984, à Los Angeles, Carlos Lopes gagne le marathon. Nous ne sommes pas un pays de sprinters, nous sommes un pays de coureurs de fond et je dis ça en général, pas seulement pour l'athlétisme... Et voilà, Lopes gagne le marathon de Los Angeles, nous avons une médaille d'or ! C'était notre première médaille d'or...
1924, des médailles de bronze...
On avait eu quelques médailles de bronze et d'argent après, c'était très symbolique, en 1974, la chute de la dictature, et la médaille d'or arrive 10 ans plus tard, avec Carlos Lopes et l'athlétisme, qui est appelé le sport des pauvres, à tort ou à raison. Peut-être parce qu'il faut moins de moyens pour le pratiquer. L’hippisme, il faut quand même avoir les moyens d'entretenir des chevaux.
Carlos Lopez venait d'une condition très humble ?
Il avait commencé à travailler sous la dictature à l'âge de 10 ans. Pourtant, il y avait le sport en lui, et ses parents lui interdisaient d'être footballeur et heureusement, ses parents lui ont interdit parce qu'il trouvait qu'il n'était pas assez costaud pour jouer au foot. Et il a réussi quand même à percer dans la course au Portugal. Ensuite, à force de volonté et de sacrifices, il est devenu notre champion olympique.
Qu'est-il devenu Carlos Lopes ?
Il reste quelqu'un d'important au Portugal parce qu'il a eu quand même des postes après au Comité olympique, dans l'athlétisme portugais.
Et le deuxième événement, c'est Séoul 88, c'est l'héroïne Rosinha, la petite Rose, Rosa Mota ?
Notre Rosinha, notre petite Rose, 1m 57 et 46 kilos distribués sur cette petite hauteur. Et médaille d'or du marathon. C'est extraordinaire. On est en pleine nuit au Portugal. Avec le décalage horaire, tout le monde est debout devant le poste de télé, à regarder notre Rosinha qui va gagner et qui pense ne pas pouvoir gagner. Au 38e kilomètre, elle menait la course depuis un bon moment, et elle n'en pouvait plus.
Elle avait ses concurrentes à ses talons, qui étaient prêtes à la dépasser, parce que c'est là qu'on dépasse. Et puis il y a son entraîneur qui est au 38e kilomètre, qui sait que c'est là que ça va se passer et qui lui crie : "Rosinha, c'est maintenant ou jamais !"
"Agora o nunca"...
Et voilà. Et ça lui a donné un courage extraordinaire, elle est repartie, et elle a gagné avec un très bon temps aussi. Elle aussi vient d'un milieu très modeste, extrêmement modeste. Ses parents lui disaient quand elle était petite : "Écoute, tu as beaucoup de chance, tu peux aller à l'école".
Vous savez, sous la dictature, étudier, aller à l'école, apprendre à lire et écrire, c'était réservé déjà aux plus aisés. Parce que Salazar se méfiait de ceux qui étaient lettrés – ils pouvaient penser s'ils savaient lire et écrire.
Est-ce que ces deux médailles d'or ont insufflé dans la jeunesse, l'espoir de réussir ?
Sans l'ombre d'un doute, et c'est la grande signification qui je pense, échappe un peu aux Portugais. Parce que Carlos Lopes a dit : "Je suis parti de rien, et je suis arrivé à occuper l'imaginaire de tout un peuple". Et il a raison et il ne dit pas par vanité. C'est la vérité. Avant, sous la dictature, on ne sortait pas de la condition sociale où on était né. Et eux, ils ont prouvé qu'on pouvait le faire. Avec de l'or...
Puisque nous sommes dans cette période olympique, y a-t-il des espoirs portugais aujourd'hui ?
Oui, un peu plus. À Tokyo on a eu quand même quatre ou cinq médailles, tout d'un coup. On parie beaucoup sur l'athlétisme évidemment, et puis la natation, le judo. Mais non, on n'a pas un nom qui va sortir du lot. Sauf ceux qui sont déjà allés à Tokyo et qu'on va peut-être voir à Paris à nouveau.
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