Cannabis : des parlementaires demandent une "légalisation encadrée" permettant à l'État de "reprendre le contrôle"
Hausse de la consommation, augmentation de l'insécurité... Le trafic du cannabis est une "double peine", selon la députée LREM Caroline Janvier qui dresse un "constat d'échec" des politiques répressives menées jusqu'ici.
"Nous proposons une légalisation encadrée, qui permette à l'État de reprendre le contrôle de la production, de la consommation, de la distribution de cannabis, en contrôlant les substances qui sont vendues", a déclaré mercredi 5 mai sur franceinfo Caroline Janvier, député LREM de la 2e circonscription du Loiret, rapporteure d’une mission d’information sur la réglementation des différents usages du cannabis.
Ce rapport, dont les conclusions sont présentées mercredi, dresse un "constat d'échec" des lois répressives sur le cannabis et prône une "légalisation régulée" du cannabis récréatif. Les parlementaires souhaitent notamment faire "respecter l'interdit de vente aux mineurs" et proposer des "démarches de réinsertion" aux dealers.
>> Dépénalisation, légalisation du cannabis : de quoi parle-t-on ?
franceinfo : Quel constat dressez-vous au sujet du cannabis à usage récréatif en France ?
Caroline Janvier : C'est malheureusement un constat d'échec sur ce que nous faisons en France depuis maintenant 50 ans, parce que les Français sont les plus gros consommateurs d'Europe, et cette consommation continue d'augmenter année après année. La deuxième chose, c'est que les trafics de cannabis génèrent beaucoup de violence, de l'insécurité dans un certain nombre de quartiers en France. Donc on voit qu'on a finalement la double peine malgré une politique parmi les plus répressives.
D’où l'intérêt de sortir de la prohibition, d'après votre rapport. S'agit-il de légaliser ou dépénaliser le cannabis ?
Ce que nous proposons dans ce rapport c'est une légalisation encadrée, c'est-à-dire une légalisation qui permette à l'État de reprendre le contrôle de la production, de la consommation, de la distribution de cannabis en contrôlant les substances qui sont vendues, en faisant respecter l'interdit de vente aux mineurs, et en protégeant finalement la santé des consommateurs et la sécurité des Français. C'est bien pour ça qu'on parle de légalisation régulée.
Ça signifie que pour les plus de 18 ans, le cannabis serait en vente libre en France ?
Tout à fait, c'est ce que c'est ce qu'on propose. Malheureusement aujourd'hui, les mineurs y ont accès, les dealers ne font pas de différence en fonction de l'âge. Et surtout, les consommateurs de cannabis consomment un peu tout et n'importe quoi. Ça peut être de la résine coupée à tout un tas d'autres substances, ça peut être du cannabis de synthèse ou du cannabis dont la teneur en THC, la molécule qui a un effet psychotrope, augmente d'année en année. C'est pour cela qu'il faut reprendre le contrôle et établir une régulation par l'État de ce qui est vendu, des personnes à qui on le vend, et surtout mettre en place une vraie politique de santé publique et de prévention qui est malheureusement quasiment inexistante aujourd'hui en France sur cette question-là.
Comment éviter que les trafiquants ne se reportent dans ce cas vers d'autres activités potentiellement criminelles ?
Généralement, ce ne sont pas les mêmes circuits de production. Le cannabis est produit dans certaines régions et donc ceux qui organisent aujourd'hui les trafics et la distribution n'ont pas les mêmes interlocuteurs.
"Il existe des expériences dans d'autres pays avec des démarches de réinsertion des dealers et où finalement, l'État, qui peut alors percevoir des recettes fiscales avec une vente régulée de cannabis, peut investir dans ces quartiers pour accompagner les dealers."
Caroline Janvier, député LREMà franceinfo
Aujourd'hui, de façon un peu hypocrite, on considère qu'on achète la paix sociale dans les banlieues et que le cannabis fait vivre ces banlieues. En réalité, ce sont les têtes de réseau qui gagnent beaucoup sur les trafics. Les guetteurs, les coupeurs, ceux qui sont en bas de l'échelle gagnent en réalité peu d'argent, et ce sont évidemment des "emplois" qui sont très aléatoires, avec des allers retours en prison. On souhaite leur proposer d'autres perspectives. On ne réussira jamais à réinsérer 100% des dealers dans des réseaux légaux. Mais on pourra investir de l'argent dans ces territoires plutôt que de considérer, comme on le fait actuellement, qu'après tout ils s'organisent comme ils veulent, qu'ils payent leur loyer comme ça et que tout le monde se satisfait de cela.
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