Regard sur l'info. Nathanaël Wallenhorst : "La mutation humaine ne sera pas transhumaniste, elle sera politique"
Nathanaël Wallenhorst est maître de conférences HDR à l’Université catholique de l’Ouest (UCO). Il est docteur en sciences de l’environnement, en science politique et en sciences de l’éducation. Il vient de publier "Mutation, L'aventure humaine ne fait que commencer" aux éditions Le Pommier.
Les recherches de Nathanaël Wallenhorst, docteur en sciences de l’environnement, en science politique et en sciences de l’éducation, portent sur les incidences éducatives et politiques de l’entrée dans l’Anthropocène. Auteur de plusieurs ouvrages, il est directeur de collections au Pommier. Il vient de publier Mutation, L'aventure humaine ne fait que commencer, aux éditions Le Pommier.
Thomas Snégaroff : Cette semaine des fuites d'un rapport du GIEC ont été rendues publiques, un rapport qui s'alarme d'une possible disparition de la vie humaine sur Terre. Vous, vous dites : "L'aventure humaine ne fait que commencer". Est-ce que ça veut dire que vous n'êtes pas d'accord avec l'idée que nous pourrions disparaître ?
Nathanaël Wallenhorst : Alors moi, je suis vraiment, vraiment d'accord avec les rapports du GIEC, mais la question ce n'est même pas de savoir si on est d'accord ou pas d'accord, on est face à un consensus scientifique qui est conséquent, considérable. Et ce qui est très important, c'est de nous mettre d'accord sur les faits, et l'ensemble des rapports du GIEC nous aident à nous mettre d'accord sur les faits.
On est à un moment crucial, à un carrefour où, de fait, la possibilité de disparaître est envisageable. Et ça veut dire quoi ? C'est, ni plus ni moins, la poursuite des logiques actuelles néolibérales dans lesquelles nous sommes. De fait, elles scient avec détermination la branche de laquelle nous recevons la vie.
Mais je pense qu'à ce carrefour, il y a une autre possibilité qui est précisément celle de muter, et qu'on entreprenne une forme d'immense mutation humaine, de mutation anthropologique, c'est-à-dire d'envisager une mutation humaine qui soit encastrée sur les savoirs géoscientifiques tels qu'il se dévoilent à nous, notamment dans l'ensemble des rapports du GIEC.
Mais quand vous dites "nous ne sommes pas séparés de la Terre, nous sommes la Terre", en fait, c'est peut-être ça le problème, c'est qu'on s'est souvent pensés sur la Terre uniquement, et pas faisant partie d'un même tout avec la Terre ?
On arrive aux limites de conception de l'humain, et de l'humain en société où, de fait, on a fait comme si on était comme extrait, en dehors, au-dessus de la Terre, de la biosphère, de la nature. Et il me semble au contraire, que nous ne faisons qu'un avec la biosphère.
Vous êtes à rebours de ceux qui pensent aussi une mutation, plus technologique, de l'homme augmenté, etc. Vous au contraire, c'est une reconnexion à la Terre, plutôt qu'une espèce de déconnexion d'un homme qui serait encore plus éloigné de notre système terre ?
Oui, le livre se veut une forme de réponse à un double débat qui a lieu aujourd'hui dans nos sociétés. L'un d'entre eux, c'est la mutation qui est esquissée par les transhumanistes qui envisagent une mutation qui est une mutation économique, qu'il s'agisse de devenir le plus gros possible - et on espère de cette façon repousser les limites de notre mort individuelle. Mais c'est strictement individuel. Il s'agit d'augmenter ma propre puissance, et ce que j'ai voulu dire à travers ce livre, c'est que les transhumanistes n'ont pas le monopole de la mutation.
Il faut au contraire, à 180 degrés de cette mutation économique, envisager une mutation proprement politique, c'est-à-dire refonder un nouveau "Nous", un autre "Nous". Mais à partir d'un centre de gravité qui est un espace vide, relationnel, qui est l'espace du politique, qui est l'émergence de ce miracle de l'action de concert, ensemble, où nous décidons de notre propre devenir.
Le deuxième débat par rapport auquel j'ai voulu me positionner, c'est le fait qu'il est inévitable et inexorable qu'un immense effondrement advienne. Je refuse de prendre acte du fait que le pire soit certain.
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