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La Corée du Sud autorise l’importation de poupées sexuelles à l’issue d’une vive controverse de société

L’importation de ces articles était interdite depuis des années en Corée du Sud. C'est l’épilogue d’un débat de société animé.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une poupée sexuelle en Chine, en avril 2018. (ALEKSANDAR PLAVEVSKI / EPA / MAXPPP)

La décision des douanes de Corée du Sud met fin à presque cinq années de controverses et de contentieux judiciaires. Des milliers de ces poupées sont sans doute bloquées depuis début 2018 dans les entrepôts des douanes de ce pays de 52 millions d’habitants parce que la loi interdit l’usage de tout objet susceptible de nuire à la morale et aux traditions de la Corée du Sud.

En 2019, l’affaire a été portée devant la Cour d’appel de Séoul puis devant la Cour Suprême du pays (article en anglais) : les deux instances ont estimé que les poupées pouvaient être autorisées dans le cadre de la vie privée et que ce n’était pas comparable à la pornographie. Les opposants ont riposté en créant une pétition qui a réuni 237 000 signatures. Elle évoquait un lien de causalité entre le recours aux poupées et les crimes sexuels. Le nombre de signataires a rendu l’examen du dossier obligatoire par le cabinet du président sud-coréen. Finalement, la décision est donc tombée, par la direction des Douanes : feu vert à l’importation, mais la condition que ces poupées ressemblent bien à des adultes et en aucun cas à des enfants, pour ne pas encourager la pédophilie.  

Jusqu'à 16 000 euros pièce

Il n’y a pas de chiffres officiels sur l'ampleur du marché dans le pays et ce business n’est sans doute pas aussi florissant qu’au Japon, où on estime qu’il se vend une poupée chaque minute. Mais les importateurs sud-coréens ne cachent pas leur satisfaction après la décision des Douanes. Ces poupées peuvent valoir très cher : jusqu’à 17 000 dollars, soit 16 000 euros, pour les plus élaborées. Les ressemblances avec l’être humain sont parfois saisissantes, jusque dans les détails des yeux, des cheveux, de la peau.

De nombreux Sud-Coréens, pour contourner l’interdit des Douanes, se fournissaient jusqu’à présent au marché noir, avec des poupées en pièces détachées, fabriquées soit au Japon, soit en Chine. Ce phénomène est en partie liée au rapport de la société sud-coréenne à la sexualité. Le sujet reste en partie tabou, il n’y a pas d’éducation sexuelle à l’école. Et le milieu des stars musicales de la K Pop est rongé par les scandales sexuels, en particulier les affaires de "molka " comme on les appelle là-bas : filmer une femme à son insu en petite tenue ou plein ébat amoureux.  

Le tabou de la sexualité

Cette décision des Douanes ne va donc pas faire taire les controverses. Les associations de défense des droits des femmes dénoncent l’exploitation du corps de la femme. Elles dénoncent aussi l’hypocrisie de l’interdiction des poupées ressemblant à des enfants : certaines affichent des corps ambigus, entre celui d'un corps d’enfant et celui d'un corps d’adulte. Enfin dernière controverse : le statut de certains établissements baptisés "sex doll café" : les clients accèdent à une pièce privée où ils font ce qu’ils veulent avec une poupée. Ces établissements se compteraient par centaines en Corée du Sud mais leur commerce est peu encadré. Seule limitation : ils doivent se trouver à plus de 200 mètres de tout établissement scolaire. Là encore, on ne peut pas écarter des liens avec les réseaux de prostitution. Cette affaire de poupées sexuelles en dit long sur la société sud-coréenne.  

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