Cet article date de plus de quatre ans.

En Iran, l'avocate Nasrin Sotoudeh renvoyée en prison malgré 44 jours de grève de la faim

Le sort de cette femme qui incarne le combat des droits de l’homme est désormais très préoccupant, vu son état médical.


Article rédigé par franceinfo - Jean-Marc Four
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des portraits de Nasrin Sotoudeh brandis devant l'ambassade d'Iran en France, lors d'une manifestation pour demander sa libération, le 13 juin 2019 (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

Sa grève de la faim dure depuis 44 jours, en ce 24 septembre. Le 18 septembre, Nasrin Sotoudeh, qui a 57 ans, avait été hospitalisée à l’hôpital Taleghani de Téhéran. Mais elle vient d'être renvoyée à la prison d’Evin, tristement célèbre : c’est là que les opposants au régime sont pour la plupart incarcérés, dans des conditions très précaires. Elle a d’ailleurs été placée en quarantaine dans une unité spéciale de la prison.

Selon son mari, Reza Khandan, l’avocate est très affaiblie. Son état cardiaque est particulièrement préoccupant. D’autant qu’elle poursuit sa grève de la faim. Son mari n’a eu aucun accès direct à son épouse pendant l’hospitalisation. Le Centre de défense des droits humains en Iran se dit très inquiet, tout comme plusieurs dirigeants occidentaux, notamment le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves le Drian. Nasrin Sotoudeh est une personnalité emblématique, récompensée notamment par le Prix Sakharov en 2012 pour son combat en faveur des droits de l’homme en général et des droits des femmes en particulier.  

Virus mal maîtrisé et répression politique

Avec cette grève de la faim, Nasrin Sotoudeh souhaite attirer l’attention sur deux choses. D’une part le risque de propagation de l’épidémie de Covid-19 dans les prisons iraniennes vu la promiscuité qui y règne. Si l’on en croit le bilan officiel, le virus a fait 24 000 morts dans ce pays de 82 millions d’habitants. Mais le bilan réel est sans doute beaucoup plus élevé : de nombreuses voix accusent le pouvoir iranien d’avoir sous-évalué les chiffres, en tous cas au début de l’épidémie. De nombreux détenus de droit commun ont d’ailleurs été libérés en Iran, pour éviter que le virus ne se diffuse dans les prisons. Mais cette mesure d’élargissement ne bénéficie pas aux prisonniers politiques.

D’autre part, justement, c’est le deuxième sujet soulevé par l’avocate, la multiplication des poursuites pour raisons politiques. Un simple tweet, un simple commentaire sur Internet peut vous conduire en prison pour plusieurs années. Nasrin Sotoudeh elle même en est l'illustration : elle purge une peine de 38 ans de prison, dont 12 ans ferme, officiellement pour "incitation à la prostitution". Concrètement, elle avait pris la défense d’une femme arrêtée pour avoir refusé de porter le voile.  

Ligne dure au sein du pouvoir iranien

Tout ça est révélateur d’un durcissement du pouvoir iranien. Rappelons que la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah est elle aussi incarcérée, dans cette même prison d’Evin, condamnée à cinq ans de prison, soi-disant pour espionnage. Les conservateurs, les partisans de la ligne dure ont plutôt le vent en poupe à Téhéran. C’est l’une des conséquences du bras-de-fer déclenché par Donald Trump en sortant de l’accord sur le nucléaire. Et ce durcissement du pouvoir iranien ne devrait pas s’arranger dans les mois qui viennent, en raison de l’élection présidentielle prévue en Iran au printemps prochain.  

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.