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Ce que reproche la Cour des comptes aux petites maternités

Un rapport de la Cour des comptes appelle les autorités à renforcer la surveillance de certaines maternités, notamment les plus petites. Explications. 

Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Dans un rapport rendu public vendredi 22 janvier 2014, la cour des comptes appelle les autorités à renforcer la surveillance de certaines maternités, notamment les plus petites. (  MAXPPP)

Faut-il s'inquiéter pour nos maternités ? Certes, le taux de mortalité néonatale a légèrement diminué depuis 2004, mais dans le même temps, la France est passée, sur ce critère, du 6e rang au 17e rang européen, alors même que les effectifs médicaux n'ont jamais été aussi nombreux.

"La sécurité de la naissance doit encore être améliorée", écrit la Cour des comptes, dans un rapport publié vendredi 23 janvier, pointant du doigt des dysfonctionnements dans de nombreux établissements. Les petites structures sont particulièrement montrées du doigt. Elles sont treize au total, où le nombre d'accouchements est inférieur à 300 par an. Depuis 1998, il est interdit de descendre en-deça de ce seuil, sauf dérogation contraire pour des raisons d'éloignement géographique.

Des dérogations malgré des contrôles insatisfaisants

"Il ne s'agit pas de stigmatiser ces petites maternités", précise le sénateur UDI Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui a commandé le rapport. Il précise qu'une maternité française sur cinq a fermé en quinze ans. "Ce qu'on constate, c'est que certaines ont échappé à des contrôles ou n'ont pas mis en œuvre des recommandations. Sans compter qu'un certain nombre de maternités de niveau 1 et 2 ont des taux de mortalité néonatale supérieurs à la moyenne."

Ainsi, le document dénonce un manque de personnel risqué pour les patientes, comme à Ussel (Corrèze) ou Die (Drôme), plus petite maternité de France, avec ses 137 accouchements. En juillet 2011, les autorités sanitaires s'opposent même pour cet établissement au renouvellement de "l’autorisation d’obstétrique, à cause de dysfonctionnements dans la gestion d’urgences vitales, d’erreurs de diagnostic et de retards à la décision", sans davantage de précision. Avant de finalement sauver provisoirement la structure.

"Il n'y a jamais eu le moindre incident en vingt ans", soupire Jean-Pierre Rambaud, président du collectif de défense de l'hôpital de Die. Selon lui, les risques sont limités, puisque la maternité est en niveau 1. "Toutes les parturientes sont chouchoutées, il faut voir comme la maternité est agréable." Les grossesses à risque sont redirigées vers la maternité de Valence. Il n'est pas surpris par la polémique, alors que l'ARS doit étudier le renouvellement de la dérogation.

Des difficultés pour assurer des permanences 24h/24

"Nous n'avons pas de problème de personnel", répond à son tour Brigitte Linard, sage-femme cadre à Privas (Ardèche), qui évoque des motivations plus terre-à-terre. "En fait, nous coûtons très cher, je pense que c'est plutôt ça le problème de la Cour des comptes. Pour être rentable, une maternité doit réaliser 1000 accouchements."

Sans surprise, la Cour des comptes dénonce donc "35 maternités de petite taille qui sont confrontées à des difficultés sérieuses sur le plan financier et sur le plan des personnels". Avec là encore, des conséquences sur la qualité de l'accueil. La maternité d'Argenteuil (Val-d'Oise) peine à recruter des pédiatres, tandis que celle de Mantes-la-Jolie (Yvelines) manque d'internes en gynécologie-obstétrique. A Montluçon (Allier), la Cour des comptes estime que le sous-effectif est "particulièrement préoccupant au regard de la continuité et de la sécurité des soins".

La maternité de Cognac "ne respecte pas la norme s'agissant de la présence des sages-femmes de nuit", ajoute encore le document. En théorie, pour respecter les textes, elle devrait recruter plus de 3 équivalents temps plein de sages-femmes, ce qui fait bondir Jacques Vacquier, chef du pôle maternité de Cognac (Charente) : "Il y a toujours une sage-femme sur place. L'équipe assure une permanence 24h/24." Avec un taux de césariennes limité à 10%, il vante le travail de sa maternité, citant le cas récent d'une hémorragie de la délivrance traité sur place. "Nous affichons les résultats sur les murs, c'est un devoir. Moi, je réclame au ministère que les patientes soient informées de l'endroit où elles mettent les pieds, grâce à des sites régionaux d'information."

Des recours aux diplômés étrangers et aux intérimaires

En attendant, certaines maternités recourent aux services de médecins étrangers, pour garantir une permanence 24h/24. Le souci, quand ils sont titulaires de diplômes extra-communautaires, c'est qu'ils doivent les faire valider par le Conseil de l'ordre. En attendant, "puisqu’un autre médecin doit être présent pour les 'sénioriser', ils ne peuvent pas participer à la permanence des soins", ce qui occasionne des absences dans l'accueil.

Pour compléter leurs équipes, les établissements font aussi appel à des médecins intérimaires, pour un coût élevé. Auteur d'un rapport sur cette question en décembre 2013, le députe PS de l'Isère Olivier Véran pointe de graves dérives. "Il existe des boîtes de mise en relation – certaines basées à l'étranger – qui peuvent contacter des médecins à l'autre bout de l'Europe pour venir travailler le lendemain en France." Difficile, dès lors, de mener des évaluations dans ces conditions, après deux ou trois jours passés dans une structure."Des médecins et des infirmières m'ont raconté avoir déjà travaillé avec des intérimaires sans même avoir de garantie sur l'existence réelle de diplôme. Parfois, certains parlent à peine français."

L'élu en convient lui-même, il est difficile de faire entendre ces arguments dans des territoires où la maternité représente parfois le dernier service public. Par ailleurs, il faudrait mesurer l'influence éventuelle de la distance entre le domicile et la maternité sur le taux de mortalité néonatale. A ce jour, aucune étude n'a été menée sur la question.

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