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On s'y emploie. Ces salariés privés de pot de départ par la crise

Ceux qui ont quitté l'entreprise pendant le confinement ont été privés de pot de départ et ce n'est pas un détail.

Article rédigé par franceinfo, Philippe Duport
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le pôt départ, un rituel nécessaire pour bien tourner la page. (SUBMAN / E+)

On a beaucoup parlé de l'impossibilité de dire adieu à des proches, ou d'assister à des funérailles, à l'occasion d'un décès survenu pendant le confinement. Mais d'autres "deuils" ont également été difficiles à faire. Ils concernent ceux qui ont quitté l'entreprise pendant la crise sanitaire. Evelyne Stawicki est coach, psychologue du travail, professeur à l'ESCP Europe... 

franceinfo : C'est une conséquence inattendue du confinement, l'impossibilité de se dire au revoir, entre collègues, comme on aurait aimé le faire.

Evelyne Stawicki :et pourtant c'est important d'organiser un pot de départ quand on quitte une entreprise. Le cadeau, le discours, la chanson, le champagne, les petits fours, tout ça fait partie de ce que l'on appelle un rituel. Les ethnologues l'ont dit, il est le fondement de toutes les sociétés humaines. Il a trois vertus, il marque les étapes importantes de notre vie, il permet de sortir de la banalisation de certains événements et puis surtout il constitue un code social qui témoigne du respect à l'autre, qui honore l'autre. Il y a comme une dimension sacrée et la perte de ce rituel n'est pas sans conséquences.

Lesquellles ?

Même si le départ est volontaire, partir c'est toujours un peu triste. Le rituel permet de mélanger le rire aux larmes. Sans pot de départ, c'est plus difficile de tourner la page. Et ça laisse à tout le monde un sentiment d'inachevé, de malaise. Le rituel est important pour celui qui part, mais il l'est tout autant pour ceux qui restent. Ils savent que le moment venu, à leur tour ils seront honorés. A contrario quand un collègue disparait du jour au lendemain, le sentiment de ceux qui restent est teinté d'amertume. Ca met en avant le sentiment que nous ne sommes rien, que nous ne comptons pour rien ni pour personne. Et cela aura des conséquences sur notre engagement et notre motivation.

Par quoi peut-on le remplacer ?

Souvent les gens sont persuadés qu'ils reviendront voir leurs collègues pour leur dire au revoir, mais en réalité ça n'est pas tout à fait vrai, les temporalités ne sont plus ajustées. C'est du réchauffé ! Il vaut mieux essayer d'être inventif. Certains organiseront une soirée, chez lui ou l'autre, sur une terrasse, d'autres feront une visio avec des cadeaux envoyés par la poste. Mais ça gardera un goût d'amertume. Imaginez la personne qui a passé 40 ans dans une entreprise et qui part à la retraite, l'étudiant dont c'est le premier stage. Le rituel nous place dans un collectif solidaire et quand il n'est pas là il laisse la place à un profond sentiment de solitude.

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