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Vidéo Nitrites dans l’alimentation : "Il faut savoir si on protège les lobbys ou si on protège la santé publique", interroge la Ligue contre le cancer

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Article rédigé par franceinfo
Radio France

Mélangés à la viande, les sels nitrités génèrent une inflammation qui favorise la survenue de cancers, dénonce la Ligue contre le cancer qui soutient leur interdiction, bientôt examinée à l'Assemblée dans le cadre d'une proposition de loi.

Une proposition de loi qui sera examinée à l'Assemblée nationale le 3 février et visant à interdire les sels nitrités dans l’alimentation qui favorisent la survenue de cancers digestifs. "Il faut savoir si on protège les lobbys ou si on protège la santé publique", interroge le porte-parole et délégué au service de prévention et promotion du dépistage de la Ligue contre le cancer, Emmanuel Ricard, mardi 18 janvier sur franceinfo.

>> Jambon : “Le sel nitrité dans la charcuterie tue les Français”, affirme le député Modem du Loiret Richard Ramos

franceinfo : Pourquoi voulez-vous faire interdire les sels nitrités ?

Emmanuel Ricard : Ce sont des additifs qui ont un caractère oxydatif et, quand ils sont dans le tube digestif, ils favorisent la survenue de cancer, en particulier du cancer de l'estomac, du cancer du côlon et du rectum. Je rappelle que le cancer du côlon est le deuxième cancer, après le cancer du poumon, en termes de fréquence. Tout le débat qui se passe au niveau des scientifiques - et en particulier sur le complément d'information qui a été demandé à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses) et sur une première expertise qui avait été fait par l'Anses - est que les nitrites, quand ils sont pris indépendamment, ne sont pas considérés et classés comme dangereux. Ils ont été autorisés comme conservateurs. Or, on sait, et ça a été démontré à la fois par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le Centre international de référence sur le cancer (Circ), ainsi que par les organismes de l'agriculture, que quand ils sont mélangés avec de la viande, ce n'est pas la même chose, il y a le caractère oxydatif qui fonctionne et qui fait qu'il y a une dégradation, ça génère une inflammation et ça favorise la survenue de cancers.

La Fédération française des industriels charcutiers-traiteurs vous accuse de dénigrer ses produits et expliquent qu'ils auront moins de goût sans nitrites. Que répondez-vous ?

Ils auraient moins de goût, oui, puisqu'ils nous ont habitués à ce type de goût.

"Ils nous ont dit que quand c'est rose, c'est meilleur pour la santé, or ce n'est pas vrai puisque l'expérience prouve qu'au contraire c'est plus toxique."

Emmanuel Ricard de la Ligue contre le cancer

à franceinfo

Les nitrites leur permettent de faire plus de profits, parce que ça permet à la viande de faire de la rétention d'eau. Quand vous voyez les produits sans nitrites qui sont plus gris, moins roses, ils sont aussi moins chargés d'eau. Entre guillemets, on piège le consommateur et on lui fait payer de la flotte. Et derrière, nous, ce qui nous gêne, c'est que les mêmes charcutiers ont montré, pour certains industriels, qu'ils étaient capables de fabriquer sans nitrites. Cela a eu un sens à un moment donné en termes de conservation et d'anti-infectieux, mais aujourd'hui, avec la chaîne du froid, ça n'est plus la même chose. C'est une affaire de gros sous en termes de processus de fabrication. Enlever les nitrites réduit un peu la durée de conservation par rapport à des normes qui sont établies pour protéger le consommateur. Mais nous n'avons pas eu de cas d'infection différent entre ceux qui sont sans nitrites et ceux qui sont avec.

Vous avez lancé une pétition qui a récolté plus de 362 000 signatures. Est-ce une façon de faire un contrepoids face aux lobbys de la charcuterie qui va s'exprimer dans les couloirs de l'Assemblée ?

Ils se sont exprimés dans les couloirs de l'Assemblée. Ils se sont exprimés sur une première tentative d'un député envers celui qui lance justement cette proposition de loi pour le 3 février. Ils ont mis tous les artifices avec leurs lobbyistes alors qu'au départ, c'était juste la mise en place d'une taxation. Simplement, ils voulaient taxer le supplément pour remettre les prix au même niveau entre le sans-nitrites et le avec-nitrites. On voit bien que là, il y a un processus des industriels qui craignent cette démarche. Pour nous, il faut savoir si on protège les lobbys ou si on protège la santé publique.

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