Prise de poids, hausse des prix, pilules... Ces dix idées reçues sur la cigarette qui ont la vie dure
A l'occasion de la journée mondiale sans tabac, il est peut-être temps d'écraser votre dernière clope. Pour vous aider, francetv info revient sur quelques clichés.
Tous les ans, l'Organisation mondiale pour la santé (l'OMS) consacre le 31 mai à la lutte contre la cigarette. En France, le tabac tue chaque année plus de 73 000 personnes, selon le comité national contre le tabagisme (CNCT). Soit autant que l’alcool, les accidents de la route, le sida, les suicides, les homicides et les drogues illicites, réunis.
Pour lutter contre le tabagisme en France, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, entend, selon Le Figaro, instaurer des paquets neutres, interdire la cigarette électronique dans les lieux publics, mais aussi rendre possible un nouveau type d'action de groupe. Des mesures qui, d'après un récent sondage Ipsos, sont en accord avec la volonté des Français de bannir davantage la cigarette de leur quotidien. Pourtant, les idées reçues sur le tabac ont la vie dure. Francetv info revient avec l'aide d'Emmanuelle Béguinot, directrice du CNCT, sur quelques-unes d'entre elles.
1Le tabac fait moins de morts qu'avant : faux
D'après l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le tabac a provoqué 100 millions de décès au XXe siècle et il en entraînera jusqu’à un milliard au XXIe siècle si la tendance se poursuit. Actuellement, il y a près d'un milliard de fumeurs dans le monde. Six millions d'entre eux meurent chaque année, soit un mort toutes les six secondes. Sans oublier que 600 000 non-fumeurs meurent également chaque année à cause du tabagisme passif. Pour l'OMS, la consommation de tabac est l’une des plus graves menaces qui ait jamais pesé sur la santé publique mondiale. L'ONU estime que d'ici 2030, la cigarette sera la principale cause de décès dans le monde avec plus de 8 millions de décès par an.
"Un phénomène exponentiel qui suit la croissance démographique, se désole Emmanuelle Béguinot. A l'inverse du paludisme, le tabagisme se transmet par les stratégies de marketing des fabricants, mais on peut tout autant de parler d'épidémie."
2 Deux ou trois clopes par jour, ce n'est pas grave : faux
Même une faible consommation est dangereuse sur le plan cardio-vasculaire. "Vous risquez un infarctus du myocarde, rappelle Emmanuelle Béguinot. C'est ce genre de risque que produit justement le tabagisme passif. "
Ce qui tue en réalité, c'est moins le nombre de cigarettes fumées par jour que le nombre d'années de consommation. "Les cancers sont liés à la durée de l'exposition. Consommer un paquet par jour pendant vingt ans est plus dangereux que deux par jour pendant dix ans", analyse la directrice du CNCT.
3 Les cigarettiers sont plus malins qu’avant : vrai
"Si pendant longtemps, les cigarettiers ont nié la toxicité du tabac, ils ne peuvent plus aujourd'hui tenir ce genre de discours. Donc les fabricants sont actuellement dans une autre approche plus diffuse, plus détournée, en faisant parler les autres à leur place par exemple", explique Emmanuelle Béguinot. Le CNCT, en partenariat avec 60 Millions de Consommateurs, a publié les résultats d'une étude qui souligne l'influence exercée par l’industrie du tabac en France sur les politiques de santé publique.
Pour la directrice du CNCT, les fabricants de tabac s'attachent moins à mettre en avant une marque en particulier, qu'à faire la promotion du tabagisme comme un état d'esprit, notamment à travers les placements de produits dans les films. "Le tabagisme est devenu un synonyme d'indépendance, de force, de liberté, un symbole de résistance aux interdictions."
4 Ce n'est pas la nicotine qui est dangereuse : faux
Le phénomène de combustion est à l'origine des cancers et non la nicotine. Mais la nicotine est ultra-addictive et empêche d'arrêter de fumer.
Et c'est une drogue extrêmement puissante. "Les poly-consommateurs, qui prennent de l'alcool, de la cocaïne ou de l'héroïne, ont plus de mal à arrêter la nicotine que le reste. C'est d'ailleurs la cigarette qu'ils arrêtent en dernier", souligne Emmanuelle Béguinot.
5 J’ai assez peu de chance de mourir finalement : faux
D'après l'OMS, la moitié des consommateurs actuels mourront d'une maladie liée au tabac. "Quel que soit l'âge, on a toujours intérêt à arrêter la cigarette, c'est toujours des années gagnées", rappelle la directrice du CNCT.
Les décès dus au tabac interviennent en moyenne entre 35 et 69 ans. Et lorsque l'on fume, c'est quinze années de bonne qualité de vie que l'on perd. De plus, "contrairement aux idées reçues, on meurt aussi du tabac avant 40 ans, met en garde Emmanuelle Béguinot. Tous les infarctus du myocarde qui surviennent avant la quarantaine sont causés uniquement par le tabac."
6 La e-cigarette, c'est moins risqué : vrai... mais attention
Les spécialistes s'accordent effectivement à dire, que s'il n'y a pas de combustion, il y a, a priori, moins de risques. "Mais il faut des années pour développer un cancer et nous n'avons pas le recul suffisant", souligne la directrice du CNCT. Alors, oui à la cigarette électronique si elle permet d'arrêter complètement le tabac et qu'elle est considérée comme un moyen de sevrage, et non si c'est juste une mode.
Et Emmanuelle Béguinot d'appeler à la prudence : "Certaines études, qui viennent de sortir, montrent des conséquences inattendues comme une résistance aux antibiotiques développée par certains vapoteurs."
7 La hausse des prix ne sert à rien : faux
"Lorsque l'on augmente le prix des cigarettes de 10%, on constate une baisse de la consommation de 3,5% à 4%. La baisse la plus importante s'opère chez les jeunes qui sont les plus sensibles à la variable des tarifs", analyse la directrice du CNCT. Après le premier plan cancer en 2003 et l'augmentation de 40% du prix des cigarettes, deux millions de personnes ont arrêté de fumer.
A l'occasion de la journée sans tabac, l'OMS estime qu'une hausse des taxes de 50% réduirait le nombre de fumeurs de 49 millions dans le monde au cours des trois prochaines années. Quelque 11 millions de vies pourraient ainsi être sauvées.
8 Arrêter rend triste et fait grossir : faux... et un peu vrai
Vous avez tout intérêt à arrêter de fumer pour être heureux. Une équipe de scientifiques britanniques a démontré qu'arrêter la cigarette, contrairement aux idées reçues, peut faire l'effet d'un antidépresseur. L'état de stress que le fumeur ressent au début du sevrage est dû au manque de nicotine et se dissipe en trois semaines. Après cette période, selon l'étude, les personnes qui ont réussi à arrêter de fumer sont moins déprimées que ceux qui ont repris la cigarette.
Oui, arrêter de fumer fait prendre du poids. Un groupe de médecins français et britanniques, qui ont publié les conclusions de leurs travaux le 10 juillet 2012, dans le British Medical Journal (en anglais), ont calculé qu'un an après la dernière cigarette, la prise de poids se situe en moyenne à 4,7 kilos. Un phénomène à relativiser selon Emmanuelle Béguinot : "Beaucoup de gens arrêtent de fumer seuls et vont compenser en mangeant beaucoup. Il faut se faire accompagner, bien préparer son sevrage, connaître sa dépendance à la nicotine et mettre en place d'autres habitudes de vie."
9 Les cigarettes "light" sont moins nocives : faux
Même si l'industrie du tabac assure qu'il y a moins de produits toxiques dans les cigarettes "light" que dans traditionnelles, les chiffres ne correspondent pas à la toxicité réellement ingérée. Car le fumeur prend de plus grandes bouffées pour compenser le manque de nicotine.
10Le cocktail pilule-tabac est explosif : vrai
Les professionnels sont formels : fumer et prendre la pilule en même temps est dangereux. Les femmes concernées ont plus de risques de faire un accident cardio-vasculaire que les autres.
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) rappelle ainsi que le tabac augmente de façon importante le risque de thrombose artérielle (infarctus du myocarde et accident vasculaire cérébral). L'ANSM conseille donc "fortement d’arrêter de fumer si vous prenez la pilule, en particulier si vous avez plus de 35 ans".
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