Paris 2024 : les Jeux olympiques de 1936, Jesse Owens et Leni Riefenstahl face à la propagande nazie

Cette année-là, les Jeux se déroulent à Berlin, Adolf Hitler fait la promotion du concept de race aryenne. Mais les exploits de Jesse Owens, athlète noir américain, et le regard de Leni Riefenstahl, cinéaste allemande, transcendent la machine de propagande.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Jesse Owens (à droite) lors du 200m, aux Jeux olympiques, le 4 août 1936. (AUSTRIAN ARCHIVES (S) / IMAGNO /  APA-PICTUREDESK VIA AFP)

Quand la politique s’invite aux Jeux olympiques. À l’approche de la cérémonie d’ouverture des JO de Paris 2024, on revient sur l’année 1936. Les Jeux olympiques se déroulent à Berlin, dans un climat de xénophobie et d’antisémitisme. Adolf Hitler compte faire de cette quinzaine olympique une fenêtre de propagande pour promouvoir le concept de "race aryenne". Un projet qui sera littéralement taillé en pièces en à peine une semaine par un seul athlète : Jesse Owens, noir américain, issu d’un milieu modeste et originaire d’une petite ville d’Alabama.

Jesse Owens décroche quatre médailles d’or : 100 m, 200 m, 4X100 m et saut en longueur. Il démontre à chaque course, chaque prise d’élan, chaque impulsion, l’absurdité de l’aryanisme d’Adolf Hitler, l’un des socles de la politique nazie, l’objectif principal de ces Jeux, destinés à prouver la supériorité et la pureté de la jeunesse allemande. Mais sur la piste du stade monumental de Berlin, Jesse Owens fait mentir la narrative nazie et surclasse tout le monde.

Les exploits de Jesse Owens sont même transcendés par la machine de propagande mise en place par Adolf Hitler à l’occasion de ces Jeux. Un dispositif colossal mis à disposition de l’autre personnalité de ces Jeux olympiques : la cinéaste allemande Leni Riefenstahl. Son regard et sa créativité révolutionnent à jamais la façon de filmer le sport et de capter l’esthétique des corps en mouvement. Leni Riefenstahl utilise le ralenti, parvient à saisir, en très gros plan, toute la concentration, la détermination des sportifs en plein effort. Leni Riefenstahl est au plus près, à ras du sol, pour dévoiler la gestuelle de l’athlète dans ses moindres détails. C’est elle qui fixe pour la première fois des caméras sur des rails au bord de la piste et inaugure la technique des travellings qui accompagnent les sportifs tout au long des courses.

Une parenthèse olympique vite refermée

Leni Riefenstahl recevra même une médaille d’or du Comité international olympique pour son documentaire Les Dieux du Stade. C'est probablement la seule fois où elle refuse de transiger avec sa sincérité artistique. La cinéaste résiste à la pression de Joseph Goebbels, ministre de la propagande hitlérienne, qui lui demande de retirer du film les images où apparaissent des athlètes noirs. Cette parenthèse olympique de 1936 aura permis cette rencontre entre le génie de Jesse Owens et celui de Leni Riefenstahl. Mais la parenthèse se refermera très vite, la cinéaste mettra volontiers ses compétences au service de la propagande nazie durant toute la Seconde Guerre mondiale. L’athlète, de retour au pays, retrouve la réalité d’une Amérique ségrégationniste. Même avec quatre médailles d’or, il ne sera pas reçu à la Maison Blanche. En pleine campagne électorale, le président Roosevelt préfère ne pas prendre le risque de froisser les électeurs du Sud des États-Unis.

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