Europe : faut-il parler avec la Russie ?
Jean-Claude Juncker va participer la semaine prochaine au Davos russe. Il devrait rencontrer Vladimir Poutine. Alors, sera-t-il question de lever les sanctions prises en 2014 après l’annexion de la Crimée ? Ces sanctions contre 146 personnalités russes expirent fin juillet.
Ces sanctions avaient déclenché en retour l’embargo russe et désorganisé les marchés de l’agro-alimentaire en Europe avec une baisse des exportations, et 200 millions d’euros de pertes sur un an dans les fruits et légumes, le lait et le porc, secteurs déjà soumis au changements de la politique agricole commune. Sans levée des sanctions, on se doute bien qu’il n’y aura pas de levée de l’embargo russe, Poutine a déjà prévu qu’il le poursuivrait jusqu’à la fin de 2017. Embarrassant pour une économie européenne qui manque de souffle et se prive donc là d’un de ses débouchés.
Tension côté gaz russe
La commission européenne a décidé d’abandonner il y a 18 mois le projet de construction du gazoduc South Stream vers le sud de l’Europe. Elle a aussi décidé cette semaine de mettre son nez dans les contrats gaziers passés avec la Russie par les États membres. Elle aurait voulu que la solidarité européenne conduise les États à se vendre du gaz entre eux en cas de pénurie plutôt que de frapper à la porte de Gazprom mais ils trainent les pieds.
Certains sont dépendants du gaz russe à 80 % comme la Bulgarie, et d’une manière générale, un tiers du gaz en Europe vient de Russie. Du coup, en réponse, Gazprom se gargarise. L’entreprise explique ces jours-ci qu’elle va vers un record de vente de gaz à l’Europe cette année. Une façon de faire sentir aux Européens que cette dépendance est loin de prendre fin. Et cette dépendance énergétique pèse lourd dans le rapport de force. Poutine d’ailleurs sait très bien frapper là où ça fait mal. Après s’être rendu en Hongrie, le mouton noir de l’Europe, il a signé fin mai des accords de coopération économiques avec la Grèce, histoire de profiter des failles qui se dessinent dans l’Union.
Relents de guerre froide
Depuis mardi plus de 30 000 soldats, une centaine d’avions et 12 navires de l’Otan participent à l’opération Anaconda sur le sol polonais à la frontière russe. L’Otan montre ses muscles, comme Moscou le fait régulièrement dans l’enclave russe de Kaliningrad. On se souvient de l’incident entre un chasseur russe et un avion de reconnaissance américain, le mois dernier, dans le ciel de la Baltique. Tout ça, ça n’est pas la première fois.
Le sommet de Varsovie en juillet devrait décider le renforcement de la présence de l’Otan à l’Est de l’Europe. Malgré cela, Jens Stoltenberg, le patron de l’Alliance, a repris langue avec la Russie malgré des désaccords persistants. Sur l’application des accords de Minsk, qui conditionnent les relations économiques, sur la Syrie où chacun soutien son camp. Désaccords toujours pas levés aujourd’hui. Le vice-chancelier allemand, Sigmard Gabriel, estime qu’il ne sert à rien d’isoler la Russie. Juncker, lui-même, en octobre dernier considérait qu’il fallait améliorer les relations Europe Russie et ne pas laisser Washington en décider. Cette visite pourrait être le début d’un dégel. Mais ce sera difficile.
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