L'impitoyable monde de la télephonie mobile
Les relations sont loin d'être au beau fixe entre l'autorité de régulation des Télécoms (l'ARCEP) et le gouvernement. Les ministres Montebourg, Pellerin et Filippetti l'accusent ni plus ni moins d'avoir mis les opérateurs sous forte pression en favorisant la politique de prix bas, faisant ainsi le jeu de Free.
Pour le gouvernement, ce petit jeu n'a que trop duré. Il est temps de rééquilibrer la donne et le Président de l'ARCEP, Jean-Dominique SILICANI, qui a évité de justesse une fusion avec le CSA (Conseil Supérieur de l'Audiovisuel), cet homme de nature discrète mais piqué au vif, a décidé de se défendre.
Une étude contradictoire de l'ARCEP
L'ARCEP vient de présenter une étude qui remet en question pas mal d'idées reçues. Mais une étude somme toute assez contradictoire. Le document montre que l'arrivée de Free Mobile sur le marché n'a pas sinistré le secteur comme il a été dit. On serait très loin d'un marché dynamité et dévasté.
Les acteurs des télécoms ont réussi à maintenir l'activité, l'investissement et l'emploi, affirme ce rapport qui peine à convaincre quand on sait qu'en mars 2012, il y a donc tout juste un an, l'ARCEP estimait que l'arrivée de Free pourrait détruire jusqu'à 10.000 emplois. Aujourd'hui, il n'en n'est plus rien... un peu comme si le régulateur craignait les attaques en justice que Free n'hésite pas à mener contre ceux qui osent le critiquer. Bien sûr c'est impossible. Un régulateur ne craint pas ce dont sont victimes certains journalistes ou économistes qui font leur travail.
Un secteur contraint de rogner sur ses marges
Mais concrètement, loin de toute polémique, peut-on avoir un regard objectif sur cette question ? Il suffit de citer un chiffre, avancé par l'ARCEP. Orange, Bouygues-Télécom et SFR ont perdu 1,6 milliard d'euros de résultats l'an dernier. Pour rester compétitif, un secteur qui perd autant d'argent est contraint de rogner sur ses marges.
Le problème c'est que chaque année, les opérateurs doivent investir ensemble au minimum 6 milliards d'euros pour entretenir et moderniser le réseau. Et ce n'est pas fini car la technologie Internet rapide 4G arrive avec la fibre optique à la place du cuivre... tout cela va coûter cher. L'effet ciseaux est évident, avec les risques pour l'emploi, sans compter l'impact sur les équipementiers comme Alcatel-Lucent qui subissent une forte pression de la part des opérateurs.
A terme, les prix ne peuvent que remonter
On est donc arrivés au bout d'un système, les records ont leurs limites. Au même titre qu'un marathonien ne pourra jamais franchir une ligne d'arrivée avant d'être parti, un opérateur téléphonique ne pourra pas indéfiniment offrir un service compétitif et maintenir de l'emploi avec des prix proches de 0.
Le consommateur va devoir s'y faire : à terme, les tarifs de la téléphonie mobile ne peuvent que remonter. Même Free ne pourra vivre éternellement sur son tas d'or... il aura fort à faire pour ne pas désenchanter une partie de la clientèle jusqu'à présent séduite.
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