Cet article date de plus de quatre ans.

Le jour où la légende a été enregistrée avec les moyens du bord

Dans "Petite Histoire de Festivals", Yann Bertrand vous raconte les anecdotes, les moments forts de ces petits et grands événements qui n'auront pas lieu cet été ou en tout cas, pas dans leur forme initiale… Aujourd'hui, retour sur une soirée mémorable avec un habitué, la légende Keith Jarrett.

Article rédigé par franceinfo, Yann Bertrand
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Keith Jarrett et sa femme à la fin des balances, au festival Jazz à Juan, le 16 juillet 2020. (JACQUES MUNCH / AFP)

À Antibes-Juan-les-Pins, la pinède Gould peut se vanter d’avoir accueilli les plus grands. Depuis 1960 : Ray Charles, Ella Fitzgerald, Stan Getz, Miles Davis, Michel Legrand, Dizzy Gillespie, Sonny Rollins, Michel Petrucciani… Jazz à Juan est le plus ancien festival de jazz d’Europe, l’un des plus courus aussi, avec un artiste-phare, quasi-résident : Keith Jarrett.

Ce mardi 16 juillet 2002, l’Américain est une nouvelle fois en haut de l’affiche. Cerise sur le gâteau : la maison de disques, ECM Records, a prévu d’enregistrer le concert en vue d’un futur album. "Seulement, voilà ce qui se passe une fois tous les dix ans, raconte Philippe Baute, directeur du festival. À partir de 17 heures, les dieux du ciel décident de contrarier un petit peu cette captation. Il se met à pleuvoir, pleuvoir, pleuvoir…"

La grande préoccupation c'est garder Keith Jarrett présent en espérant une accalmie.

Philippe Baute

à franceinfo

La scène est trempée, et Keith Jarrett n'est pas vraiment réputé pour son caractère facile et son adaptabilité. "Plus de 3 000 personnes attendent à l'extérieur, des gens qui, pour écouter cet homme, viennent de la planète entière." Mais Philippe Baute et ses équipes trouvent la solution : "Nous avons dû composer avec les moyens du bord, et surtout convaincre monsieur Jarrett de se retrouver sous ces petites tentes que l'on a l'habitude de voir sur les festivals, mais plutôt pour abriter les buvettes."

Un album et un toit 

Même le piano Steinway & Sons est protégé. Vers 22h45, le concert commence et s’ensuit près d’une heure et quart de magie, de musique céleste sous des cieux plus cléments. "Tout se passe parfaitement bien, se souvient Philippe Baute. À la fin, son légendaire agent Steve Cloud vient nous voir en nous disant : 'Si vous voulez que Keith revienne pour les années suivantes, je mettrai au contrat la demande d'un toit de scène'."

La photo de Keith Jarrett, Gary Peacock et Jack DeJohnette sous leurs tentes improvisées apparaît dans le livret de l’album Up For It, fruit de cette soirée, qui sortira dix mois plus tard. "La pochette est bleue comme un ciel, alors que ce n'était pas du tout le cas", rappelle tout de même l'organisateur. Une histoire sur disque pour un festival qui fêtera, c’est certain, sa 60e édition l’année prochaine.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.