Quatre questions sur le botulisme, cette maladie qui a paralysé une femme qui avait consommé une soupe périmée
Cette maladie neurologique grave est provoquée par une intoxication alimentaire due à l'ingestion de toxine botulique, un poison "plus puissant que le cyanure".
Comment la consommation d'une simple soupe de légumes périmée a pu conduire une femme à frôler la mort et à se retrouver paralysée ? La question se pose après que Le Parisien a révélé cette information, mercredi 11 septembre. En cause : la toxine botulique. Franceinfo tente de répondre à plusieurs questions autour de cette affaire.
1Que s'est-il passé ?
Fin août, une habitante de l'Essonne fait deux malaises, à une semaine et demie d'intervalle, entre fin août et début septembre. En quelques jours, son état se dégrade considérablement. Si, dans un premier temps, les médecins croient à un accident vasculaire cérébral (AVC), les analyses révèlent qu'elle souffre de botulisme, une maladie grave due à l'absorption de toxines présentes dans des aliments contaminés. Selon ses proches, elle est "quasi totalement paralysée (...) Et avec très peu d'espoir de récupération".
Aussitôt informée, l'agence régionale de santé (ARS) alerte les autorités. Lors de la fouille de son domicile, les enquêteurs retrouvent dans son réfrigérateur une soupe de légumes périmée depuis trois semaines. Aucun problème n'a toutefois été signalé sur les 630 bouteilles du lot qui ont été vendues et consommées depuis. Au regard de la gravité de la maladie, le mode de production de la société qui commercialise cette soupe est passé au crible. Selon son porte-parole, cité dans Le Parisien, la négligence a été commise par la consommatrice, puisqu'il est "avéré que la personne malade a consommé un produit périmé".
Ce sont au total vingt-cinq aliments du réfrigérateur de la victime qui ont été analysés. Si les conclusions de l'enquête n'ont toujours pas été rendues, les plus forts soupçons pèsent sur cette fameuse bouteille de soupe.
2Qu'est-ce que le botulisme ?
Il s'agit d'une affection due à l'action de la toxine botulique produite par une bactérie appelée Clostridium botulinum. Cette maladie touche à la fois l'homme et les animaux, mais aucun cas de transmission de l'un à l'autre n'a jamais été observé et il n'existe, par ailleurs, aucune contagion interhumaine. Cette toxine est également utilisée pour préparer le Botox, un produit destiné à des fins cosmétiques ou thérapeutiques.
Cette toxine se développe notamment dans les aliments mal conservés et n'ayant pas subi de processus poussé de stérilisation, comme de la charcuterie, des conserves familiales ou artisanales, précise l'Institut Pasteur. Ele est "la plus puissante du monde végétal, microbien ou encore animal. Elle est plus puissante que le cyanure", indique la docteure Christelle Mazuet, responsable du centre national de référence Bactéries anaérobies et botulisme de l'Institut Pasteur, au Parisien.
Les symptômes apparaissent un à deux jours après l'ingestion de l'aliment contaminé et se manifestent par des troubles de la vision, des difficultés de déglutition, une constipation, des vertiges et une sensation de bouche sèche, détaille Allodocteurs. Plus la quantité de toxine botulique ingérée est élevée, plus la maladie se déclare rapidement et sévèrement. L'atteinte neurologique motrice ou sensitive en fait toute sa gravité avec des paralysies des membres ou des muscles respiratoires pouvant se compliquer de détresse respiratoire parfois fatale.
En cas de doute, il faut rapidement consulter pour obtenir un diagnostic et un traitement immédiat (administration précoce d’une antitoxine et de soins respiratoires intensifs), précise l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). La grande majorité des malades pris en charge sans délai guérissent sans séquelles, mais la durée du traitement et de la convalescence peut durer plusieurs mois. La maladie peut être fatale dans 5 à 10% des cas.
3Est-ce que ce genre de contamination est fréquente ?
En France, les cas de botulisme sont rares, précise l'Institut Pasteur. En Ile-de-France, seulement deux cas ont été déclarés en 2018, selon Le Parisien. Sur la période 2013-2016, 39 foyers confirmés ont été détectés et, dans 36 cas (91%), il s'agissait de botulisme alimentaire, selon des données de Santé publique France. Le botulisme alimentaire est donc la forme la plus fréquente en France et concerne majoritairement les adultes. Les produits de charcuterie étaient associés à 70% des cas.
Un vaccin antibotulique existe, mais il est réservé aux personnes exposées, travaillant en laboratoire par exemple, et il peut générer des effets secondaires importants.
4Quelles règles faut-il suivre pour l'éviter ?
• Attention aux conserves "maison". Les aliments le plus souvent impliqués dans les foyers de botulisme sont des conserves familiales ou des produits artisanaux, précise l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), qui dresse une liste relativement détaillée :
- La mortadelle, le jambon cru salé et séché, les charcuteries (toxine de type B).
- Les conserves de végétaux (asperges, haricots verts, carottes et jus de carotte, poivrons, olives à la grecque, potiron, etc.), salaisons à base de viande de bœuf (toxine de type A).
- Le poisson salé et séché, marinades de poisson, poisson ou viande de phoque fermenté, avec un emballage sous vide (toxine de type E).
• Attention aux boîtes de conserves abîmées. Si elles sont déformées, bombées ou dégagent une odeur suspecte à l'ouverture, elles ne doivent pas être consommées. A noter que les légumes contaminés par la toxine botulique ne dégagent, eux, pas d'odeur spécifique.
• Pas de miel pour les enfants de moins de 1 an. En effet, des formes résistantes (spores) de la bactérie, responsables de cette maladie, peuvent se trouver dans les poussières et certains sols. Transportées par les abeilles, les spores peuvent se retrouver ensuite dans le miel, prévient l'Anses. L'enfant de moins de 1 an est particulièrement sensible à cette infection, car son système immunitaire n’est pas tout à fait prêt pour se défendre contre les microbes.
• Le respect de la chaîne du froid. Pour les préparations n'ayant pas subi de traitement thermique ou l'ayant subi à un niveau insuffisant. Pour les denrées du commerce, il est nécessaire de respecter les consignes de conservation au froid et les dates limites de consommation.
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