: Vidéo Quand le groupe fromager Bel finance une étude sur le manque de calcium chez les enfants
Une étude publiée en avril par le CREDOC alertait sur les dangers du manque de calcium chez les enfants. Cette étude était en fait financée par Bel, célèbre groupe fromager. Alors, vraie info ou lobbying ? L'Œil du 20 heures a enquêté.
Vous aussi, vous avez peut-être été alerté par cette étude relayée dans plusieurs journaux ces dernières semaines : de plus en plus d’enfants seraient en manque de calcium ! « Les enfants consomment de moins en moins de lait et de fromage depuis une dizaine d’années », pouvait-on ainsi entendre sur RMC le 29 avril dernier. Alors l’œil du 20h s'est dépêché d’aller faire le plein de fromage. Et si c’était justement ça, le but de cette étude ?
Cette analyse a été publiée par le CREDOC (Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie), un organisme privé régulièrement cité dans les journaux. Il alerte sur une « diminution régulière de la couverture des besoins en calcium chez les jeunes enfants » entre 2010 et 2016.
Une analyse financée par un groupe fromager
La solution pour lutter contre ces carences ? C’est un industriel du fromage qui l’a trouvée. En s’appuyant sur cette étude, le groupe Bel a lancé une campagne de pub pour promouvoir le fromage au goûter. Le groupe Bel, vous connaissez forcément ses fromages en portion individuelles ou à tartiner... Eh bien c’est justement lui qui a financé l’analyse du CREDOC !
Alors est-elle vraiment objective ? Au CREDOC, où trois quarts des études sur la consommation sont financées par des industriels ou leurs représentants, on assure que oui.
Le CREDOC est financé forcément par des instituts privés puisqu’il faut payer des études. Là, en effet Bel propose des produits pour enfants, donc ils nous ont fait faire un focus sur ce que mangent les enfants et sur le calcium. On n’est pas une agence de publicité. On donne des faits, et chacun les utilise comme ils veut.
Pascale Hébel - Directrice pôle consommation au CREDOCà France 2
Mais que valent ces données ? Comme l'avait rappelé Le Canard Enchaîné, une autre étude, financée par un organisme public sur une période plus longue, donne des résultats différents. Pour Santé Publique France, il n’est pas question comme pour le CREDOC de “diminution régulière” de la consommation de produits laitiers chez les 6-10 ans… Elle est “globalement restée stable” chez ces enfants.
Deux études contradictoires
Alors qui croire ? Pour Pierre Méneton, chercheur à l’INSERM qui étudie l’influence des sources de financement sur les études scientifiques, ces deux rapports ne se valent pas. « La taille de l’échantillon est différente, les tests statistiques appliqués sont différents, » relève-t-il. « Ca peut expliquer, en partie, les différences que l’on observe entre ces deux études. Celle de Santé Publique France est quand même plus rigoureuse que celle du CREDOC ».
Contacté, le groupe Bel assure être attentif à toutes les études qui permettent de mieux comprendre les comportements alimentaires de ses consommateurs. Mais le groupe fromager n’a relayé que les statistiques du CREDOC sur les carences en calcium. Pas celles de Santé Publique France sur une consommation stable des produits laitiers chez les enfants.
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