"Après la douleur, c'est une sensation de plaisir" : pourquoi les Français mangent-ils de plus en plus pimenté ?

Article rédigé par Thomas Sellin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Lee Cheng à Paris dans son restaurant Trois fois plus de piment à Paris (FRANCEINFO / THOMAS SELLIN)
Les Français sont les troisièmes plus grands consommateurs d’épices en Europe. Et parmi celles-ci, le piment est de plus en plus présent sur nos tables. Rencontre avec Lee Cheng, le fondateur des restaurants Trois fois plus de piment qui, depuis près de vingt ans, proposent une cuisine sichuanaise explosive en plein cœur de Paris.

Les Français sont les troisièmes plus grands consommateurs d'épices en Europe, derrière les Allemands et les Belges. Parmi ces aromates, le piment séduit de plus en plus. Dans les supermarchés, les nouilles instantanées coréennes Buldak 3X Spicy côtoient les chips "Hot & Spicy" et autres bouteilles Martin de "la fabrique française de sauces piquantes".

Même le traditionnel pâté Hénaff si cher aux Bretons existe même en version épicée, troquant pour l'occasion son bleu historique contre une robe rouge pétant. Enfin, le succès de l'émission Hot Ones, animé par Kyan Khojandi qui testent la résistance aux piments de célébrités, est tel que McDonald's vient de commercialiser trois de ces sauces.

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"On ne veut pas vous faire pleurer"

Lee Cheng est le fondateur des restaurants parisiens Deux fois et Trois fois plus de piment, qui proposent une cuisine de la province chinoise du Sichuan des plus explosives. À tel point que les clients doivent choisir entre 0 et 5 pour la puissance de leurs plats.

"On ne veut pas vous faire pleurer", en rigole celui qui en 2008 ouvrait son premier restaurant dans le 11ème arrondissement de Paris sans trop savoir si les clients français joueraient le jeu. "Au début, c'était que des Asiatiques qui venaient, mais dès 2011, je n'ai eu presque que des gens du quartier". Comme Frédéric, chef d'entreprise de 63 ans qui vient très souvent et pour qui le piment est aussi important que le sel ou le poivre : "J'en utilise pour des salades, du guacamole, du poisson ou des pâtes. Je trouve tout trop fade sinon."

"Les gens ont l'impression de vivre une aventure avec le piment"

Myssan, 29 ans, d'origine vietnamienne, s'entraîne depuis toute petite à "manger des piments comme des chips" depuis qu'elle a vu son oncle le faire. Elle aussi est une cliente régulière du restaurant et aime venir y tester ses limites. "Les dernières fois, je prenais puissance 3 ou 4 et j'ai beaucoup souffert. Là, je vais rester humble et prendre 2 comme force." Tester sa résistance au piment est devenu une vraie trend sur les réseaux sociaux. "Ces challenges, on ne peut pas les faire avec les autres saveurs comme le salé", poursuit Lee Cheng. "Après la douleur, on a une sensation de plaisir. Du coup, les gens ont l'impression de vivre une aventure avec le piment. Mais attention, avec modération…"

Piments habanero (Californie) (BARBARA RICH / MOMENT RF)

"En France, vous manquez de piments", analyse Lee Cheng pour qui ce nouvel engouement des Français pour le piment vient peut-être combler une lacune de la gastronomie française. Enfin, une partie seulement de notre cuisine, puisqu'aux Antilles ou à La Réunion, le piment fait depuis longtemps partie intégrante de la liste des ingrédients incontournables. C’est l’échelle de Scoville qui permet de mesurer la puissance d’un piment. À titre d'exemple, la moutarde classique monte à 300 unités sur cette échelle. Le piment d'Espelette, lui, grimpe difficilement à 2000. On est loin des 200 000 que peuvent atteindre le piment habanero, celui qu'on utilise dans les départements d'outre-mer.

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