La mort de la dernière princesse de Hawaï, incarnation d’une incroyable saga
Abigail Kawananakoa avait 96 ans. Elle semble être morte de vieillesse, elle avait été hospitalisée l’été 2022. Les habitants d’Hawaï, qui sont 1,5 million, l’appelaient par son surnom, Kekau, ou par son titre Alii, ça veut dire membre de la famille royale. Tous les drapeaux sont en berne à Honolulu, parce que la princesse incarnait à elle seule l’histoire complexe de l’archipel.
Elle était donc la dernière héritière de la lignée royale qui a dirigé Hawaï : au départ six dynasties régnant sur six royaumes, finalement unifiés en un seul en 1810. Le pays devient alors indépendant, mais pas pour longtemps puisque le territoire est annexé par les Etats-Unis en 1898, avant de devenir l’un des 50 États américains en 1959. Abigail Kawananakoa était l’arrière petite nièce de la reine Lili Uokalani, la dernière à avoir régné. Mais la princesse avait en fait été adoptée par les descendants de la famille royale à l’âge de 5 ans. En réalité, elle descendait de colons irlandais richissimes, les Campbell, détenteurs de plantations de canne à sucre. Autrement dit, elle était l’incarnation du mélange d’Hawaï, à la fois descendante de colons européens, et dépositaire de la tradition autochtone.
Une fortune disputée
Elle était aussi formidablement riche. Sa fortune est estimée à 215 millions de dollars. Ce qui conduit à un autre aspect de la saga : presque un roman policier qui rappelle un peu la bagarre autour de la fortune de Liliane Bettencourt en France. La princesse était donc de santé fragile, depuis un AVC en 2017, et sa fortune faisait des envieux. Survient alors un vrai fait divers, avec une dispute entre son gestionnaire de fortune et son épouse. Parce que Kawananakoa était mariée avec une femme, de 24 ans sa cadette, Veronica Gail, avec laquelle elle vivait depuis 20 ans. Les deux parties, depuis plusieurs années, sont en contentieux judiciaire.
Qui doit s’occuper de la fortune de la princesse ? Le gestionnaire de fortune se voit accusé de manipulation et d’avoir déjà dilapidé aux enchères le mobilier de l’une des maisons d’été du patrimoine royal. L’épouse se voit renvoyée qu’elle est de mauvaise vie. Plusieurs audiences judiciaires ont alimenté la saga ces dernières années. L’un des sujets était aussi la garde du chihuahua, le chien de la princesse, baptisée Girlie Girl. Finalement, la fortune a été confiée à la banque, la First Hawaian Bank.
Un fort investissement caritatif
La princesse était très populaire à Hawaï parce qu’elle était investie dans de nombreuses activités caritatives : elle finançait des bourses d’études, elle défendait le patrimoine culturel de l’île. Elle s’était opposée à des projets industriels, la construction d’une ligne de chemin de fer ou d’un télescope, pour des raisons environnementales. C’était un vrai personnage, cette Abigail Kawananakoa. Elle ne laisse donc pas d’hériter, pas d’enfant. Donc fin de la lignée royale mais ce n'est sans doute pas la fin de la saga judiciaire. Il ne fait guère de doute que le contentieux va repartir devant les tribunaux avec la disparition de la princesse.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.