Yemen : l'opération lancée par les Américains est-elle en train de tomber dans le piège houthi ?

Le passage en 2024 n’a offert aucun répit pour les navires marchands en mer Rouge. Depuis deux mois, les Houthis, alliés de l’Iran et soutiens officiels de la cause palestinienne, multiplient les attaques et la nouvelle coalition mise en place pour protéger cette route commerciale attise encore leur ferveur.
Article rédigé par Olivier Poujade
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Manifestation contre l'opération occidentale visant à protéger les navires commerciaux dans la mer Rouge, à Sanaa, au Yémen, le 22 décembre 2023. (OSAMAH YAHYA / MAXPPP)

Le week-end du 31 décembre, une nouvelle attaque a été organisée en mer Rouge. C'est la 24ème depuis le 19 novembre, date à laquelle les rebelles houthis ont décidé de s’engager officiellement pour s’opposer à la réponse israélienne sur Gaza.

Ce nouvel incident révèle à quel point le niveau de tension ne cesse d’augmenter au passage du détroit de Bab al-Mandeb, entre le Golfe d’Aden et la mer Rouge. Pour la première fois, les rebelles houthis ont pris à partie des hélicoptères américains venus défendre le navire marchand Maersk Hangzhou, alors que celui-ci était menacé par quatre embarcations rapides de cette force yéménite.

Premiers morts depuis le début des affrontements en mer Rouge

Trois bateaux houthis ont été coulés et dix soldats rebelles yéménites ont été tués dans cette opération. Ce sont les premiers morts depuis le début de cette série d’attaques, destinée à paralyser une partie du transit maritime mondial.

Les États-Unis avaient annoncé fin décembre la création d’une coalition destinée à sécuriser ce passage de la mer Rouge. L’opération "Gardien de la Prospérité", initiée à la mi-décembre par les Américains sous la forme d'une coalition navale, intègre aujourd’hui une vingtaine de pays. Cette opération est considérée comme "vitale" pour les États-Unis, car entre 10 et 15% du commerce mondial transite par la mer Rouge, avec des marchandises destinées aux pays occidentaux.

D’où l’importance pour Lloyd Austin, ministre américain de la Défense, de protéger les règles et les lois de libre circulation des biens à travers le monde : "Ce droit fondamental universel est aujourd’hui la cible d’une nouvelle menace : celle des attaques totalement inacceptables de bâtiments de la marine marchande, par les forces houthies au Yemen, a-t-il déclaré. Ces attaques inconscientes constituent un sérieux problème international et nécessitent une réponse ferme au niveau international."

Un navire iranien positionné

Mais cette réponse ferme contribue à militariser une zone déjà très fournie en navires de guerre, qu’elle ne décourage absolument pas les intentions belliqueuses des combattants houthis, et que l’on est finalement à deux doigts d’ouvrir un nouveau front contre une force spécialiste de la guerre asymétrique.

Les États-Unis entraînent de plus en plus de pays dans cette stratégie. Depuis mi-décembre, d’autres nations ont décidé d’intégrer l’opération, comme la Grèce, le Danemark et l'Inde. Les Britanniques, fidèles alliés des États-Unis, haussent même le ton. Ils envisagent de prendre des "mesures directes" et de ne plus s’en tenir à abattre les drones yéménites.

Pendant ce temps, les Iraniens, principal soutien des rebelles houthis, viennent d'annoncer le positionnement de l’un de leur navire dans cette zone. En résumé, tous les composants d’une escalade militaire sont aujourd’hui réunis en mer Rouge. Ce qui explique peut-être pourquoi certains États comme la France, l’Italie et l’Espagne ont préféré, ces derniers jours, prendre leur distance avec les "Gardiens de la Prospérité".

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