Le Chili examine une proposition de loi visant la dépénalisation de l'avortement
Il y a 15 jours, l'Argentine a légalisé l'interruption volontaire de grossesse, un événement sur le continent. Le Chili pourrait lui emboîter le pas. Le sujet arrive devant le Parlement à Valparaiso.
Forcément, ce qui s’est passé à Buenos Aires fin décembre est dans tous les esprits au Chili. Le parlement chilien va entamer mercredi 13 janvier l’examen d’une proposition de loi visant à légaliser l'IVG jusqu’à 14 semaines de grossesse.
Il ne va pas y avoir de vote tout de suite : le travail va débuter d'abord en commission. Mais le symbole est quand même fort dans ce pays de 19 millions d’habitants où l’avortement est resté totalement interdit jusqu’en 2017. La proposition de loi, défendue par une dizaine de députés, vise à modifier trois articles du code pénal chilien, les articles 342 à 344. Ils prévoient pour l’instant des peines de prison pour tout avortement à l’exception de trois cas de figure : le viol, le risque pour la vie de la mère et le fœtus non viable. La modification envisagée est la suivante : toutes ces peines demeureraient, mais uniquement au-delà de la 14e semaine de grossesse. Autrement dit, avant ce délai, l’avortement deviendrait légal.
Les associations féministes dénoncent les avortements clandestins
Mais ce changement s’annonce compliqué parce que comme en Argentine, le pays est très divisé. L’Eglise catholique est très puissante dans le pays et va faire campagne contre la proposition de loi. Mais à la différence de l’Argentine où le président de centre gauche avait appuyé la réforme, au Chili le gouvernement conservateur sera sans doute derrière l'Église. La ministre chilienne de la condition féminine, Monica Zalaquett est l’une des plus radicales : elle est défavorable à l’avortement même en cas de viol sur mineure.
En face, les militantes féministes sont très mobilisées. Elles sont d’ailleurs en pointe de tout le mouvement de contestation sociale qui secoue le pays depuis de longs mois. Les associations féministes soulignent que la situation actuelle, comme en Argentine, conduit à un nombre record d’avortements clandestins : entre 70 000 et 200 000 par an. Impossible d'avoir un chiffre fiable, mais c’est énorme. Même dans les cas autorisés par la loi de 2017, plus de la moitié des médecins refusent de pratiquer l’intervention au nom de l’objection de conscience et le déficit d’information sur le sujet est considérable. De nombreuses chiliennes cherchent donc à se procurer des médicaments sur Internet pour avorter, en particulier le misoprostol. Mais il coûte cher, et cela se termine donc souvent par des avortements dangereux à la maison.
L'hypothèse d'une marée verte
Toute la question est de savoir s’il peut y avoir "un efecto cascada", un effet en cascade, après le vote en Argentine. C’est ce qu’espèrent les militantes chiliennes, et cela est possible parce que l’Argentine est un poids lourd régional. Tout le continent a donc observé avec attention les débats à Buenos Aires. Aujourd’hui, sur le continent sud-américain, l'IVG n’est autorisée, en plus de l’Argentine, qu’en Uruguay et en Guyana. Ajoutons Cuba et Puerto Rico si on inclue la zone des Caraïbes. Partout ailleurs, elle est soit sévèrement restreinte, soit totalement interdite. Donc une marée verte est possible dans les mois qui viennent. Le vert est la couleur, sur tout le continent, du mouvement pro-avortement.
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